Pour Salgado

Sebastião Salgado est décédé le 23 mai 2025. Pascal Diard l’avait invité à intervenir dans sa classe en 2001.

Sebastião Salgado fait partie de ces « célébrités » qui ne font pas leur star !

La preuve ? Sa célérité à répondre à un projet d’élèves de 4ème à Saint-Denis ; sa gentillesse lors de notre rencontre au collège Henri Barbusse et sa disponibilité à répondre à leurs questions ; sa générosité à nous offrir des photos format affiche pour continuer à penser les phénomènes d’exode dans le monde au XXème siècle[1].

Je l’ai dit à maintes reprises mais ne l’ai encore jamais écrit : c’est grâce à mes élèves du 93 que j’ai pu rencontrer, en tant que « petit prof de banlieue », des personnalités importantes, voire majeures, pour comprendre notre monde : Albert Jacquard, généticien, à propos de l’intelligence, des résistant.es et des déporté.es pour témoigner des années 40, Yves Lacoste géographe auteur de « La géographie ça sert d’abord à faire la guerre », quatre dignitaires religieux acceptant de débattre avec une classe de 5ème, Arsène Tchakarian du groupe FTP-MOI Manouchian puis, après son décès, Robert Guédiguian le cinéaste qui a mis en scène son histoire dans « L’armée du crime », Béatrice Giblin fondatrice de la revue « Hérodote » et des géographes de Paris VIII, Alain Serres fondateur des éditions « Rue du monde », …

Et donc, en 2002, Salgado.

Cependant, je dois ajouter que ces personnalités se sont déplacées en Seine-Saint-Denis car elles étaient curieuses – comme des élèves ! Comme mes élèves !!

Or, cette curiosité a été nourrie par les projets que nous construisions en classe, les élèves et moi, autour d’un moteur de recherche non-artificiel, à têtes multiples : l’envie de savoir, le besoin de chercher donc d’apprendre, le plaisir de savourer une certaine prise de conscience devant la complexité du monde.

Pour mettre en route ce moteur de recherche, m’ont été d’une grande aide, et ma militance au sein du GFEN, et mes luttes quotidiennes pour ouvrir, avec et pour mes élèves, l’histoire à de possibles transformations progressistes, à rebours de toute forme de sclérose politique et de régression sociale.

Monsieur Salgado, je n’aurai de cesse, de mon vivant, de vous remercier pour votre présence lumineuse, généreuse et combative, en cette année 2002, face à des élèves avides de comprendre alors les exodes de notre histoire humaine !

Pascal DIARD


[1] Lire mon article qui fait référence à cette rencontre dans Dialogue n° 104/105, mai 2002 : Avec Salgado, une rencontre entre histoire et poésie.

Des jeunes gens fuient le sud du Soudan pour éviter l’enrôlement dans les forces armées. Ecole gérée par les Nations Unies au camp de Kakuma. Nord du Kenya. 1993
Zone de distribution de nourriture située à plusieurs kilomètres du camp de réfugiés rwandais de Kikumba. Goma, Zaïre. 1994
Nahr el-Bared, camp de réfugiés palestiniens. Région de Tripoli, nord du Liban. 1998
Les mines à ciel ouvert ont endommagé de vastes étendues de terres cultivables et de forêts. Illégalement, les paysans ramassent le charbon de leurs anciennes terres pour le vendre. Etat de Bihar, Inde. 1997