Retour page d'accueillogo gfen

Mouvement de recherche et de formation en éducation

Tous capables ! Tous chercheurs ! Tous créateurs !

  • Présentation
    • Qui sommes nous ?
    • Contacts
    • Adhérer
    • Nous avons besoin de votre soutien
     
  • Actions
    • Actions nationales
    • Activités des groupes et secteurs
    • Avec nos partenaires
    • En avril avec le GFEN
     
  • Ressources
    • Livres et périodiques
    • Dossiers
    • Pratiques
    • Regards
    • Mémoires et témoignages
    • Vidéothèque / Audiothèque du GFEN
     
  • Revue Dialogue
    • Le kiosque
    • Les numéros de Dialogue
    • Articles en ligne
    • Abonnement/Commande
     
  • Offres de formation
       
    Ressources / Dossiers / Savoirs et apprentissages / Maternelle

    Entrer dans les apprentissages

    Entrer dans les apprentissages dès l'école maternelle

    Christine Passerieux

    Responsable du GFEN

     

    Résumé : Tous les enfants n'abordent pas l'école maternelle dans les mêmes conditions. Ce qui les différencie c'est la perception qu'ils ont de ses finalités, la compréhension qu'ils ont de ce qui s'y joue. Pour les enfants de milieux « populaires », devenir élève, s'inscrire dans les activités scolaires, nécessitent un changement de posture, l'inscription dans un nouveau rapport au savoir, à l'apprentissage. Il leur faut en particulier entrer dans des pratiques du langage différentes de celles qui leur sont familières.

    C'est par les choix qu'elle fait de pratiques pédagogiques, de contenus d'enseignement, de lisibilité des modes d'apprentissage, que l'école maternelle peut permettre à tous les enfants d'entrer dans les apprentissages.

    La quasi-totalité des enfants de plus de trois est actuellement scolarisée à l'école maternelle et l'on sait désormais l'importance que revêt cette scolarisation dans l'histoire scolaire de chacun. Pourtant, tous les élèves ne bénéficient pas de cette école de la même manière et là comme ailleurs, les enfants issus des milieux populaires rencontrent plus de difficultés que les autres. L'école maternelle peut permettre de sortir d'une spirale de l'échec dont on sait qu'elle n'est pas fatale.

     

    Ce que disent les élèves : le rapport à l'école et au savoir

    Tous les enfants n'arrivent pas à l'école dans les mêmes conditions, avec les mêmes informations, les mêmes connaissances, le même langage, les mêmes référents culturels, le même rapport au monde. Une enquête menée auprès d'un panel d'élèves de grande section du quartier de la Goutte d'Or à Paris, quartier à très fort taux d'immigration populaire, donne des éléments de compréhension de ces différences entre élèves. Quatre questions leur ont été posées : est-ce important d'aller à l'école, pourquoi ? quels conseils donnerais-tu à un camarade pour bien apprendre, qu'est-ce que lire ? que faut-il faire pour lire ? Les réponses se répartissent en deux grandes catégories qui recoupent celles définies par Jacques Bernardin[1] et font écho aux travaux de Bernard Charlot, Elisabeth Bautier, et Jean-Yves Rochex[2] concernant des élèves de collège et de lycée.

     

    A travers ces deux grandes catégories se profilent deux idéal types d'élèves :

    • Les « actifs chercheurs ».

    - Ils disent qu'apprendre à l unicode2utf8(0x2018)école permet de devenir grand, autonome, de faire sans l'adulte (je suis pas toujours obligé de demander à ma maman).

    - Ils mesurent la nécessité d'un engagement personnel (il faut essayer).

    - Ils ont conscience que l'activité intellectuelle est essentielle (il faut réfléchir dans sa tête).

    - Ils s'inscrivent dans une durée (après j'irai au CP).

    - Ils apprennent à mesurer l'efficacité de leurs stratégies, s'appuient sur ce qu'ils savent déjà, sur leurs réussites.

    - Ils ont une bonne image d'eux-mêmes.

     

    • Les « passifs récepteurs ».

    - Ils ne disent « je » que pour dire « je ne sais pas », ne s'engagent pas personnellement.

