Extraits Dialogue n° 189

Dialogue n° 189 – Le pouvoir du travail

 
Editorial
  • Reprendre le pouvoir du travail. Le travail, le métier, la profession   Lire l’édito
    Le collectif de rédaction de Dialogue

Au centre du travail, des relations…

  • Les forçats de l’école. Réflexions sur la valeur du travail au lycée
    Anne BARRÈRE, Sociologue de l’éducation Professeur à l’université Paris-Descartes

L’institution scolaire aujourd’hui se légitime massivement par l’affirmation qu’en travaillant, on peut réussir à l’école. Cette foi méritocratique dans le travail, sur les « décombres » du discours du don, est partagée par les élèves, mais elle rentre en contradiction avec l’expérience quotidienne du verdict scolaire, particulièrement lorsqu’ils travaillent sans réussir. Ces forçats de l’école vivent alors dans l’absence de maîtrise d’un travail dont ils ne comprennent pas qu’il ne soit pas efficace. Cette situation oblige à analyser précisément les malentendus entre une institution qui ne cesse d’en appeler au travail sans être capable toujours d’en définir des normes stables et des élèves qui ont bien souvent du mal à déchiffrer les demandes et à comprendre l’évaluation que l’on fait d’eux;

  • Quand la colère permet de faire le jour
    Erell BARAËR, Professeure de lettres, Lycée Jean Guéhenno, Fougères

« Sylvie Germain m’a niqué mon bac » pouvait on lire sur les réseaux sociaux en juin dernier. En effet, après l’épreuve écrite du baccalauréat de français et face au sujet proposé en commentaire issu de Jours de colère de Sylvie Germain, les réactions d’élèves, injurieuses et violentes, se multiplient. Comme tous les enseignants, j’ai été sidérée. Au delà de l’extrême agressivité qui se dégageait de ces tweets, c’est la posture de ces élèves qui m’a interpellée : derrière la colère d’être désarçonné (il s’agissait d’un texte contemporain qu’ils ne pouvaient classer en un mouvement littéraire et d’une écriture romanesque très poétique qui les amenait à la rencontre de personnages énigmatiques), se lit la volonté scolaire de n’avoir qu’à appliquer. Comment expliquer que des élèves de première, après plusieurs années de français, s’insurgent face à un texte qui leur résiste et attendent d’exécuter des procédures plutôt que d’émettre leurs hypothèses ? J’ai eu le sentiment d’un profond malentendu : ces élèves semblaient attendre de l’exercice du commentaire une restitution de connaissances, le texte qui leur a été proposé les amenait au contraire à s’aventurer.

  • Premières brasses dans le grand bain
    Interview de Garance CORDONNIER par Jean-Louis CORDONNIER

Je ne sais pas si j’avais une représentation. J’ai l’impression que mon travail c’est de travailler avec les élèves ; trouver des façons qu’ils apprennent, qu’ils s’épanouissent, qu’ils se posent des questions : j’ai l’impression qu’elleux et moi, on est dans la même équipe. Je trouve toujours un peu bizarre quand ils sont en mode « je l’ai bien eue ». Quand un élève fait une blague, il a l’impression d’avoir gagné, que je n’aurais pas voulu qu’il plaisante. Moi ça me fait rire. Bien sûr je veux qu’on ne passe pas tout le cours à faire des blagues… Mais ils ont l’impression d’avoir gagné quelque chose contre moi. Je les vois tricher, me mentir, être en conflit. Quand les élèves font un parallèle avec une autre matière ou qu’ils posent des questions sur la vie, j’ai plutôt l’impression que ça participe à faire de l’école un endroit où on réfléchit et où l’on fait des trucs chouettes. Eux, j’ai l’impression qu’ils croient m’avoir arnaquée;

  • Des principes d’Éducation Nouvelle dans le football business ?
    Michel BARAËR

