Stage de rentrée du GFEN 28

« Quelles pratiques pour une autre école ? »

Chartres à 28 & 29 août 2012

 

Le mardi 28 août, dès 9h du matin, nous nous retrouvions à une quarantaine d’enseignants de maternelle, élémentaire, collège, Segpa, Rased, d’Eure-et-Loir, du Loiret et du Cher, dans les locaux du centre IUFM de Chartres. Après une rapide présentation des enjeux de cette formation dans le nouveau contexte politique ayant pour projet la Refondation de l’école, chacun rejoignait un des ateliers « Situations défi pour reconstruire de l’estime de soi » ; ateliers commençant par un relevé des difficultés des élèves et se poursuivant par une démarche vécue puis analysée afin de pouvoir être réinvestie de manière créatrice par chacun :

  • Quelles activités de lecture pour (re)donner appétence et exercer une posture de lecteur ?
  • En vocabulaire : apprendre des mots ou en appréhender le sens car, comme le dit Vygotski « Presque toujours ce n’est pas le mot lui-même qui est incompréhensible mais c’est le concept exprimé par le mot qui fait totalement défaut à l’élève. Le mot est presque toujours prêt lorsque le concept l’est. »
  • L’importance des ateliers d’écriture pour construire appétence et compétence à écrire.

Après le déjeuner, où continuèrent de s’échanger ce qui avait été vécu par les uns ou les autres, chacun repartait dans un nouvel atelier « Derrière les titres des leçons’, quelles notions construire ? Sur quelle progressivité ? » :

  • Pourquoi et comment les Hommes ont-ils inventé les nombres puis la numération ? Comment construire le concept de numération positionnelle selon les niveaux d’enseignement ? En quoi l’approche des techniques opératoires est-elle à concevoir comme réinvestissement créatif et
    appropriation du concept de numération ?
  • La phrase : ensemble de mots ou de groupes de mots faisant sens ? Si la nature d’un mot c’est sa fonction à l’intérieur de son groupe de mots et la fonction de ce mot la nature du groupe dans lequel il est inséré, quelle progression notionnelle pertinente privilégier ?
  • A quoi « sert » l’orthographe, quel est l’objet de son enseignement ? Comme pour toute autre activité métalinguistique, l’apprenant doit passer d’une posture de lecteur-scripteur (tendu vers la recherche du sens car la langue est outil de communication) à une posture  de grammairien, où la langue devient objet d’étude. Mais au fait, à quoi « sert » l’orthographe, quel est l’objet de son enseignement ? Comment l’orthographe fonctionne -t-elle ? Allons-voir du côté de l’histoire des règles qui le régissent.

Après une pause rapide le travail reprenait en grand groupe pour explorer les « conceptions
du savoir et les rapports aux normes scolaires ».
Pendant que des petits groupes exploraient des situations (analyse d’erreurs d’élèves sur les décimaux – expliquer le théorème de Pythagore à justifier la déclinaison des identités remarquables (a+b) ² puis (a-b) ² – trouver LA règle d’accord des participes passés) un groupe devait présenter et illustrer, à partir des ateliers de la journée, un texte théorique de Stéphane Bonnéry intitulé « Rapport à la norme et aux normes : normalisation à normativité ».

La matinée du mercredi 26 août était consacrée à « L’ordinaire de la classe : un espace de réussite » :

  • le travail par ateliers pour la gestion de la classe à un ou plusieurs niveaux.
  • Le rôle des attentes et des prophéties auto-réalisatrices dans la construction de l’image de   soi.
  • Introduire le débat littéraire en classe pour construire une posture de lecteur de littérature en ouvrant un espace de pensée et de parole où les élèves pourront mettre en mots des réflexions et des idées à partir de la compréhension de textes lus ou entendus. Comment mettre en place les conditions de débats littéraires pour qu’ils provoquent un questionnement des textes qui développe leur compréhension et leur interprétation, fasse partager des émotions et élaborer des jugements ? Quelle place de l’enseignant ? Quels choix d’œuvres ?