    - Ils ne perçoivent pas le but de l'activité ou les finalités de l'apprentissage (concernant le graphisme on fait des ponts et des lignes pour faire des ponts et des lignes).

    - Pour eux la réussite est conditionnée strictement par le comportement (il faut être sage, écouter, rester assis, se taire, ne pas faire de bêtises...), un comportement supposé attendu par le maître.

    - Ils ne distinguent pas les différents temps de la journée scolaire qu'ils déroulent comme dans un catalogue, tout étant sur le même plan (jouer, travailler, faire sonner la cloche de la récréation) 

    - Ils vont à l'école pour changer de classe, et ne s'inscrivent pas dans l'ici et le maintenant.

    - Ils sont dans une grande attente de la maîtresse sans pouvoir définir cette attente (ce sont ceux qui plus tard pensent que leur échec est imputable à l'enseignant).

    - Ils sont dans le faire, le faire pour le faire, l'exécution de tâches successives sans que celles-ci ne soient porteuses de sens (pour eux lire c'est parler avec sa bouche et regarder avec ses yeux).

    - Ils assimilent la tâche et l'activité (lorsqu'il leur est demandé d'identifier des formes géométriques par le coloriage, ils n'identifient pas l'activité mathématique et ne retiennent que la tâche de coloriage).

    - Moins il y a de clarté cognitive pour eux, c'est-à-dire moins ils savent ce qu'ils font, pourquoi ils le font et comment ils vont le faire et plus ils sont en situation de dépendance affective et cognitive à l'égard de l'enseignant (ils font répéter la consigne, en demandent une traduction - Que faut-il faire ? - , puis attendent avant de commencer que l'enseignant intervienne auprès de chacun, s'inscrivant ainsi comme dans leur famille dans une relation duelle).

    - Ils identifient les apprentissages au support (la fiche) et au contexte (la fiche c'est quand j'étais à la table bleue)

     

    Les observations de classe confirment la teneur de ces entretiens et permettent de repérer que ces élèves sont très vite découragés, disent facilement et rapidement je ne sais pas faire, se laissent distraire. Pour eux, l'apprentissage n'est pas un processus et relève d'une opération magique : ils ne savent identifier comment s'opère le passage entre je ne sais pas et je sais, ce qui rend difficile toute forme d'engagement.

    Réussir devient alors une mission impossible : ils ne peuvent estimer eux-mêmes la qualité de leur travail et attendent, sur le mode du c'est bien, c'est pas bien, le diagnostique du maître.

     

    Les facteurs de discrimination

    • Le rapport au langage 

    Le langage est le lieu même, comme le souligne Elisabeth Bautier[3], de la stigmatisation des différences sociales car il constitue une pratique sociale fondamentale. A l'école, le langage organise, définit, catégorise, explicite, décrit, justifie, analyse, qu'il soit oral ou écrit. Son usage est sensiblement le même dans les couches moyennes et supérieures de la population. Dans les milieux « populaires » le langage a de manière dominante une fonction utilitaire, dans l'immédiateté du faire, du vécu. Il est d'une certaine manière incorporé à soi dans sa relation immédiate aux autres, et pour les élèves issus de ces milieux s'opère une rupture radicale.

    J'en donnerai pour exemple des échanges organisés entre élèves de grande section, au retour d'une visite de musée, échanges au cours desquels se sont affrontés deux rapports au langage très différents.

    - Des élèves ont raconté leur découverte des escaliers mécaniques, du métro pour ceux qui venaient à Paris pour la première fois, de la dame qui s'est endormie dans le train du retour et a ronflé...Ils ont, comme le dit Elisabeth Bautier, parlé de leur vécu, de leur émotion, dans des interventions brèves, de constats qui n'appelaient pas d'échanges avec leurs camarades, chacun racontant sa petite histoire, sans se décentrer et en n'écoutant pas nécessairement les autres.

    - D'autres se sont exprimé essentiellement sur les œuvres, ayant compris l'attente de l'institution, la demande scolaire qui consiste à constituer un événement en objet sur lequel réfléchir, à mettre en partage avec les autres (même si tout le monde a participé au même événement) par le langage. Ils ont compris que parler à l'école, ce n'est pas seulement prendre la parole même s'il faut aussi apprendre à le faire, c'est surtout objectiver le monde, en construire un système de représentation, produire de la pensée avec les autres.

