Extraits Dialogue n° 184

Dialogue n° 184 – 100 ans d’Education Nouvelle. Cultiver l’à venir

Sommaire

Éditorial

  • L’Éducation Nouvelle, aujourd’hui si précieuse   Lire l’édito
    Michel BARAËR et le collectif de rédaction du numéro
Pour hâter la venue du printemps
  • La Commune de Paris (1871) a-t-elle un avenir pédagogique ?
    Pascal DIARD

2021, année des 150 ans de la Commune de Paris. 2021, année du centenaire de l’Éducation Nouvelle. Une concordance des temps qui prête à ré flexion sur l’art et la manière pédagogiques de présenter un événement historique majeur à la compréhension de toutes et tous. Et de s’interroger sur la légitimité de la posture de praticien chercheur pour définir le travail de militant de l’éducation nouvelle.
Les origines d’une démarche (sept 2005)
Saisissant l’occasion d’un stage de rentrée du GFEN Île de France, je pars d’une idée de professeur d’histoire pour construire un scénario pédagogique sur la Commune de Paris.

  • Ici et ailleurs, quelle éducation nouvelle à une géographie citoyenne ?
    Interview de Gatien ELIE par Pascal DIARD (et dans le supplément en ligne)

Qu’est ce que la géographie (qui interroge le rapport à l’espace, le rapport au mondial) peut apporter au GFEN aujourd’hui et réciproquement ?
Ce que le GFEN m’apporte en tant que professeur de géographie, ce sont d’abord des pratiques d’enseignement, des pratiques pédagogiques, en par ticulier la découverte du jeu de rôle qui a été la colonne vertébrale de ma démarche « développement durable, développement impossible ? » .
On dit souvent au GFEN qu’il faut « faire revivre l’histoire des savoirs », ici il s’agit de « faire vivre des situations géographiques » aux élèves pour leur faire prendre conscience des conflits de territoires, des représentations contradictoires et des intérêts divergents qui s’y agrègent, des enjeux politiques et sociaux. Autrement dit faire vivre une dialectique du rapport à l’espace géographique. La question de la construction de l’abstraction que pose le GFEN dans la construction du savoir a été pour moi, en tant qu’enseignant, une grande rupture.

  • Sur le fil… de la marge
    Le secteur philosophie du GFEN

Qu’est ce qui fait du secteur philosophie du GFEN un lieu si particulier, si précieux aussi, en tout cas pour celles et ceux qui s’y tiennent durablement, et qui y trouvent manifestement ce qu’ils cherchent ailleurs parfois en vain ? Le groupe que forment les membres du secteur philo, qui a bien sûr évolué, qui s’est renouvelé avec le temps, conserve malgré tout, depuis 30 ans une spécificité qui est à la fois évidente intuitivement, et assez difficile à caractériser précisément.
Nous tenterons ici de proposer quelques pistes pour dire ce que représente le secteur, et le rôle qu’il joue, pistes puisées dans son histoire, et dans nos expériences partagées. Ces hypothèses ont en commun l’idée d’un équilibre instable : entre l’institution et son «dehors», au cœur d’un croisement entre politique, pédagogie et philosophie, entre l’exigence maintenue d’une certaine normativité (au sens où nous n’opérons pas de rejet de la norme scolaire) et l’écueil d’une normalisation stérile (ou standardisation des compétences).

  • Quatre couleurs d’éducation nouvelle. Les nuances de gris, on laisse ça à d’autres
    Un adhérent du GFEN

Aujourd’hui Monsieur Sapoge va au CHIEN (Collectif Hybride et Intergalactique de l’Éducation Nouvelle). Quatre nouvelles planètes viennent d’adhérer à cette Ligue galactique et Sapoge est impatient de faire connaissance avec les pratiques et les valeurs pédagogiques que vont exposer les quatre intervenants.
ARGOS et l’école des argonautes : Ulysse, ouvre la séance avec la présentation de l’éducation sur Argos, sa planète. Dès l’introduction, on sent qu’on a affaire à une femme qui a les pieds sur terre, bien enracinés. Des pommettes qui exhibent une ardeur à vivre, deux fossettes qui révèlent une belle humeur. Et un front cabochard qui impose une force têtue prête à affronter avec joie l’adversité.

