L activité, espace de transformations
| le 30/11/-0001 00:00
C'est dans la confrontation de ses différents milieux que se construit le petit d'homme, dans une activité qui le transforme.En savoir plus
Mouvement de recherche et de formation en éducation
Tous capables ! Tous chercheurs ! Tous créateurs !
Cette formule s'applique particulièrement bien à
l'enseignement. Comme la formation dispensée ne permet
pas en général de savoir avec précision où
l'on va, il s'ensuit qu'on arrive souvent ailleurs.
Les méthodes de lecture et les règles de M. Bled, c'est
exactement cela. Les unes comme les autres se gardant bien de dire
où elles conduisent ceux qui les suivent, ces derniers arrivent
à l'opposé de leur but. Mais le système
est si pervers qu'ils ne s'en aperçoivent même
pas, et qu'ils clament haut et fort leur réussite.
On peut pardonner et comprendre ceux qui sont ainsi victimes d'une
illusion soigneusement entretenue par la formation reçue. On
comprend moins ceux qui théorisent là-dessus pour justifier,
au nom d'idéaux prétendument républicains,
des pratiques d'un autre âge, à la fois stupides
et dangereuses aujourd'hui.
La dimension politique de nos pratiques, c'est précisément
dans « l'ailleurs » dont parle Mager qu'elle
se situe. Ou si l'on préfère, dans l'écart
qui existe entre les objectifs de ces pratiques, les intentions de
résultat évidemment républicaines et leurs conséquences,
telles que nos connaissances sur le fonctionnement des enfants et
un raisonnement un peu rigoureux peut les prévoir.
Un des « avantages » (si l'on peut dire) de la situation
ubuesque de l'école aujourd'hui, objet d'une
foudroyante marche arrière impulsée par des gens que
l'on croyait sensés jusque-là, c'est d'avoir
rendues possible des questions fortement taboues auparavant : y a-t-il
une pédagogie de droite, même chez des gens qui votent
à gauche ?
Et devant quelques-uns des propos entendus ici ou là, venant
de certaines sensibilités dites « de gauche »,
on reste perplexe. On découvre alors qu'il conviendrait
peut-être de poser la question en termes de cohérence
entre la pratique de classe et le bulletin de vote...
Si l'on admet, en effet, qu'être un enseignant de
« gauche », (être enseignant tout court !) c'est
être convaincu :
1) que la tâche première de l'école est
d'apporter à tous les enfants la richesse de rencontres
et d'expériences que la famille offre à quelques-uns
;
2) qu'il n'y a pas de fatalisme social et qu'aucune
raison logique ne justifie que l'injustice sociale n'entraîne
automatiquement l'échec scolaire ;
3) que tous les élèves ont des savoirs, et qu'un
« mauvais » élève n'est jamais un
élève qui ne sait rien, mais un élève
dont l'école méprise ou ignore les savoirs ;
4) qu'il importe donc de prendre en compte ces savoirs, si erronés
et si éloignés du programme soient-ils, pour les mener
vers les attentes institutionnelles
5) qu'il importe également pour cela donner aux enfants
de « vraies graines et non du sable » (formule d'Alain),
c'est-à-dire travailler sur du vrai, sur de l'ambitieux,
et du valorisant ;
force est d'admettre que le discours, qui présente la
méthode Boscher (ou la Planète des Alphas, ou les ouvrages
de M.Bled) comme le modèle parfait de l'enseignement
de la lecture, et de la langue, est un discours contraire aux valeurs
républicaines, et ceux qui le tiennent, des schizophrènes
graves, s'ils prétendent le contraire.
Explications.
Si l'on enseigne la lecture à partir des syllabes, alors
que celles-ci n'existent pas dans le français écrit,
quelle peut en être la conséquence ? Que les clés
offertes ainsi aux élèves n'ouvriront que les
portes déjà ouvertes. Qui deviendra alors capable d'ouvrir
celles qui sont fermées ? Qui ? Sinon ceux qui vont trouver
dans leur environnement familial les moyens de le faire ?