     

    La pratique familiale du langage est faite de nombreux implicites. Les interlocuteurs sont souvent les mêmes et s'établit avec eux une complicité. A l'école les interlocuteurs sont nombreux, différents, certains ont le même statut, d'autres non et parmi ceux-là existent encore des différences (enseignant, directeur, aide-maternelle, intervenants...). C'est ainsi que peuvent naître des malentendus entre enseignants et élèves : appeler l'enseignant dans la classe pour résoudre un problème n'est pas du tout la même chose qu'appeler sa mère à la maison. Cela ne se fait pas de la même manière (car à l'école, appeler c'est lever le doigt, puis attendre que l'enseignant soit disponible), ni sur le même ton (une formule d'introduction s'impose, le ton ne saurait être injonctif...).

     

    A l'école le langage mais aussi la langue deviennent un objet d'étude, totalement décontextualisés. Cela exige une nouvelle posture pour l'élève qui va devoir appréhender des mots, des phrases, des textes en laissant de côté leur dimension sémantique : papa, poisson et Paula appartiennent à une même catégorie, celle des mots commençant par p ou celle des mots de deux syllabes, sans qu'il y ait bien entendu de relation de sens entre eux. Des mots seront travaillés uniquement pour leurs sonorités, là encore sans référence au sens dont ils sont porteurs. Un tel rapport à la langue n'existe pas spontanément, il se construit, ou il est à construire.

     

    Le rapport à l'apprendre

    Alors que dans le milieu familial, on répond aux besoins exprimés, aux questions spontanées, et qu'on apprend en faisant, à l'école on diffère, on pose des questions que les élèves ne se posent pas seuls, on dissocie pratiques et savoirs dans une décontextualisation progressive. Les enfants pour devenir élèves doivent entrer dans un nouveau mode d'apprendre qui se construit à l'école. Des observations de classe montrent qu'un certain nombre d'éléments font empêchement :

     

    A - Situations d'apprentissage.

    - Des situations trop simples empêchent la mobilisation parce qu'elles ne provoquent pas l'activité intellectuelle. Les élèves exécutent alors des tâches dont ils ne perçoivent ni les enjeux, ni les objectifs et s'installent dans une position de passivité, voire de refus.

    - La confusion est fréquente entre la manipulation et l'activité intellectuelle : des élèves de grande section devant classer puis coller des étiquettes lors d'une activité de lecture expliquent qu'ils font du collage.

    - Une trop forte contextualisation des activités en rendent opaques les finalités : ainsi, si l'explicitation des objectifs d'apprentissages n'est pas rendue lisible par l'enseignant, et ce de manière récurrente, le travail sur thème peut focaliser l'attention des élèves sur ce qui n'est qu'un prétexte pour l'enseignant.

    - L'habillage du scolaire sous des formes dites ludiques et sans explicitation sur les enjeux d'apprentissage, ne permet pas de différencier les activités scolaires et les activités non scolaires. Ce masquage a d'autres effets pervers, en particulier de laisser entendre qu'apprendre est ennuyeux, et qu'il faut donc « faire diversion » ; également de créer un sentiment de défiance, une impression de manipulation car les élèves ne sont pas dupes. Enfin, il a pour effet d'enfermer les élèves dans des contextes à forte connotation affective qui les éloignent de l'objet d'apprentissage.

     

    B - Lisibilité des situations proposées.

    - Le découpage en séquences brèves, sans liens, produit de la dispersion, une absence de cohérence, une vision éclatée du monde scolaire. Lors d'entretiens des élèves énoncent les activités de la journée comme ils le feraient de produits sur un catalogue. La brièveté ne laisse pas le temps de la réflexion, du questionnement, de l'essai et laisse à penser que l'essentiel est d'arriver au but, alors que ce qui est premier c'est bien le processus pour y parvenir.

    - L'absence de marquage net dans le passage d'une activité à une autre, dans le signalement du début et de la fin de chacune d'entre elles, empêche les élèves de différencier les moments de la journée scolaire, mais aussi les objets d'apprentissage.

