Parents-Ecole

PARENTS/ÉCOLE

Sylvie CHEVILLARD

enseignante, formatrice ,militante du GFEN, responsable nationale

membre associé à l'équipe ESCOL-Paris 8

St Firmin des Près, le 9/03/2011


Communication avec les familles : enjeux et difficultés rencontrées.

  • Définir la place de chacunà l'école
  • S'interroger sur les difficultésrencontrées
  • Échanger sur des pratiques.

Les relations école à familles sont un sujet récurrent qui ont été l'objet depuis quelques années de textes officiels proposant des pistes d'organisation de ces rencontres voire, les institutionnalisant aux travers des rendus des résultats scolaires aux parents.

Dans de nombreuses écoles, ces relations sont tendues avec des pratiques allant de la discussion aux règlements passant par la hiérarchie. Dans ma pratique, j'ai vu se développer les plaintes auprès de la police que ce soit de la part de parents comme d'enseignants, ce qui me concernant me pose question: l'enfant étant tout d'abord celui de ses parents, qu'en est-il de l'environnement proposé par les différents adultes pour qu'il se construise en tant qu'humain respecté, respectant?

Dans un premier temps, j'aborderai quelques valeurs, points d'ancrage des enjeux de relations entre adultes autour de cet enfant à élève accueilli dans l'institution scolaire, puis apporterai quelques situations analysées entre autre quant aux effets positifs sur les apprentissages des élèves.


1. Tous les enfants sont issus d'un milieu (Wallon), d'un milieu socio culturel(Bourdieu) et vont fréquenter le système scolaire une vingtaine d'années.

Si Bourdieu montre l'influence du milieu social d'origine, et même la reproduction confortée par l'école, les travaux de Wallon montrent que c'est en se confrontant à divers milieux (manières de faire et de dire différentes des habitudes familiales) que l'enfant va se construire.

Jacquart (généticien)explicite que l'enfant est le produit de 4 sources : le patrimoine génétique, le milieu, l'humanitude (distinction d'avec les animaux), et la complexité (capacité de penser pour parler et inversement).

Il est souvent évoqué les difficultés avec les parents et enfants de milieux populaires, dans le cadre des travaux de l'équipe ESCOL, Rochex montre combien il est nécessaire pour qu'un élève s'implique dans les apprentissages scolaires qu'il se sente autorisé par sa familles, qu'il s'autorise lui-même et qu'il inscrive cette expérience dans sa propre histoire; cette « triple autorisation » semble un point d'appui fort pour la réussite scolaire.


D'autres travaux de psychologie sont aussi important pour considéré la nature des relations entre parents et école, dans une perspective d'accompagnement des enfants dans les apprentissages scolaires : j'aborderai l'effet Pygmalion.Rosenthal a demandé à des étudiants d'apprendre à des souris à se déplacer dans un labyrinthe. Il a donné un groupe de souris en disant aux étudiants qu'elles étaient sélectionnées pour leurs capacités d'orientation quand pour les autres il précise qu'elles sont ordinaires. Les souris des étudiants du premier groupe vont effectivement être performantes. Fort de cette expérience,Rosenthal explicite le phénomène des attentes et décident de le valider dans une école. Des enfants d'une école, portoricains et ayant de mauvais résultats scolaires, sont testés. Leur QI n'est pas divulgué. Rosenthal dit à l'enseignant ne pas comprendre pourquoi ce groupe d'élèves sont de mauvais élèves car ils ont un QI supérieur, quand pour l'autre groupe il ne précise rien. En fin d'année, les élèves du premier groupe ont non seulement de meilleurs résultats scolaires mais leur QI a effectivement évolué.Ces travaux seront à l'origine de ceux concernant l'estime de soi,entre autres.

Mais aujourd'hui, les neuro sciences apportent une explication neurologique à ce phénomène : les travaux de Dhuyme ont mis au jour qu'à milieu social équivalent, des enfants handicapés voient leurs compétences se développer en lien avec les stimulations de leur environnement et concluent à l'influence considérable de l'environnement sur les capacités à gérer un handicap.

Si j'insiste sur cet aspect des connaissances, c'est que le GFEN depuis de nombreuses années a mis en oeuvre dans ses slogans mais aussi ses pratiques de formation la notion du « tous capables », qui aujourd'hui n'est plus seulement un voeu philosophique mais trouve des appuis dans divers champs des sciences.

Ces valeurs, prenant appui sur des travaux scientifiques et humains, ont à voir

  • avec le devenir de l'enfant : le conduire à l'élève mais aussi l'amener à se « déprendre de son milieu d'origine » pour grandir, c'est le pari d'éducabilité et des possibles infinis de tout être humain à se transformer

  • avec la place des parents : ils sont les premiers éducateurs de leur enfant et ce, quelque soit leur milieu social d'origine

  • avec le rôle des enseignants (pour ne parler que de nous aujourd'hui!) : assurer la prise en compte cet enfant comment « petit d'homme », riche de tout ce qu'il a déjà appris avant de venir à l'école dans son milieu familial.