Un futur déjà là

  • L’Éducation Nouvelle : un pouvoir d’étonnement toujours intact
    Geneviève GUILPAIN, enseignante de philosophie, formatrice à l’INSPE de Créteil (site de Livry-Gargan)

Un temps suspendu – Depuis quelques années, deux ou trois groupes d’étudiant.e.s chanceux/ses ont droit à un moment suspendu dans la formation marathon qu’est devenu le master Métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation.
Soit seule, soit en compagnie de Pascal Diard,enseignant détaché au GFEN, ou encore en coanimation avec une collègue « freinétique », je leur propose une douzaine d’heures de pratiques et réflexions gfenistes. Une formation en immersion totale où l’on n’est pressé ni par le temps, ni par l’évaluation, parce qu’on annonce d’emblée que « chacun.e sera largement validé.e dès lors qu’il/elle s’impliquera activement dans le travail ». Il est arrivé aussi que nous leur proposions une recherche par petits groupes portant sur une question soulevée au cours de ces deux journées (« À quelles conditions une formation peut elle être formatrice ? Quel rôle l’éducation nouvelle attribue t elle au jeu ? Qu’apporte le travail de groupe ? … »).

  • « Re-créer en s’émancipant progressivement de ses conceptions anciennes »
    Questions à Jean BERNARDIN par Laurent CARCELES

Jean Bernardin a été enseignant. Il est aujourd’hui un formateur du GFEN qui partage des ressources et des approches, avec le souci permanent de tenir ensemble objectivation théorique et les réalités concrètes les plus pratiques. Il a réinvesti et conçu plusieurs démarches. Celles-ci nourrissent les parutions du GFEN 28 en particulier, et le mouvement dans son ensemble.
Jean Bernardin, vous dites souvent que le savoir est la seule chose qui rend plus riche quand on la partage, pouvez vous nous expliquer pourquoi ?
C’est Jean Yves Rochex qui avait l’habitude de dire qu’à l’inverse des marchandises le savoir s’accroît d’être partagé. Affirmation qui me semble s’accorder tant sur le plan de l’histoire de l’humanité que sur le plan de la construction du sujet et qui interroge le double sens du mot « savoir » : à la fois contenu qui a déjà été élaboré par les générations qui m’ont précédé et processus de construction de cet objet par un sujet.

  • Du silence en pédagogie…
    Michel NEUMAYER

Au-delà de la pensée des poètes, je voudrais revenir dans ce troisième numéro des « 100 ans d’Éducation Nouvelle » sur la notion de « question » en pédagogie et interroger sa place en Éducation Nouvelle, face aux défis d’un futur incertain.
Je veux briser le carcan du « questionner et donc répondre », ce binôme insécable auquel l’enfant et l’adulte, ces deux acteurs de la relation pédagogique si souvent répondent, peut être trop souvent sans les réinterroger. Les pédagogies dominantes sont encore souvent celles qui cherchent à colmater le vide relationnel, le suspens dans le langage que l’irruption d’une « question » peut susciter. Pourquoi ?
Quelle place laisser au doute chez l’apprenant ? Comment en tant que formateur suspendre en nous le désir de parole ? Comment entendre la puissance poétique des paradoxes ? Comment s’abstenir de tout ce qui fige la pensée ?

D’une bouture l’autre
  • Le GFEN en Île-de-France : passés, présents, avenirs
    Jeanne HAUGOUBART-BONNEFOY et Laurent CARCELES

Cet article est le fruit d’un travail collaboratif entre Jeanne HAUGOUBART%u2010BONNEFOY (ex DION), qui a animé le groupe Île de France pendant deux décennies, et Laurent CARCELES qui a connu et rejoint le GFEN grâce à Jeanne.
1976 : Un groupe d’enseignants découvre le GFEN
« Après 15 années d’enseignement en région parisienne (à Saint Denis 93 puis à Créteil et Bonneuil sur Marne 94), investie politiquement dans le Mouvement de la Paix, les questions de l’éducation à la paix et de la réussite de tous les enfants deviennent de plus en plus incontournables pour moi. En dépit des pratiques de coopération, de projets de création comme la conception, la réalisation de longs métrages et la production de petits romans issus de ces films, de séjours réguliers en classes de découverte, du refus d’user des punitions/récompenses…, ma pédagogie –très fortement inspirée par le mouvement Freinet rencontré pendant ma formation initiale– , pédagogie que je veux « active » ne vient pas à bout des échecs que rencontrent encore trop d’enfants dans le champ des savoirs. Dans notre école, nous sommes déjà un groupe d’enseignants opposés de puis plusieurs années à l’orientation ségrégative des élèves de CM2 en classes de 6e différenciées : voie I(enseignement général long, classique ou moderne) voie II (enseignement moderne court) voie III (6e de transition pratique).