    - Enfin la non connaissance du cadre, des rôles, places et fonctions de chacun dans l'école provoque des brouillages quant à la perception qu'ils ont de l'institution. Ainsi, une certaine dilution de la forme scolaire est particulièrement préjudiciable aux élèves issus de milieux « populaires ». La réduction des temps collectifs, l'individualisation des tâches, la systématisation de l'organisation en ateliers qui contraint l'enseignant lui-même à se centrer sur la réalisation des tâches sans n'avoir plus le temps de mettre en place des situations de construction de savoirs fragilise les élèves les plus en difficulté, ne leur laisse pas le temps de le recherche, de la réflexion ni de la confrontation aux autres, sans lesquels il ne peut y avoir de réels apprentissages.

     

    C - Rapport à l'adulte.

    - Les élèves sont désemparés et alors soumis à l'arbitraire de l'adulte lorsqu'ils ne connaissent pas les critères de fin d'activité mais aussi les critères de réussite ou d'échec dans  cette activité. Pourquoi une activité est-elle finie : parce qu'il est l'heure, parce que la maîtresse le dit, parce que toutes les tâches semblent accomplies (il ne reste aucune étiquette à coller ?)

    - La systématisation d'une logique de questions/réponses fait obstacle à la confrontation entre élèves et les enferme chacun dans une relation exclusive à l'adulte, dans la solitude de leurs actes ou de leurs réflexions, et fait empêchement à la construction d'une spécificité de l'école comme « collectif de travail »[4].

     

    Le rapport à l'école, aux savoirs, à l'apprendre n'est pas figé, il s'élabore dans l'acte même d'apprentissage. Ce sont les situations d'apprentissage, situations socialement construites, qui vont permettre ou non qu'il se transforme. Car ce rapport se construit dans l'interaction entre un sujet et son milieu. On observe ainsi que l'étayage de l'enseignant est efficace lorsqu'il renvoie à l'activité, au sens d'activité cognitive, plutôt qu'à la tâche ; que le recours au langage plutôt qu'à la monstration favorise une habitude de verbalisation chez les élèves mais aussi un engagement dans le travail.

     

    Du désir de savoir à l'envie d'apprendre

    Le passage de l'un à l'autre n'est pas automatique. Tous les élèves ont le désir de savoir car ce savoir est constitutif de l'humain. Ce qui pose problème, c'est l'envie d'apprendre, l'entrée volontaire dans un processus long, difficile, exigeant. Il est très souvent fait référence en maternelle à la nécessité de motiver les élèves, en inventant des dispositifs attirants, ludiques, pour mieux « faire passer » les savoirs. Il semble que cette voie est doublement sans issue : ceux qui avaient envie d'apprendre apprennent, les autres restent sur le bord du chemin.

    - parce que la motivation reste extérieure aux sujets, elle peut renforcer cette posture d'extériorité relevée chez les passifs récepteurs. La difficulté est d'alimenter, voire de provoquer la mobilisation dans le travail scolaire. La mobilisation relève d'un processus interne qui entraîne chacun dans un engagement personnel parce qu'il s'est construit son propre projet. La mobilisation est possible lorsque les élèves ont conscience d'un but à atteindre, cernent l'objet de travail, mesurent par quelles opérations, quelles procédures ils vont y parvenir, entrent dans la demande de l'école et il faut qu'elle soit nommée comme telle, qui est l'activité intellectuelle.

    - parce que, comme on l'a vu plus haut, les motivations construites de toute pièce éloignent plus des objectifs centraux qu'elles ne permettent de les cerner.

     

    Au centre : l'activité intellectuelle, ou l'apprendre au-delà du faire

    Dans toutes les classes, y compris des secteurs réputés les plus difficiles, c'est la curiosité intellectuelle qui est moteur de l'activité. Quelque soit son âge, ce qui met un individu en mouvement, c'est le problème à résoudre, la réalité qui subitement fait butée et contraint à trouver une solution Cette solution passe toujours, que l'on en ait ou non conscience, par la réflexion. Il n'y a pas d'activité sans pensée, l'activité ne se réduit pas au faire, elle est mouvement de la pensée, investissement intellectuel de la tâche. Y compris dans ce que l'on appelle les savoirs faire qui, avant d'être automatisés, ont impliqué une réflexion sur l'efficience de certains gestes, la pertinence de procédures. Ce n'est donc pas la multiplication des actions qui permet d'apprendre mais leur compréhension, leur mise en lien. Le temps de l'apprentissage c'est celui où l'on peut décrocher du faire, de l'action pour la mettre en mots. L'expérience ne devient apprentissage que lorsqu'elle est formalisée, peut se construire sous la forme d'un système, un modèle de représentation opératoire au delà du contexte qui l'a fait émerger (exemple : de la manipulation d'objets au tri puis à la catégorisation). Comment les élèves peuvent-ils y parvenir ?