A midi nous nous retrouvions autour d’un pot convivial après un discours de clôture :

« Ce qui fonde toute l’Éducation Nouvelle c’est un pari sur l’Homme, sur la profonde
confiance dans ses capacités… à la condition que celles-ci soit mises en situation de pouvoir s’exercer. « L’éducation nouvelle prépare chez l’enfant non seulement le futur citoyen capable de remplir ses devoirs envers ses proches et l’humanité dans son ensemble, mais aussi l’être humain conscient de sa dignité d’homme. » 1921 (Fondement de la Ligue Internationale de l’Education Nouvelle). Ainsi, dès son origine l’éducation nouvelle posait l’acte pédagogique comme acte d’essence politique, définissant l’école comme matrice du social, comme lieu de formation du sujet et du citoyen.

Première rupture : le regard porté sur cet autre qu’est l’élève et sur les attentesque je porte à son égard. En 1965 Henri Wallon écrivait : « Un regard qui scrute pour trouver la marque du manque impose à l’enfant un statut péjoré. Un regard qui ne cherche en l’enfant qu’un devenir instaure une dynamique de rencontre. » Ce qui n’était hier que pari philosophique est devenu aujourd’hui défi éducatif puisque les recherches en neurobiologie ont montré qu’ «un environnement enrichi facilite non seulement les apprentissages mais développe les interconnexions synaptiques du système nerveux central. Les apprentissages transforment biologiquement le cerveau. Le vieux dualisme entre esprit et cerveau doit
aujourd’hui être dépassé, le fonctionnement cérébral influe sur les comportements et les apprentissages influent sur le développement cérébral..[1]. »

Les élèves sont intelligents, et leurs erreurs sont des indicateurs de leur pensée. Quel que soit le domaine particulier (opération, décimaux, orthographe, grammaire, etc.), leur analyse dévoile une logique à l’œuvre qui ouvre des pistes précieuses pour orienter nos dispositifs pédagogiques.

De notre point de vue, ce n’est ni l’enfant qui est au centre de la classe, ni le programme défini par les Instructions officielles mais le rapport de l’élève à la scolarité et au savoir.

1  Rapport à la scolarité : l’école n’est pas d’abord ni essentiellement un lieu de formation
professionnelle : elle a pour vocation de construire un rapport émancipé au monde des objets et des idées, aux autres. Elle est un lieu où le chaos du monde physique et social s’organise en univers compréhensible, où se forme l’Homme conscient de sa dignité et le Citoyen responsable dans la Cité.

2  Rapport au savoir : l’école fait passer de l’expérience vécue à l’expérience réfléchie, de l’opinion au
savoir. Il s’agit de permettre aux élèves d’éprouver la normativité des savoirs en en goûtant la saveur (cf. ateliers du soir), plutôt qu’ils se sentent soumis à une normalisation arbitraire de leur comportement et de leur pensée.

3 Rapport à savoir : apprendre c’est comprendre le pourquoi des choses, acquérir maîtrise et  pouvoir sur le monde. Expliquer empêche de comprendre quand cela empêche la recherche et la découverte jubilatoire, dans l’échange stimulant avec les pairs. Il s’agit de passer d’une logique de la question (qui appelle une réponse de préférence juste) à une logique du questionnement qui, lui, amorce et stimule un travail intellectuel.

Tous capables : il en est des élèvescomme des enseignants.

  • La question du sens du métier est reposée dans le contexte actuel : continuer de participer malgré soi à la reproduction ou œuvrer à l’émancipation de nos élèves ?
  • Rester seul, C’est se condamner à l’impuissance : il y a nécessité de se constituer en collectifs professionnels afin d’échanger et de repenser notre métier.

Militer au GFEN c’est :

  • s’inscrire dans un intellectuel collectif et s’approprier de la richesse construite au fil des années par des générations d’enseignants et d’éducateurs. Une grande partie des ateliers et démarches vécus sont les fruits que nous avons cueillis dans ce mouvement ;
  • enrichir les questionnements et pratiques socio-historiquement construites, et donc participer au mouvement vivant du savoir sur les pratiques enseignantes.

Cotiser au GFEN c’est apporter un soutien financier indispensable dans le contexte actuel où nos subventions ont une nouvelle fois chuté de 35% par rapport à l’an dernier… »

De nouvelles volontés et compétences à préparer et animer des démarches et ateliers : l’avenir se construit !

14 adhésions et ré-adhésions, plus de 500 € de littérature vendue.


[1] Michel
Duyme et Christine Capron, livre du GFEN En finir avec les dons, le mérite, le
hasard , Ed. La Dispute, 2009, p. 45

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