Régis le Bris a été recruté au FCL lorsque Christian Gourcuff en était l’entraîneur et il a passé plusieurs années à ses côtés. Gourcuff avait déjà su tirer le meilleur des équipes lorientaises puisqu’il les avait deux fois fait monter de ligue 2 en ligue 1, que, sous sa direction, elles s’étaient maintenues en ligue 1, et qu’elles s’étaient même, plusieurs fois, très bien classées (7e en 2010, 8e en 2013). Il était le promoteur d’un jeu très collectif fondé sur l’épanouissement des joueurs.
Régis Le Bris se réfère aussi explicitement à Claude Fauquet (entre autres, ancien directeur de l’équipe de France de natation) et François Bigrel (professeur au CREPS de Talence). Tous deux défendent une conception de la performance à l’opposé de celle qui a très majoritairement cours : la performance ne résulte pas de la mise en œuvre de compétences travaillées à l’entraînement sous la direction d’un coach, elle réside dans la capacité à résoudre les problèmes, toujours nouveaux, posés par la situation de compétition.

… des contraintes…
  • Un métier à « besoins particuliers »
    Sophie REBOUL, GFEN 25

L’école a depuis quelques années un nouveau visage appelé communément « école inclusive ». Elle promeut l’égalité des droits et des chances, l’obligation de garantir une « formation scolaire, professionnelle ou supérieure aux enfants, aux adolescents et aux adultes présentant un handicap ou un trouble de la santé invalidant. Ces jeunes ont le droit d’être inscrits dans l’établissement scolaire le plus proche de leur domicile ».
Comment cette obligation a-t-elle modifié le métier d’enseignant ?
Relayée par la presse, reconnue dans la société, la notion d’inclusion semble fort louable et incriticable . Il reste pourtant un goût amer, un sentiment d’impuissance, voire de culpabilité dans la profession. Les « manques » seraient ils de la seule responsabilité d’enseignants et parents « incapables » ? C’est ce qui m’interroge et m’interpelle aujourd’hui d’après mon vécu de « classe maternelle inclusive »

  • Entre contraintes et injonctions, des espaces pour se sentir vivant.e
    Maria-Alice MÉDIONI, Secteur langues du GFEN

Le métier enseignant est un métier difficile. Un des trois « métiers impossibles », d’après Freud, parce que, pour chacun d’eux, «on peut d’emblée être sûr d’un succès insuffisant ».
Un métier, d’autre part, souvent empêché : « L’activité empêchée, c’est le salarié qui, à la fin de la journée, se dit « aujourd’hui encore, j’ai fait un travail ni fait, ni à faire ». C’est la mauvaise fatigue qui provient de tout ce que l’on n’arrive pas à faire. C’est ce travail qui vous poursuit, vous empêche de dormir. L’activité empêchée, c’est ne pas pouvoir se reconnaître dans ce que l’on fait ». Comment s’en sortir entre le fait qu’on « n’a jamais fini » et les contraintes et injonctions contraires à ce que, en tant qu’enseignant.e, on pense devoir faire ?

  • Les notes, nos menottes
    Jean-Louis CORDONNIER

Lorsque j’étais élève, la seule note qui valait était celle de la composition trimestrielle. La moyenne des trois trimestres servait à déterminer les prix et accessit de maths, français, etc. ainsi que les prix d’excellence. Mai 68 a bouleversé tout ça et introduit le contrôle continu. Jeunes enseignants dans les années 80, on nous a expliqué qu’il fallait faire des évaluations diagnostiques, formatives, sommatives, certificatives, normatives, critériées… On nous a fourni des référentiels de compétences.
Puis Pronote est arrivé. Ainsi qu’un nouveau baccalauréat où 40 % de l’évaluation se fait par contrôle continu en Terminale et en Première. Tout au long de l’année, les enseignants doivent informer les élèves avant un contrôle de son statut certificatif ou non. Compte tenu des horaires des différentes disciplines au collège et au lycée, pour produire les deux ou trois notes trimestrielles nécessaires, c’est 15 ou 20 % du temps qui est passé en contrôle soit plus d’une année entière entre la 6e et la Terminale. Les enquêtes montrent que les enseignants consacrent environ 6 ou 7 heures par semaine à corriger des copies. Si vous parlez de temps de travail à un enseignant du secondaire, il va très rapidement vous détailler toutes ces copies à corriger, corvée fastidieuse, fatigante, abêtissante, déprimante, peu utile mais incontournable.
On est passé en un demi siècle d’une évaluation ponctuelle à une évaluation permanente. Sans que cela ait provoqué une amélioration notable des apprentissages, bien au contraire.

