Retour sur le congrès du GFEN (30 octobre-1er novembre, Paris) Penser c’est déjà s’engager Repenser l’engagement (associatif, cela s’entend, et au service d’une égalité concrète et de la libération sociale de tous les peuples, cela va mieux en le disant), c’était le thème central de ce congrès accueilli dans les locaux du SNUipp à Paris. Pourquoi insister sur le fait de « penser » l’agir et l’action ? Alors que nous souhaitions relever les défis contemporains, gigantesques et pressants, qui occupent les esprits et préoccupent les peuples. « Penser » est-il bien raisonnable dans de tels temps où nous pressent les urgences à bifurquer des chemins que d’aucun voudrait nous voir suivre à nos corps défendants ? Il a semblé que « oui » aux personnes présentes (plus de 80), venues de 23 départements et de 14 régions, mais aussi de Belgique, de Suisse et du Canada (sans oublier ce digne monsieur originaire du Laos qui nous en a appris sur le regard que pouvait porter les peuples sur l’entreprise coloniale). Il a semblé que « oui » aux 3 intervenants qui nous ont partagé leurs idées sur les lectures politiques qui peuvent se développer sur l’éducation, au Brésil et ailleurs, dans certains usages des neurosciences comme dans les possibilités que permet une fragile mais réelle liberté pédagogique. Si les contradictions ne manquent pas, voire s’exacerbent, encore faut-il pour les penser et les dépasser, savoir les formuler au plus près des enjeux sociaux, des visées anthropologiques et des réalités éducatives. Il a semblé que « oui » aux militantes et adhérents du GFEN qui venaient se ressourcer (un mot qui est revenu souvent dans les témoignages d’après congrès), au contact, entre autres, de responsables associatifs du SNUipp, de Sud Education, des CEMEA, des Pionniers de France, d’ATD Quart Monde. Mais alors, qu’avons-nous réussi à « (re)penser » dans la temporalité modeste de ces trois jours ? D’abord une histoire, celle d’un mouvement centenaire, revisitée par le biais de ses archives (mais au fait, qu’est-ce qu’une archive vivante ?). Une histoire multiforme qui se dit dans les « sosies » que nombre d’entre nous ont menés autour de démarches de savoir, une histoire qui continue de s’écrire dans les groupes et les secteurs du GFEN, une histoire qui se vit au futur-présent dans les territoires et les institutions que nous fréquentons pour contribuer à leur transformation. Bien entendu, cette (re)pensée de l’histoire se combine à et se croise avec d’autres en rapport à la visée d’émancipation globale (individuelle, sociale et intellectuelle) qui nous préoccupe tant. Que veut dire « rompre » avec l’état des choses existant et comment faire ? Quels mots choisir d’employer pour exprimer au mieux notre bataille d’idées ? L’intelligence du monde n’est-elle qu’un artefact mécanisable, même à l’aide d’un complexe algorithmique ? La poésie et les arts plastiques peuvent-ils permettre de sortir du chaos des violences sociales, corporelles et psychiques que le capitalisme financiarisé sans limites ni vergogne impose plus ou moins directement aux peuples et aux individus ? Et la culture suffit-elle, même quand le pari du « tous capables » est lancé, à créer les conditions pour que le sujet choisisse de tordre le cou à toutes les formes d’aliénation qui le dépossèdent de ses œuvres, de ses ouvrages, de ses productions, mais aussi de ses rêves, de ses désirs, de sa dignité d’être humain ? Les questions du « langage professionnel » de l’éducation, du débat d’idées, de l’animation de nos démarches, entre autres, sont alors posées. Et méritent d’être (re)pensées. C’est un peu tout ça (et bien d’autres choses sans doute) qui a redonné du peps’ et de l’énergie à nos forces militantes. Un ou deux numéros de « Dialogue » nous en diront davantage bientôt : compte-rendu d’ateliers et retranscription des interventions. Engagez-vous qu’ils disaient ?? Ce vieux cri d’embauche dans l’armée coloniale devrait sonner étrangement aujourd’hui où les va-t-en-guerre se réveillent et nous promettent un avenir insoutenable, non ? Mais pourquoi le laisser nous assourdir et nous effrayer ? Car tout ne dépend-il pas de ce pourquoi l’on s’engage, et pour quelle visée ? J’aime à le répéter, avec Lucien Sève : quelle humanité voulons-nous devenir ? A nous de retrouver pouvoir d’agir pour répondre paisiblement et gaiement à cette ultime question ! Pascal DIARD L’ouverture du Congrès par Jacques BERNARDIN lire le texte Revoir la présentation du congrès 17 décembre 2025 Valérie Pinton