Bernard Charlot s’est éteint

Bernard Charlot s’est éteint le 3 décembre 2025 à Aracaju (Brésil). Attristés de son départ, nous adressons nos sincères condoléances à sa femme Valeida et à ses proches.

Complice de longue date du GFEN, Bernard Charlot nous a beaucoup apporté. Nous l’avons connu dès les années 75-80, alors qu’il était formateur à L’Ecole Normale du Mans. A l’époque, il avait publié la mystification pédagogique (1977) et l’Ecole aux enchères (1979), menant une analyse critique de l’Ecole qui rejoignait nos préoccupations.

Suite aux échanges avec ses étudiants (dont Yannick Legagne, fondateur du groupe GFEN de la Sarthe), à l’affût des lieux alternatifs ici et ailleurs, il nous avait mis en contact avec plusieurs mouvements d’éducation nouvelle de Belgique (Le Grain, Hypothèse d’école, Groupe d’Enseignement Mathématique, …), à la croisée du pédagogique et du travail social, avec lesquels nous avons animé un WE à Bruxelles, dans les locaux de la CGé (« Confédération Générale des Enseignants », désormais « Changements pour l’Egalité »). Ces contacts furent les prémices de relations qui perdurent, notamment à travers le LIEN…

Dans les années 80, suite à la rencontre avec Henri et Odette Bassis, sa contribution à l’ouvrage collectif du GFEN Quelles pratiques pour une autre école ? (1982), intitulé « Je serai ouvrier comme papa, alors à quoi ça me sert d’apprendre ? », jetait les bases de la notion de « rapport au savoir », qu’il développera ultérieurement à l’université Paris 8-St Denis avec l’équipe Escol, fondée en 1987. Toujours disponible pour intervenir lors de nos journées, WE ou Universités d’été, il apportait avec simplicité mais profondeur son point de vue éclairant.

En 1992, son ouvrage Ecole et savoir dans les banlieues… et ailleurs – co-écrit avec Elisabeth Bautier et Jean-Yves Rochex – aura un immense retentissement dans le monde enseignant et notamment dans l’éducation prioritaire, renouvelant l’approche des difficultés scolaires. Les ouvrages qui suivront, explorant le rapport au savoir des élèves de la maternelle au lycée et interrogeant la place des pratiques enseignantes, nous inspireront tout autant.

Alors que je reprenais des études universitaires sur le tard, il fut mon directeur de thèse de 1990 à 1993 : il était attentif aux personnes, précis, scrupuleux dans ses observations, scientifiquement exigeant et généreux dans ses conseils. L’ouvrage paru en 2013, intitulé Le rapport à l’école des élèves de milieux populaires, rend hommage aux recherches conduites par l’équipe dans sa filiation. 

Bien après son départ pour le Brésil, nous nous sommes revus à Bruxelles en 2022 : grand moment d’émotion… C’était à l’occasion de la 3ème Biennale Internationale de l’Education Nouvelle, qu’il avait ouverte sur la thématique de sa dernière parution Education ou barbarie (2020), au titre radical mais ô combien en phase avec les enjeux éducatifs contemporains. A l’origine d’un réseau international sur le rapport au savoir, son itinéraire force le respect.

Adieu Bernard.

Jacques Bernardin, président du GFEN & Odette Bassis, présidente d’honneur du GFEN

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