Vygotski au service des entreprises ? par Johnny Coopmans A lire sur le site de l’Appel pour une école démocratique 27 août 2017 Les travaux du psychologue soviétique Lev Vygotski sont souvent associés au socio-constructivisme pédagogique. Or, ce dernier est revendiqué en héritage par les tenants de l’approche par compétences, cette expression pédagogique du recentrage de l’enseignement sur la demande patronale de flexibilité. D’où la question : l’approche par compétences est-elle un digne successeur de l’école historico-culturelle de Lev Vygotski ? L’école historico-culturelle L’école historico-culturelle, a été fondée dans les années 20-30 par trois psychologues soviétiques, Lev Vygotski, Romanovitch Luria et Alexis Léontiev. Leurs travaux s’inscrivaient dans les débats qui animaient les milieux académiques de psychologie et de pédagogie de l’époque. La psychologie, comme science naissante, attirait beaucoup de jeunes étudiants et chercheurs en URSS. Il existait différentes écoles de psychologie en Occident et celles-ci avaient leurs adeptes dans les universités russes. Mais la question qui se posait était de savoir s’il fallait adopter tels quels différents éléments du behaviourisme, de la psychologie Gestalt, de la psychologie des tests ou encore de la psychanalyse et les « mixer » ou s’il était préférable de tenter de formuler une nouvelle psychologie scientifique, conforme aux objectifs de la société socialiste naissante. Dans ce dernier cas, comment serait-elle appelée : psychologie objective, dialectique ou marxiste ? Dans ce contexte, plusieurs courants ont vu le jour. Parmi eux, l’école dite « historico-culturelle ». Voici ce qu’en dit le philosophe marxiste Lucien Sève, l’un des grands spécialistes de la pensée de Vygotski : « Le double but de Vygotski est : reformuler la théorie psychologique sur des bases marxistes et inventer des voies concrètes pour une pédagogie dans la lutte contre l’analphabétisme et la solution des problèmes de défectologie1, depuis la surdité jusqu’au retard mental ». Vygotski donne une double définition du terme « historique ». Celui-ci doit d’abord se comprendre dans une approche dialectique, au sens où chaque individu a sa propre histoire. Mais il fait également référence à l’histoire de l’humanité. Les fonctions supérieures n’ont pas un développement naturel mais varient selon les époques historiques. Il y a donc évolution. Ces deux branches de l’histoire (naturelle et culturelle) fusionnent dans le psychisme pour permettre à l’enfant et à l’adulte de se développer au travers de son parcours individuel. Le culturel n’a rien de mystique ou de surnaturel. Dans le monde animal à coté des réflexes inconditionnels cad les instincts, dominent les réflexes conditionnels, qui résultent de l’expérience acquise par l’animal au cours de son existence. Tous ces réflexes concernent le lien qui s’établit entre un stimulus et un objet, Mais au niveau humain Vygotski prétend qu’il y a un stimulus artificiel qui s’intercale en quelque sorte entre le sujet et l’objet. Le lien direct d’association devient structure. Le développement et l’enchevêtrement du langage et de la pensée en est la cause. Et même si les animaux peuvent penser et ont parfois un rudiment de langage ils ne se parlent pas vraiment, ni ne sauront-ils concevoir un accélérateur de particules. Toutes les fonctions essentielles de l’homme, le langage, la mémoire, l’attention, sont reconstruits sur cette base triangulaire à savoir « objet-signe-sujet ». Nous y reviendrons en abordant les stades de développement. Lire la suite de l’article 19 septembre 2017 Valérie Pinton