     

    • En affrontant  la complexité : on a longtemps pensé et cela se dit et se fait encore, que pour aider un élève en difficulté il faut lui proposer des situations simples et que l'apprentissage va du simple au complexe. Peut-être parce qu'il y a confusion entre complexité et difficulté. En effet le complexe, c'est la situation de départ bouillonnante où il va falloir progressivement mettre de l'ordre, dégager des contenus spécifiques pour arriver au plus simple, c'est-à-dire au plus difficile (en lecture on part du texte pour arriver au signe). Ce que l'on appelle situations simples à l'école,  c'est souvent des situations pauvres qui ne posent pas de défi cognitif et provoquent la démobilisation parce qu'elles ne comportent pas de réel enjeu.

     

    • En étant en questionnement : apprendre c'est répondre à des interrogations provoquées ou alimentées par l'enseignant dans un espace ouvert aux cheminements divers, aux hésitations, aux erreurs, aux expérimentations. A la condition donc que les questions soient mises en scène, problématisées et que ne soient pas livrées les réponses ; que les conceptions antérieures des élèves soient déstabilisées par des situations impasses qui les obligent à trouver d'autres moyens pour répondre.

     

    • En s'inscrivant dans un processus d'apprentissage, où ils peuvent convoquer d'une activité à l'autre, leurs savoirs antérieurs ; mettre en relation différentes activités ; mesurer au fil du temps que leurs connaissances sont provisoires et qu'apprendre n'est pas une opération magique où l'on passerait de je ne sais pas à je sais ; où ils ont le temps de la maturation, de la réflexion, de l'erreur, de la régression. Où enfin ils peuvent mesurer leurs progrès.

     

    • En se construisant une image positive d'eux-mêmes. Cela passe par ce que Bernard Charlot[5] appelle la lecture au positif, qui consiste à lire autrement ce qui apparaît comme du manque, à se départir d'un jugement, qu'il soit moral ou idéologique, à comprendre ce qui est à l'œuvre : car ce que les élèves disent n'est pas absurde et signale une représentation de l'école, du maître, de l'apprentissage, de leur rôle et de celui de l'adulte dans la classe, cette représentation pouvant être construite à la maison autant qu' à l'école.

     

    • Quand ils commencent à opérer des retours réflexifs sur leurs activités, leurs stratégies, quand ils peuvent verbaliser les procédures à l'œuvre, leurs pertinences respectives. Cette étape réflexive est décisive car sans elle il ne peut y avoir d'apprentissage. Dans un premier temps c'est l'enseignant qui va parler, nommer, donner à comprendre, expliciter ce qu'il propose, ce que les élèves réalisent. Puis, dans la confrontation avec ses pairs,  chacun pourra mener ce travail de mise à distance de l'expérience ; de mise en relations des différentes activités ; d'argumentation ; de formalisation de ses actes et de ses pensées, première étape vers la conceptualisation.

     

    L'entrée à l'école maternelle est pour beaucoup la première confrontation à l'altérité. Ce qui est en jeu c'est bien la formation d'un individu social, qui construit avec les autres son propre rapport au monde, un rapport ouvert, vivant. C'est de la responsabilité de l'école elle-même que de créer les conditions pour que tous les enfants entrent dans les apprentissages en accédant à la spécificité des apprentissage scolaires, à la cohérence des principes qu'ils sont censés mettre en œuvre[6] pour que l'accès aux savoirs ouvre un espace de liberté, qu'elle permette à chacun un  vrai projet d'émancipation.


     

    [1] Jacques Bernardin, Comment les enfants entrent dans la culture écrite, Retz, Paris, 1997.