2. Les pratiques langagières des enfants et de leur famille sont plus ou moins éloignées du langage scolaire

Les pratiques langagières, selon Bautier,sont constituées des manières de dire dans l'environnement (sociolinguistique) de l'enfant mais aussi de l'histoire de celui-ci(sujet). C'est ainsi que les travaux d'ESCOL ont montré les malentendus qui se nouaient entre certains élèves et le sens qu'ils construisaient à ce qu'il venaient faire à l'école, malentendus relayés par les familles différemment. Bernstein a montré dans ses travaux de linguistique les différences de langage utilisé selon les classes sociales : les classes sociales les plusdéfavorisées utilisant avec leurs enfants majoritairement un langage pragmatique dans l'ici et le maintenant, quand dans les classes sociales plus élevées, le langage était tourné vers les explications, les hypothèses, c'est-à-dire utiliser comme celui de l'école, en liant avec la pensée. Il s'en suit des conceptions différentes du monde et des attendus de l'école en particulier. Une connivence est établie d'emblée pour les enfants dont les pratiques langagières sont proches de celles de l'école quand pour les autres, les malentendus peuvent devenir source de difficultés scolaires.

Des travaux menés en petites sections de ma part, ont conforté les hypothèses de Bernstein sur les effets des pratiques langagières des enseignants sur celles des élèves. C'est ainsi que les enseignants utilisant(de manière inconsciente ou pour faciliter la compréhension)majoritairement des pratiques langagières de monstration (désigner du doigt, déplacer les étiquettes), d'implicite, dans l'ici et le maintenant (« va me chercher ça qu'est là-bas ») ont des élèves dont les interventions langagières sont à minima. Pour des pratiques langagières d'enseignants étant plus tournées vers la reformulation, l'explicitation, les élèves sont amenés à utiliser des formes syntaxiques et le lexique de façon plus courante(« feuilles », I).

Ces pratiques langagières différentes existent dans la classe : ils'agit de les rendre explicites, lisibles pour que chacun puissent entrer dans celles de l'école, c'est-à-dire accède à la secondarisation du langage (au sens de Bakhtine).

Pour cela il convient de s'appuyer sur l'activité (concept de Léontiev)de chacun et la confrontation de l'ensemble des protagonistes :

  • pour les élèves, le but à atteindre et visible dans les résultats, nécessite des opérations et une mobilisation

  • pour les enseignants, la nécessité d'un langage explicite visant à ce que les élèves utilisent le langage pour expliciter procédures, descriptions, émotions... dans des références construites et dans des échanges réels

  • pour les parents, la connaissance des attendus à l'école et les échanges sur ce qu'ils peuvent mettre en oeuvre pour aider leur enfant, dans l'accompagnement dans la scolarité

=Lisibilité de l'école pour tous


3. Des pistes pour la réussite des élèves, concernant les relations entre l'école et leurs parents

Il s'agit selon Michel Huber, d'une complémentarité des deux milieux, loin de la concurrence mais tournée vers la coopération

Des réunions : quand? Pour quoi faire? Avec qui?

Des rencontres individualisées : pourquoi? Comment? A quelle fréquence?

Des observations de classe : pourquoi? Comment?

Des projets communs : sous quelles formes? Pour quels buts? Avec quelsrôles?

Quelques concepts en lien avec des valeurs


Conception de l'homme

Regard positif : effet Pygmalion - Rosenthal

Homme, produit de 4 sources : patrimoine génétique, milieu, humanitude, complexité - Jacquart

Tous capables d'apprendre

du pari d'éducabilité à la réussite des élèves

ex : les 5 premières minutes de la rentrée


Parents, premiers éducateurs de leur enfant

confiance en soi

ex : CALE, débats élèves à parents à partir de l'histoire de Madassa

Projet : apprendre pour grandir

Concept d'activité - Léontiev

Penser

ex : des objets du quotidien aux objets scolaires


Rapport au savoir, à l'apprendre

Inégalités sociales, inégalités scolaires - ESCOL

Sens de l'école

ex : questionnaires Bernardin

triple autorisation à Rochex

ex : recherche d'écrits du quotidien

Pratiques langagières - Elisabeth Bautier

Sujet dans une histoire, un milieu

ex : manières de dire billet à ticket à étiquette

Représentations de l'école

ex de malentendu : soit sage, écoute

De la concurrence à la coopération - Michel Huber

Complémentarité

= distance ( conceptualisation, socialisation)

= coopération et solidarité

Aide à l'émancipation par la construction de savoirs

ex : observation d'activités de lecture

préparation de la réunion paretns par les élèves

Ex : comment aider vos enfants à apprendre?

Comment s'est passée la rentrée du parent?



Références

  • Mémoire de licence en sociologie de l'éducation, sous la direction d'Agnès Van Zanten : Investissement des parents de milieu populaire dans la scolarisaton de leur enfant, 2000

  • L'école maternelle et les parents de milieu populaire, in Petite enfance : enjeux éducatifs de 0 à 6 ans, dir° Geniex, Chartier, ESF, 2007

  • Informer ou former des parents? Dialogue n°127 Parents, des liens à réinventer, 2007

  • Forum des pratiques : analyse de pratiques de réussite dans la région Centre et à la Réunion, ANLCI


Références bibliographiques

THIN Daniel, Quartiers populaires :l'école et les familes, PUL, 1998

CHARLOT Bernard, Du rapport au savoir,Eléments pour une théorie, Anthropos, 1997

CHARLOT B, BAUTIER E, ROCHEX J-Y, Ecoleet savoirs dans les banlieues... et ailleurs, Colin, 1992

DUEE M, L'impact du chômage desparetns sur le devenir scolaire des enfants, INSEE, 1994

GLASMAN D, « Parents » ou« familles » : critique d'un vocabulaire générique, inRevue française de pédagogie : Ecole et famille, n° 100, 1992

HUBER M, Parents tous capables Pouraider efficacement votre enfant, Hachette, 2007

VAN ZANTEN A, « Stratégiesutilitaristes et stratégies utilitaires des paretns vis à vis del'école : une relecture critique des analyses sociologiques »,in Lien social et politiques : famille et école, RIAC 35, 1996

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