Où en est-on aujourd'hui?
Yann Gibert | le 01/01/1970 00:00
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Mouvement de recherche et de formation en éducation
Tous capables ! Tous chercheurs ! Tous créateurs !
Le droit à l'éducation et à sa mise
en œuvre comme éducation publique pour tous, est une première
nécessité. Mais il est tout aussi urgent de s'interroger
sur quelle école, pour quelle société, pour quelles
finalités. Car l'école, dans tous les pays où elle
s'est développée, y compris comme école publique
pour tous, si elle a entraîné une massification scolaire
réelle, n'a pas eu pour effet notoire de former à des comportements
et pratiques démocratiques. Trop souvent liée à des
formes périmées de pensée, où l'évidence
indiscutable fait loi, à des contenus scientifiques et culturels
conçus plus dans leurs productions finies que dans leurs ruptures
créatrices, l'école a évacué de ses pratiques
d'apprentissage l'exercice d'une fonction critique exigeante en même
temps que celle d'un imaginaire créatif. Elle n'a pas laissé
de place à une vie coopérative et participative, dans la
classe et l'école, ni aux projets réels élaborés
et conduits par les élèves, ouverts sur le monde social.
Ce faisant, l'école n'a pas su poser les jalons, tant dans ses
contenus que dans ses méthodes, d'une formation réelle à
une démocratie en devenir.
Un immense défi se pose aujourd'hui face au développement
à l'échelle mondiale d'un néolibéralisme qui
sait maintenant s'emparer du " capital immatériel, invisible
" que représente le potentiel humain d'intelligence, de compétence
et de création pour le mettre au service du profit, par la médiation
du développement et de la concurrence des entreprises. Ainsi, pour
le " Knowledge Management ", l'avenir de l'expansion de l'économie
de marché est-il lié aux enjeux d'une production assurant
désormais le passage " de la main d'œuvre au cerveau
d'œuvre ". Une marchandisation pas seulement des mains et de
la force physique, mais de la tête et du potentiel créatif
de chacun. D'où un déploiement de pratiques de formation
(qui se veulent actives et constructives), de mises en œuvre de projets
qui se saisissent de toute intelligence et compétence, voire d'une
" mutualisation ", pour la plus grande accumulation des profits.
Dans l'accompagnement d'interdits, surtout sur le plan social, camouflés
derrière des libertés savamment " managées ".
Face à cela, trop souvent, l'école publique s'appuie sur
des formes de taylorisation dont Paulo Freire a été de ceux
qui en ont dénoncé les ravages, dans sa mise en cause de
" la conception bancaire de l'éducation ". Taylorisation
des contenus d'enseignement en disciplines cloisonnées, taylorisation
des pratiques d'enseignement qui, sous couvert d'une transmission collective
ne s'adresse en fait qu'à des individus isolés et taylorisation
d'une évaluation aux fins de classement et de hiérarchisation.
Taylorisation qui se traduit par un béhaviorisme des procédures
d'apprentissage devenues dominantes. Une question lourde est posée
: peut-on désormais se contenter d'une éducation inspirée
d'un modèle de société industrielle où les
modes de transmission demeurent connectés à l'expansion
marchande, et à la consommation qui va avec ? Peut-on accepter
de reproduire des formes éducatives qui pérennisent, en
fait, la domination d'une société libérale?
Que ce soit dans les entreprises ou à l'école, au travers
de formes actuelles aussi bien d'exploitation des intelligences que trop
souvent de leur mise à l'écart, dans l'un et l'autre cas
et sous des enjeux forts différents, y est cependant absent l'exercice
d'une fonction critique et y sont évités notamment l'examen
des problèmes économiques et sociaux, clés des problèmes
les plus cruciaux de notre monde d'aujourd'hui. Là, Pierre Bourdieu
nous avait depuis longtemps mis en garde, qui dénonçait
comme " violence symbolique " cet arbitraire de significations
culturelles transmises dans l'implicite des pratiques liées au
" travail pédagogique ". Bourdieu avait levé le
voile des relations cachées entre la pseudo-neutralité de
contenus prescrits et la réalité de leurs effets aliénants,
au travers des pratiques en usage. Le tout avec les dangers d'une reproduction
masquée et en définitive acceptée de la société
en place.
Avoir l'audace de telles analyses s'avère aujourd'hui d'une grande
urgence, tout en évitant le risque de déterminismes fatalistes.
Car les changements, s'ils sont essentiels, ne peuvent générer
spontanément des transformations éducatives s'ils ne sont
portés par une conscientisation issue de forces émancipatrices.
Or de telles forces existent déjà, en prise directe avec
les difficultés, contradictions et aliénations du terrain.
Ainsi en est-il de l'Éducation Nouvelle, nourrissant ses recherches de
forces progressistes en mouvement, dans la poursuite d'une longue filiation
historique née au lendemain de la première guerre mondiale.
Une éducation aux finalités fortes d'égalité
et de fraternité, de liberté et de responsabilité,
connectée aux réalités sans concessions du quotidien,
et donc une éducation toujours en recherche, une éducation
toujours nouvelle. Mais une éducation ayant déjà
à son actif des pratiques et théorisations en rupture, concernant
une autre approche des savoirs scolaires et du vécu institutionnel
courant, liées à des démarches de construction de
savoir, à des ateliers de création, à des pratiques
de vie coopérative et de projets ouverts sur le monde d'aujourd'hui.
Autant de pratiques qui, souvent tenues à la marge par les institutions
officielles, sont toutefois depuis longtemps portées et travaillées
sur des terrains multiples.
Former et se former à la capacité de transformer, mettre
en réseau les interrogations et acquis de l'Éducation Nouvelle
entre pays, tel est l'enjeu du LIEN (Lien International d'Éducation Nouvelle)
dont le GFEN (Groupe Français d'Éducation Nouvelle) est partie
prenante.
Ce 2ème Forum Mondial de l'Éducation de Porto Alegre est assurément
un grand moment où la question de l'éducation peut trouver
des raisons légitimes d'être posée comme question
éthique et politique. Car c'est en terme d'émancipations
que les transformations à aborder peuvent préparer l'avenir.
A condition toutefois que de telles émancipations, bien plus qu'individuelles,
soient des conquêtes collectives et prennent corps socialement,
devenant dans les faits des émancipations solidaires.
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