  • Quels possibles… renouvellements ?
    Laurent CARCELES et Pascal DIARD

Partager, permettre des possibles d’éducation que les démarches GFEN ouvrent. C’est ce que nous tentons depuis dix ans. Pascal Diard, en tant que détaché national depuis 2013. Laurent Carceles depuis 2015, en tant que déchargé par le Rectorat de Créteil pour le GFEN, puis formateur Maîtrise De la Langue pour l’académie de Créteil avec, pour mission, de continuer à faire vivre des démarches auprès d’enseignantes et enseignants. Porteurs des héritages de l’Éducation Nouvelle, et plus précisément de celui construit et transmis au  sein du groupe Île de France notamment par Jeanne Dion, nous avons animé des centaines d’heures de formation sur tous les « terrains » :  formation au — plus ou moins — long cours dans les Réseaux d’Éducation Prioritaire (REP), stages de regroupement au Plan Académique de Formation (PAF), Aide Négociée de Territoire (ANT) en établissement, stages syndicaux, personnels de catégorie C en reconversion, éducateurs de la Protection Judiciaire de la Jeunesse (PJJ) et les jeunes qu’ils accueillent… […]
Laurent Carceles vous propose de plonger dans le concret d’une formation récente d’enseignants, puis Pascal Diard au cœur d’une formation d’ « éducs » de la PJJ.


  • Et si nous entrions tous dans la tapisserie de Bayeux ?
    Sandrine LEROU, professeur d’histoire, collège Travail de Bagnolet (93)

L’histoire commence par mon choix du stage LAN0101 au Plan Académique de Formation : former des lecteurs et scripteurs compétents. J’enseigne l’histoire depuis bien long temps. Le nombre de mes années d’expériences, cumulées aux deux délicates dernières (années noyées dans le télé enseignement covid confine ment demi jauge), exigeait un nouveau regard sur mes cours. Déjà adepte de méthodes particulières (jeux de rôles, etc.), je m’ennuyais presque dans mes séances de travaux en groupe. À bout, je ne pensais même plus à organiser des sorties. J’étais en quête d’une « recharge », en quelque sorte.
À moi donc les expériences heureuses du texte recréé, du texte à trous, du texte à dévoilement progressif ! À chaque fois que je vivais une des démarches proposées, je cherchais tout de suite comment l’appliquer aux documents et travaux que donne l’historien en classe. En effet, le professeur d’histoire se trouve toujours devant un paradoxe : il doit, tout à la fois, s’appuyer sur des documents d’époque et remettre ces mêmes documents en question. Or, bien trop souvent, les élèves ne les voient que comme des illustrations du propos, et les considèrent comme une preuve. Ils n’en voient pas les limites. Le professeur n’a, en effet, pas toujours le temps de proposer l’ensemble des versions d’un même événement.

Ombres et sous-bois

  • Pour une redéfinition de l’émancipation
    Sandrine BREITHAUPT, Groupe Roman d’Éducation Nouvelle

C’est un peu par hasard que je suis tombée sur un livre qui date déjà de 2009, intitulé Ils ont voulu changer l’école. Histoire des pédagogies actives dans le Jura, 1950 1970, dirigé par Mémoires d’Ici et édité par Alphil aux Presses Universitaires Suisses. À l’occasion des 100 ans de L’EN, j’ai approfondi ma lecture et je partage aujourd’hui mes découvertes.
Je le ferai en deux temps. Le premier cherchera à saisir ce que nous pouvons apprendre de l’expérience jurassienne, de ce passé bien révolu, comme l’écrivait Sauvain, tout en cherchant à comprendre le déclin d’une certaine école alors très active dans la région. Le second s’arrêtera brièvement sur le présent pandémique, signe d’un espace propice peut être à une réorganisation scolaire pour se pencher enfin sur un avenir possible.

 

  • Quel avenir pour le « Tous capables » ?
    Jean-Jacques VIDAL

Ils « partagent la capacité d’apprendre et de progresser » : la visée à mettre en œuvre pour tous les enfants est inscrite dans « Les principes de l’éducation » de la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République de juillet 2013.
Le « Tous capables », marqueur principal du Gfen au point d’être « dans l’ADN » du mouvement, est ainsi devenu un principe institutionnalisé.
Mais, pour les classes où les professeurs sont confrontés à trop d’empêchements, cette formulation participe très fortement à la mise à l’écart de ses objectifs : ils ne croient pas à son efficience pour les élèves dans les classes où ils enseignent, dans les écoles qui sont les leurs. Et il ne s’agit pas là uniquement de débutants nommés sur des postes difficiles, qui mettraient leur déclassement — le terme semble ironique, mais son vécu est amer — sur le compte de leur incompétence ou de leur manque d’expérience.