… dans un projet émancipateur

  • Le travail, c’est la force émancipatrice majeure
    Extraits d’une interview d’Yves CLOT par Pablo PILLAUD-VIVIEN

Le texte suivant est la transcription, par Nicole Grataloup et Michel Baraër, d’extraits d’une interview orale d’Yves Clot par Pablo Pillaud-Vivien, dans le cadre de la MIDINALE de regards.fr, intitulée « La gauche se trompe quand elle parle du travail », le 16 septembre 2022.
Pour moi, la question du travail est le grand refoulé du débat politique et de l’action politique. Je partirai de l’exemple des hôpitaux. On a connu une expérience sociale et à mon avis politique, au sens noble du terme, très importante, puisque avec la pandémie, les soignants se sont trouvés dans une situation catastrophique du point de vue professionnel, à devoir assumer des responsabilités
gigantesques au péril de leur santé. Mais ils se sont engagés dans cette affaire avec un soutien de la population qui, à l’époque, a fait le respect de tous. On se souvient des urgentistes qui disaient « on n’a jamais aussi bien travaillé que pendant la pandémie ».
C’est incroyable, d’autant plus que ces mêmes urgentistes sont dans la situation qu’on sait et que très récemment ils ont manifesté à quel point ils étaient étranglés par les problèmes multiples. Comment peut on passer d’une situation où il y a fierté du travail, plaisir de travailler absolument considérables, à une situation dans laquelle on va travailler à reculons et — c’est massif pour les infirmières —, on est tenté par la démission.

  • Le prix du travail bien fait. La coopération conflictuelle dans les organisations, sous la direction d’Yves CLOT
    note de lecture par Pascal DIARD

En avril 2021, alors que nous sortions à peine du confinement, paraissait Le prix du travail bien fait. La coopération conflictuelle dans les organisations, rédigé par des psychologues du travail et un ergonome, sous la direction d’Yves Clot. Son contenu ? Le titre de l’introduction l’indique clairement : « Au delà de la pandémie, repenser le travail »

  • La justice au travail d’Alain SUPIOT Éditions du Seuil, Libelle, 2002
    note de lecture par Jacqueline BONNARD

Juriste, Alain Supiot est professeur émérite au Collège de France. Spécialiste du droit social et de la théorie du droit, il a écrit de nombreux ouvrages dont La justice sociale face au marché total (Seuil 2010 ; Points 2021) et La gouvernance par les nombres (Fayard, 2015 ; Pluriels, 2020)
Ici, c’est un texte court, version augmentée de la Conférence d’ouverture des Rendez-vous de l’histoire de Blois (2021) consacrés au « Travail ». Le titre invite à penser la justice selon deux entrées : d’une part comme élément moteur de la construction du monde et d’autre part sa place dans le monde du travail. Pour Alain Supiot, la justice au travail « s’entend comme juste répartition du travail et de ses fruits. Mais elle signifie aussi que c’est une force historique qui ne cesse de travailler les sociétés humaines et d’interroger leurs institutions »

  • Enseigner, métier ou profession ?
    Catherine LEDRAPIER

La professionnalisation de l’enseignement est actée en France par la création des IUFM en 1991. «Professionnalisation du métier» : les instituteurs deviennent «professeurs des écoles», et les professeurs du secondaire auraient enfin une vraie formation didactique et pédagogique ! Un même niveau de formation entraîne une même rétribution, c’est un aspect fondamental de cette transformation. Une formation universitaire et professionnelle était l’ambition fondatrice des IUFM. Les chercheurs constatent que la professionnalisation de l’enseignement est internationale, son but est de rendre les enseignants plus efficaces pour assurer une meilleure réussite scolaire du plus grand nombre d’élèves. Il s’agit de réussir une vraie démocratisation de l’enseignement, de qualité, qui ne se réduise pas à une massification. Mais qu’entend on par «professionnalisation» ? Quelles différences avec le métier d’enseignant ?