    [2] Bernard Charlot, Elizabeth Bautier, Jean-Yves Rochex, Ecole et savoir dans les banlieues et ailleurs, Colin, Paris, 1992.

    [3] Elisabeth Bautier,  Pratiques langagières, pratiques sociales, L'Harmattan, Paris, 1995.

    [4] René Amigues, Marie-Thérèse Zerbato-Poudou, Comment l'enfant devient élève, Retz, Paris, 2000.

    [5] Bernard Charlot, Du rapport au savoir, Eléments pour une théorie, Anthropos, Paris, 1997.

    [6] Elisabeth Bautier, préface des Chemins des savoirs en maternelle de M. Libratti et Ch. Passerieux, Chronique Sociale, Lyon, 2000.

    Dans la même rubrique

    Lire aussi...

    Prévenir, dépister ou enseigner

    Yann Gibert | le 01/01/1970 00:00

    Du rapport de l'Inserm au rapport Benisti et au carnet de comportement de Sarkozy, le projet du ministère est la dernière tentative...En savoir plus

    Les effets de lindividualisation des apprentissages

    | le 30/11/-0001 00:00

    L'individualisation des apprentissages à l'école maternelle renforce les écarts entre élèves car elle produit une...En savoir plus

    Nos enfants ne nous font pas peur

    Yann Gibert | le 01/12/2011 00:00

    mais le sort qu'on leur réserve nous inquiète Spécificités et enjeux de l'Ecole Maternelle Colloque 9 mai 2011,...En savoir plus

    Audition du 20 octobre 2011 au Sénat

    Yann Gibert | le 01/12/2011 00:00

    de S Chevillard (GFEN et ESCOL) à l'invitation de Mme Gonthier-Maurin : proposition de loi n° 447 sur l'obligation scolaire à 3...En savoir plus

    Socialisation un prealable?

    | le 30/11/-0001 00:00

    Il n'y a pas de préalable à l'entrée à l'école. La socialisation scolaire se fait dans et par les apprentissagesEn savoir plus