Graines d’espoir dans le champ des possibles
  • Lettre du Hermel 14 février 2022 (Liban)
    Ghoussoune WAHOUD

Chers amis de l’Éducation Nouvelle,
En 2020, mes amis et moi avons fondé le GLIEN le groupe libanais d’Éducation Nouvelle qui fait partie du LIEN. Nous avons créé l’école « Esprits Libres » où nous valorisons et cultivons les valeurs de responsabilité, d’autonomie, de respect, de liberté, de citoyenneté, d’empathie et de bienveillance. Notre mission est d’avoir de futurs responsables ayant des valeurs et capables de faire le changement qu’on vise dans notre pays. Mais pratiquement, comment travaillons nous ?

  • Douze perspectives, douze chantiers pour l’éducation nouvelle…
    Philippe MEIRIEU (Philippe Meirieu était le grand témoin de la Première Biennale de l’Éducation Nouvelle.)

Après avoir brossé un portrait de notre environnement montrant un univers individualiste qui peine à construire du commun assumé et se perd dans une consommation compulsive de « l’épuisable » ; une société où les savoirs se perdent dans la multiplication d’informations virales… ; une école qui creuse les inégalités sociales en raison du caractère massivement « laxiste » de ses pratiques… Philippe Meirieu avait proposé que nous ouvrions ces 12 chantiers, à partir de quelques thématiques rencontrées à l’occasion de cette Biennale. Le titre de son intervention alliait tant ce que fut l’Éducation Nouvelle que ce qu’elle doit continuer à faire en tout temps pour demeurer toujours nouvelle.

  • Concevoir une formation : l’expérience du GFEN…
    Jacques BERNARDIN

Il est fréquent d’entendre des reproches à l’égard de formations jugées trop « théoriques » et insuffisamment pratiques, et/ou en décalage avec les problèmes professionnels de terrain. Pour ceux auxquels elle s’adresse, la théorie n’est pas opératoire lorsqu’elle précède la conscience des problèmes qu’elle est censée expliquer ou lorsqu’elle n’ouvre pas sur une alternative à l’ordinaire. Suffit il a contrario de prescrire de « bonnes pratiques » ? Cela rabat la professionnalité enseignante à un métier d’exécution et laisse entendre que certaines pratiques vaudraient quels que soient les situations, le contexte et les acteurs en présence. Plus encore, que le dispositif serait opératoire indépendamment de la façon de le mettre en œuvre et de l’intention éducative qui le surplombe ? Au mieux, cette prescription règle provisoirement un problème, mais confirme et renforce la dépendance aux supposés experts et laisse en l’état le développement professionnel attendu

  • L’expérience d’une consultante de l’éducation parentale
    Ting LI (LIEN) Wuhan-Chine

Une harmonisation chinoise : le besoin de réussite des enfants et le besoin de la Nation En 2021, l’Administration de l’Éducation Nationale Chinoise a annoncé l’«Avis sur la poursuite de l’allégement de la charge de travail et de la formation extrascolaire des élèves de l’enseignement obligatoire» (2021). L’explication officielle de cet avis est la suivante : Pourquoi le bureau de l’Éducation Nationale met il une telle importance sur le déchargement des élèves ? Tout d’abord, je vais présenter brièvement le contexte social.
Le système de Sécurité sociale en Chine est en train de s’améliorer. À part les fonctionnaires, la plupart des gens de la classe moyenne ne comptent pas sur les aides sociales pour garantir leur retraite et les cas graves de problèmes de santé. Les parents mettent l’accent sur l’avenir de leur enfant, il faut réussir à l’école, faire des études supérieures dans les meilleures universités, trouver un travail bien rémunéré.

  • Pédagogies alternatives et Éducation Nouvelle : quels horizons ?
    Sylvain WAGNON, Faculté d’éducation de l’Université de Montpellier (Questions posées par Étiennette VELLAS)

Effectivement, je pense que les pédagogies alternatives forment aujourd’hui une nébuleuse qui se compose de nombreux mouvements, écoles et expériences éducatives et qu’elles sont révélatrices des mutations de nos sociétés. L’ambition des pédagogies alternatives est d’incarner une autre voie, une autre façon d’éduquer, d’enseigner, de comprendre les apprentissages, de redéfinir les relations entre adultes et enfants, enfin de penser nos sociétés. Le terme alternatif est puissant, radical et fédérateur pour des mouvements très disparates qui entendent s’opposer à un modèle dominant. Mais il me semble que plusieurs axes fédèrent la plupart de ces mouvements.

Supplément en ligne  télécharger

  • Pourquoi répondre à une invitation syndicale ?
    Jean-Jacques VIDAL
  • Du concept de fruit au concept de classification
    Jacqueline BONNARD
  • Ateliers d’écriture et de création : ces lieux qui n’existent pas encore
    Stéphanie FOUQUET, Laurent CARCELES