  • Entre travail, emploi et activité : les métiers de l’éducation plongés dans un conflit démocratique
    Pascal DIARD

Il y a des lectures qui vous ouvrent des perspectives, des horizons nouveaux. En un mot : des possibles d’action et de pensée. L’ouvrage d’Alexis Cukier est de ces lectures là. Un extrait, en particulier, me remue encore les méninges : « Cet ouvrage partage bien l’objectif de transformer radicalement le sens du travail, pour en faire un moyen central de l’activité démocratique. Mais à cette fin, il convient de distinguer radicale ment le travail de l’activité (la mobilisation de la personne pour réaliser une tâche prescrite), de l’emploi (la rémunération et l’intégration sociale dans l’exercice d’une profession), et du salariat (les institutions de l’exploitation économique et de la subordination juridique du travailleur). […] La définition du travail est une question politique […] parce que le travail n’a pas seulement une fonction économique – produire des biens et des services – mais aussi une fonction politique : produire (reproduire, contrôler, transformer) les rapports sociaux.[…]


Cahier du LIEN

Débat « Migration »
Deux textes (Tunisie, Suisse) se font ici écho. Complexité d’un tableau à l’horizon infini, dont le titre pourrait être « émigration et/ou immigration ».
Les couleurs de l’espoir et du désespoir s’y mêlent. On peut le regarder de loin ou s’en imprégner et y ajouter toutes les couleurs susceptibles de l’illuminer.
  • La pulsion viatorique
    Mounira Khouadja (ITEN)
  • Qu’en est-il de cet ailleurs rêvé ?
    Claire DESCLOUX (GREN)

Extraits Dialogue n° 188

  • Dialogue n° 188 – Former, se former dans les variétés du réel

Editorial
  • Formation… vous avez dit formations ?   Lire l’édito
    Jean-Jacques VIDAL et le collectif Dialogue
 
Être formateur : concevoir…
  • Concevoir une formation : l’expérience du GFEN
    Jacques BERNARDIN

Il est fréquent d’entendre des reproches à l’égard de formations jugées trop « théoriques » et insuffisamment pratiques, et/ou en décalage avec les problèmes professionnels de terrain. Pour ceux auxquels elle s’adresse, la théorie n’est pas opératoire lorsqu’elle précède la conscience des problèmes qu’elle est censée expliquer ou lorsqu’elle n’ouvre pas sur une alternative à l’ordinaire. Suffit-il a contrario de prescrire de « bonnes pratiques » ?
Cela rabat la professionnalité enseignante à un métier d’exécution et laisse entendre que certaines pratiques vaudraient quels que soient les situations, le contexte et les acteurs en présence. Plus encore, que le dispositif serait opératoire indépendamment de la façon de le mettre en oeuvre et de l’intention éducative qui le surplombe ? Au mieux, cette prescription règle provisoirement un problème, mais confirme et renforce la dépendance aux supposés experts et laisse en l’état le développement professionnel attendu.
Connaissant toutes ces limites, les formateurs sont généralement rétifs à prescrire ce qu’ils nomment des « recettes ». Et pourtant, les enseignants ont besoin d’accroche qui leur parle : cela vaut au cours de la formation mais aussi et d’abord dans la phase de négociation qui la précède.

  • « Les démarches ouvrent aux enseignants des espaces de réflexivité »
    Interview d’Éloïse PIERREL par Laurent CARCELES Formatrice et formateur au rectorat de Créteil (École Académique de Formation Continue)