     
    • Présentation
      • Qui sommes nous ?
        • GFEN et collectifs
        • Instances
        • Texte d'orientation
        • Historique
          • Gaston Mialaret nous a quittés
          • Origines et jalons historiques
          • Rapport à l'apprentissage dans...
          • Qu'est-ce qu'un mouvement péda...
          • Tous capables ! Du pari éthiq...
      • Contacts
        • Formulaire de renseignements
      • Adhérer
        • Osez le changement !
      • Nous avons besoin de votre sou...
    • Actions
      • Actions nationales
        • 11èmes Rencontres nationales "...
        • 14èmes Rencontres "Pour que la...
        • Le congrès 2022 du GFEN
        • 14èmes Rencontres nationales "...
        • Centenaire de l'Education Nouv...
      • Activités des groupes et secte...
        • Agenda des groupes et secteurs
      • Avec nos partenaires
        • Sauvons l'école publique ! Col...
        • Université d'automne SNUipp : ...
        • Convergences - Écriture dunicode2utf8(0x201)...
        • Hommage à Paul Faucher, pionni...
        • Les véritables enjeux de l'Édu...
        • Retour du stage Sud Education ...
        • Le GFEN à la CGT, une rencontr...
        • Le GFEN dans lunicode2utf8(0x2019)écrin des ...
        • La Biennale internationale de ...
      • En avril avec le GFEN
    • Ressources
      • Livres et périodiques
        • Bibliographie par auteur
        • Commande
      • Dossiers
        • Textes, appels, lettres ouvert...
          • ? Lunicode2utf8(0x2019)école maternelle que ...
          • Baisse de la subvention du MEN...
          • Continuer à éduquer à la démoc...
        • Savoirs et apprentissages
          • Pédagogie explicite contre péd...
          • Aide
            • L'aide personnalisée
            • A propos d aide
            • L'aide penser rattrapage ou r...
            • L'aide : comment en sortir ?
            • Aider pas si facile
          • Avec ou sans note ... l'évalua...
          • Maternelle
            • Prévenir, dépister ou enseigne...
            • Les effets de lindividualisati...
            • Nos enfants ne nous font pas p...
            • Audition du 20 octobre 2011 au...
            • Socialisation un prealable?
            • Entrer dans les apprentissages
          • Dossier Ecole maternelle
          • Pédagogie générale
            • L activité, espace de transfor...
            • A propos de la motivation scol...
            • De quels savoirs parle-t-on
            • Approche socio-historique des ...
            • Tous capables
          • Rapport au savoir, analyses et...
            • Transformer le rapport aux sav...
            • Construction des inégalités sc...
            • Les facteurs d'inégalités dans...
            • Le "rapport au savoir", nouvea...
            • Les malentendus face à l'appre...
          • Enseigner plus explicitement
          • Entretien avec Jacques Bernard...
          • Apprendre à lire : le point de...
        • Savoirs et création
          • Ateliers d'écriture en milieu ...
        • Formation et métier
          • Repenser le métier
            • La professionnalisation des en...
            • Le métier enseignant
          • Les enjeux du métier à l'école...
          • Jean-Yves Rochex : avec Henri ...
          • "N'ayons plus peur des mauvais...
          • Repenser l'école
          • Mémento "Agir sur le climat de...
        • Education et société
          • Analyses
            • Qu'est ce que la rationnalité ...
            • L'Education Nouvelle est-elle ...
            • Transformer l'école
            • Démocratisation, où en est-on?
            • Pensée pédagogique de J. Korcz...
            • Naturalisation des différences
          • Personnalisation, individualis...
          • Du tri à l'exclusion
            • La psychiatrie entre hygiénism...
          • La Morale
            • La Morale introduction
          • Education de demain
            • De l'ambition pour l'école
            • La place du symbolique dans la...
            • Pour un avenir du second degré
            • Quelles pratiques pour réduire...
            • Demain l'éducation
          • Rythmes scolaires
            • Des rythmes au contrat la my...
            • Rythmes scolaires serpent de ...
            • La semaine de quatre jours
          • Socle et culture
            • Quels enjeux de la mise en pla...
            • Du socle commun à la culture c...
            • Démocratiser l'accès à la cult...
          • REP+ - Dispositifs extérieurs ...
          • Education prioritaire
          • Du projet de programme à sa ve...
          • Les "révolutions" pédagogiques...
      • Pratiques
        • Transversal - des pratiques...
        • interdisciplinaire - des prati...
        • Philosophie - des pratiques..
        • Français - des pratiques...(2)
        • Formation - des pratiques..
        • EPS - des pratiques..
        • Langues vivantes - des pratiqu...
        • Technologie(s) - des pratiques...
        • Sciences - des pratiques...
        • Arts visuels - des pratiques..
        • histoire - géographie - éducat...
        • Mathématiques - des pratiques....
        • Français - des pratiques...
        • Ecole maternelle - des pratiqu...
      • Regards
        • Les adhérents du GFEN publient...
        • Comprendre l'échec scolaire, S...
        • Pour une école des arts et de ...
        • Franchir les lignes. Gitans/Pa...
        • Comprendre les pratiques et pé...
        • Les ? incasables ? ne sont pas...
        • Les gestes professionnels dans...
        • Gaston Bachelard, l'inattendu ...
        • Neuropédagogie, Le cerveau au ...
        • Territoires vivants de la Répu...
        • La riposte : pour en finir ave...
        • La différenciation sociale des...
        • La Plaine : Récits de travaill...
        • Vidéo - Entretien Lucien Sève
        • Lunicode2utf8(0x2019)éducation aux temps du ...
        • L'insertion des jeunes : quest...
      • Mémoires et témoignages
      • Vidéothèque / Audiothèque du G...
    • Revue Dialogue
      • Le kiosque
      • Les numéros de Dialogue
        • Dialogue n? 183 - 100 ans d'Ed...
        • Dialogue n? 180 - Pourquoi fai...
        • Dialogue n? 181 - Perspectives...
        • Dialogue n? 182 - 100 ans d'Ed...
        • Dialogue n? 184 - 100 ans d'Ed...
        • Dialogue n? 185 - Enrayer les ...
      • Articles en ligne
      • Abonnement/Commande
    • Offres de formation
     
    Siège national : Groupe Français d'Education Nouvelle
    14 avenue Spinoza 94200 Ivry Sur Seine
    01 46 72 53 17 - gfen@gfen.asso.fr