Texte d’orientation

POURQUOI L’EDUCATION NOUVELLE ?

 Texte d’orientation du GFEN,
Congrès d’Ivry, 2 juin 2019

“L’Éducation Nouvelle prépare chez l’enfant,
non seulement le futur citoyen capable de remplir ses devoirs
envers ses proches et l’humanité dans son ensemble,
mais aussi l’être humain conscient de sa dignité d’homme”

Principe de la Ligue Internationale d’Éducation Nouvelle, 1921

“Contribuer conjointement à former
l’Homme et le Citoyen, à éclairer l’action par la pensée,
à vivifier la pensée par l’action”

Henri Wallon

L’éducation nouvelle s’affirme au lendemain de la première guerre mondiale, en réaction à l’éducation traditionnelle, rigide, visant l’obéissance plus que l’esprit critique, pour fonder une culture de paix. Elle n’aura de cesse, tout au long de son histoire, de développer la démocratisation de l’accès à la culture et viser à l’émancipation intellectuelle, condition de toutes les autres.

Un monde en crise travaillé par des aspirations et des exigences

Le capitalisme exacerbé, l’économie libérale engendrent des servitudes qui envahissent les champs de l’éducation, de la culture et de la santé. Ils exigent une adaptabilité permanente des individus. Ceux-ci, en intériorisant les injonctions de performance et de concurrence, en sont à la fois les acteurs et les victimes.

De nouvelles formes d’inégalités, une société et une école à plusieurs vitesses effritent les liens sociaux, fracturent les rapports humains et exacerbent les repliements identitaires.

L’assignation de chacun.e à une place pré-convenue, par le jeu d’une « égalité des chances » falsifiée, prépare à l’acceptation du déclassement dans une société hiérarchisée. Surveiller, contrôler, sélectionner : une manière de soumettre et de conformer à un ordre du monde inchangé et présenté comme inchangeable.

L’Education nouvelle, les pratiques et les valeurs qu’elle porte, sont plus que jamais indispensables pour que l’intelligence et le pouvoir de création de chacun.e concourent à l’émancipation collective.

Tous capables : du pari philosophique au défi de sa mise en actes

Par son pari philosophique du « Tous capables », le GFEN postule que chaque enfant, chaque adulte, chaque peuple a des capacités immenses pour comprendre et créer, et donc devenir responsable de son histoire. Ce défi l’amène à repenser les conceptions dominantes du savoir et de la création et de leur transmission.

Le GFEN récuse les formes d’éducation qui contribuent à renforcer l’idéologie des dons et du handicap socio-culturel. Il s’agit de créer les conditions de la réussite de toutes et de tous en refusant le principe de méritocratie.

Contre la compétition et l’individualisme, le GFEN promeut des apprentissages solidaires dans une conception de la démocratie reconnaissant et sollicitant chaque sujet dans sa dimension singulière et sociale. Dans la diversité des approches culturelles, les pratiques du GFEN participent de la construction dynamique d’une culture commune, associant pluralité et unité, et restituant par là-même leur sens aux valeurs de fraternité et de démocratie. « Tous capables. Tous chercheurs. Tous créateurs. »

Transformer le rapport à la culture

Les pratiques pour y parvenir – qu’elles se déclinent en démarches d’auto-socio-construction des savoirs, ateliers d’écriture, de création ou projets – ne sont ni neutres, ni innocentes. Sollicitant créativité et coopération, imagination et rationalité critique, elles concourent à l’émancipation intellectuelle, révélant pour chacun.e et pour toutes et tous des capacités de penser et des pouvoirs d’agir insoupçonnés.

C’est à travers des situations-défis, des productions et des élaborations intellectuelles ambitieuses que cela se conquiert. Dans ce processus d’appropriation des outils culturels, « l’intelligence individuelle,à la conquête de ses moyens », fait écho à « l’intelligence collective, à la conquête de ses concepts » (H. Wallon). S’y joue la conscience d’appartenir à une commune humanité : émancipation similaire pour une humanisation solidaire. Chacun mais ensemble, dépasser les obstacles, faire reculer les limites, s’affranchir des pesanteurs du passé et s’inscrire pleinement comme auteur.e.s d’un monde à (ré)inventer.

Pratiquer l’Education nouvelle : une dynamique de transformation 

L’éducation ne saurait se suffire de « bonnes pratiques ». Toute éducation est un lieu de transformation et donc de confrontation, un lieu d’élaboration des savoirs et de construction de la personne et du citoyen, gages d’émancipation.

La mise en réseau et la coopération des acteurs et actrices de l’Education nouvelle, en particulier à travers le LIEN (Lien International d’Education Nouvelle), engagent de nouvelles perspectives solidaires.

Face à la complexité, la maîtrise des savoirs est indispensable pour rendre le monde intelligible, appréhendable, afin de pouvoir y agir. Démocratiser l’accès au savoir, à la culture n’est pas seulement un objectif de justice sociale, c’est un impératif pour notre devenir commun.