Si l'on oublie d'enseigner les opérations cognitives
par lesquelles on construit du sens pour utiliser les écrits,
que va-t-il s'en suivre ? Que ces opérations devront
être découvertes par les élèves tout seuls.
Tout seuls ? Bien sûr que non. Devinez où sont ceux qui
en auront les moyens !
Si l'on enseigne les mouvements de la brasse sur un tabouret,
il restera à l'élève à apprendre
tout seul à nager, après s'être débarrassé
du pseudo-savoir acquis sur le tabouret. De la même manière,
si l'on enseigne comment oraliser des syllabes et identifier
les mots par le déchiffrage, il restera à l'élève
à construire un vrai savoir-lire, tout seul, sur les écrits
de la société, lesquels n'ont rien de commun avec
ce qui a été appris à l'école, et
ne peuvent être compris avec le mécanisme enseigné.
Est-ce bien conforme aux valeurs de la République ?
Si l'on enseigne la lecture sur les phrases et les mots que
l'on trouve dans la méthode Boscher ou dans « Léo
et Léa », comme « ma mère a ramené
petite marie » (Méthode Boscher, page11), phrase écrite
sans majuscules (donc sans orthographe : la majuscule en fait partie)
et dans une formulation pour le moins douteuse grammaticalement, quelle
conséquence peut-on attendre sur la maîtrise de la langue,
priorité pourtant première en Haut Lieu ?
Si l'on enseigne systématiquement des règles toutes
faites (du reste souvent fausses) à appliquer mécaniquement,
alors que la maîtrise du langage n'est autre que la maîtrise
des choix, (bien parler n'est point parler selon les règles,
c'est savoir choisir, à l'oral comme à l'écrit,
les formulations les plus efficaces, pour obtenir le résultat
souhaité), qui va trouver les clés de la maîtrise
langagière, et où ?
Une telle option de sélection sociale est-elle conforme aux
valeurs de la République ?
Décidément, il y a bien une pédagogie de droite,
une manière de faire la classe qui protège les classes
dirigeantes de toute pollution populaire... Et quand le bulletin de
vote prétend viser un résultat contraire, le délit
d'incohérence est impardonnable.
On pourrait multiplier les exemples et rappeler, avec Carl Rogers
que « l'on n'apprend bien que ce qu'on a appris
soi-même ». Enfourner des savoirs tout faits dans la tête
des élèves, c'est évidemment les empêcher
d'apprendre, surtout quand, en plus, ce sont des savoirs discutables
et infondés.
On le voit : tout acte pédagogique est toujours une prise de
position politique d'autant plus dangereuse qu'elle est
moins consciente. C'est pourquoi l'exigence de cohérence
politique doit être au coeur de la formation des enseignants
(et de tout citoyen digne de ce nom). Il faut apprendre à repérer
cette dimension politique
- dans les contenus enseignés d'abord.
Si j'enseigne autre chose que ce que les élèves
doivent apprendre, je crée, de toute évidence, une sélection
sociale dans les savoirs acquis : le vrai savoir, le savoir utilisable
et libérateur, il faudra se le construire soi-même, avec
les moyens du bord (et le bord n'est pas égal pour tous
!).
- et aussi dans les démarches mises en oeuvre.
En revenant à la théorie du remplissage, parfaitement
contraire à tout ce que l'on sait du fonctionnement des
enfants, en choisissant une progression linéaire des apprentissages,
parfaitement contraire à ce qu'on sait du fonctionnement
des apprentissages en général qui ne s'ajoutent
jamais les uns autres, mais s'organisent en relation les uns
avec les autres ; en ne prenant pas en compte les spécificités
de savoirs et de stratégies des enfants, tous différents
de l'un à l'autre, on élimine évidemment
tous ceux qui n'ont que l'école pour « sortir
de leur condition » comme on disait jadis.
Non, décidément, Rien de tout cela n'est conforme
aux valeurs de la République, il est temps de mettre un peu
de cohérence dans les pensées et d'assumer la
signification politique des choix pédagogiques.
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