La Morale introduction
Ne pas laisser la morale à ceux qui veulent nous la faire !
A grand renfort de déclarations
et d'annonces médiatiques, Luc CHATEL annonce le retour de « l'instruction
civique et morale » à l'école s'appuyant sur des maximes visant « essentiellement
à construire une conscience et un jugement par la réflexion collective et
individuelle sur des situations morales » (circulaire
n° 2011-131 du 25-8-2011).
Anticipation de notre part ou plus simplement réponse aux interrogations des professionnels de l'éducation soumis aux injonctions de leur hiérarchie, aux idées reçues véhiculées par les médias ? Le n° 140 de notre revue DIALOGUE (avril 2011) s'intitulait : « La morale (qu') en faire ? ».
Au-delà des discours moralisateurs de quelle morale parle-t-on ?
La morale est à la mode. Depuis quelques années, et le début de la crise, en 2009, on entend parler de « République exemplaire » ; de la nécessité de « moraliser le capitalisme ». Certains présentent cette crise économique que nous subissons, comme un « conte immoral » où l'on récompense ceux qui en sont à l'origine. Un récent rapport (janvier 2011) sur les conflits d'intérêt propose les règles d'une « déontologie politique ». Ce ne sont là que quelques illustrations.
Cette thématique a fait une entrée fracassante dans le débat public avec le discours du 30 avril 2007 prononcé à Bercy par N. SARKOZY, alors candidat à l'élection présidentielle, « Le mot « morale » ne me fait pas peur (...) Pour la première fois depuis des décennies, la morale a été au cœur d'une campagne présidentielle » ; relancée par le discours du même, après son élection, prononcé au Palais de Latran du 20 décembre 2007. Il faut relire ces discours ; ils sont la matrice pour une pensée que les tenants de l'état des choses existant, veulent voir imposer. Tout y est : la morale, l'école, le politique, la justice, l'identité nationale, l'économie, la famille, la religion...
« Que tout change pour que rien ne change », telle est l'escroquerie à laquelle nous sommes confrontés.
Patrick RAYMOND, Extrait de l'éditorial du numéro 140 de la revue Dialogue « La morale qu'en faire ?.
La morale n'est pas un enseignement mais une réflexion permanente et contradictoire sur les problèmes réels que pose la vie, [il s'agit] moins d'instruction civique que de l'apprentissage vécu de la vie collective en classe. (...) L'instruction civique n'instruit rien d'autre que l'ordre trop bien accepté d'une pseudo harmonie docilisante. (...) Il s'agit de tout autre chose, l'apprentissage irréversible d'un moi-je qui ne peut exister pleinement et s'affirmer qu'en tenant compte des autres (...) qui, pour se faire entendre des autres doit savoir les entendre. Henri BASSIS. Dialogue n° 58 « Instruction civique : quelles valeurs ? » octobre 1986. | La morale ne s'enseigne pas; elle se pratique. La morale est comme la grammaire. On peut en connaître parfaitement les règles mais être incapable de les appliquer dans la vie courante. Mieux : la connaissance de ces règles est, dans la phase d'apprentissage du moins, dangereuse car elle laisse croire aux élèves, (...) qu'ils ont progressé normalement parce qu'ils ont étudié ces règles. (...)Ils masqueront éventuellement leurs fautes derrière un verbiage moral qui est la plus hypocrite des solutions. Célestin FREINET. « L'éducation morale et civique », Bibliothèque de l'école moderne, 1960. |