LC : Peux-tu d’abord nous présenter quels sont « les » métiers que tu exerces au sein de l’Éducation Nationale ?
EP : Pour commencer, je suis enseignante en lycée professionnel dans un établissement de Seine-Saint-Denis pour les disciplines Lettres-Histoire. En 2009, j’ai passé la certification Français Langue Seconde (FLS). Cela m’a permis de devenir, depuis septembre 2009, professeure de ce qu’on appelait à l’époque « classe d’accueil ». Depuis 2012, la classe d’accueil est devenue un dispositif nommé « Unité Pédagogique pour Élèves Allophones Arrivants » (UPE2A). Je suis donc coordonnatrice du dispositif qui accueille ces élèves depuis 14 ans maintenant. Je leur enseigne le français. Ces élèves ont vocation à rejoindre une classe ordinaire et à poursuivre leur cursus scolaire en France.
Ensuite, je suis aussi professeure testeur au Centre d’Information et d’Orientation (CIO). Je fais passer des tests de positionnement aux élèves qui viennent d’arriver en France, qu’ils soient francophones ou non francophones. Sans détailler les autres critères pris en compte, ces tests permettent de positionner ces adolescents dans la classe qui correspond aux compétences et connaissances qu’ils ont déjà acquises.
Depuis 10 ans, je fais également de la formation. J’ai passé le Certificat d’Aptitude aux Fonctions de Formateur Académique (CAFFA) en 2019.

 

  • L’école inclusive, une déclinaison du « Tous capables » ?
    Cécile VICTORRI, INSPE de Versailles

Il ne s’agissait pas, pour les formatrices ASH que j’ai rencontrées, de maîtriser tous les dispositifs d’adaptation, ni d’individualiser les consignes et les évaluations, il ne s’agissait pas de transformer les professeurs des écoles en personnel soignant, ou en éducateurs spécialisés, l’idée était plutôt d’apprendre à concevoir son enseignement sans présupposer l’incapacité des élèves, en laissant le champ libre à une diversité d’approches et de procédures, en comptant sur les vertus de la coopération. Or ces pratiques pédagogiques, et les principes sur lesquelles elles se fondent, font immédiatement écho aux partis pris pédagogiques du GFEN, me semble-t-il, et me sont apparus comme des évidences. Quelques exemples m’ont frappée.

  • Ceci n’est pas un ready-made mais un road movie initiatique
    Sylviane MAILLET, GFEN Secteur Arts Plastiques

On peut être déconcerté par les consignes des démarches en création et penser que l’on n’est pas capable de pouvoir en élaborer. Même en lisant le dispositif, il est quelquefois difficile de savoir interpréter ce qui est formulé.
C’est pourquoi, dans une formation, il est donc essentiel que les participants (es) puissent se donner les moyens pour pouvoir inventer leurs propres démarches. Sans perdre de vue que les ateliers arts plastiques/ écriture ne sont ni des suppléments d’âmes, ni des compléments alimentaires culturels.
Voici donc une réflexion sur les dessous d’une démarche : « Les mots dont nous avons besoin » afin de percevoir les enjeux et de se les approprier.

… dans un autre rapport à l’institution…
  • De la coopération avec les apprenant.e.s
    Maria-Alice MÉDIONI, Secteur Langues du GFEN

Du latin cum, avec, et operare, faire quelque chose, agir, la coopération « est un mode d’organisation sociale qui permet à des individus ayant des intérêts communs de travailler ensemble avec le souci de l’objectif général. Elle nécessite un certain degré de confiance et de compréhension »4. Selon Sullivan (Snyder et Sullivan, 2008), pour qu’une personne coopère, il faut que soient réunies un certain nombre de conditions : un solide sentiment de confiance envers les personnes engagées, l’assurance qu’elle sera reconnue et qu’elle pourra recevoir du soutien en cours de processus.
Mais ce que je voudrais développer ici c’est la coopération des enseignants, avec les apprenant.e.s et leurs familles, et particulièrement avec celles et ceux qui sont, non pas les plus fragiles, mais celles et ceux que l’école fragilise. Il semble que ce soit à cet endroit que résident un certain nombre de difficultés de taille, selon un bon nombre de recherches et d’ouvrages récemment publiés. J’en citerai, au fil de cet article, quelques exemples qui permettent de corroborer les partis pris que nous mettons en oeuvre au GFEN.

  • Déformons la formation pour qu’elle soit transformatrice !
    Annabelle RODRIGUES, GFEN 67

Cet article s’appuie sur une recherche menée dans le cadre d’un MASTER en sciences de l’Éducation, parcours « Tutorat et Formation d’enseignants », soutenu à l’université de Strasbourg en juin 20226. En tant que PEMF7, j’ai suivi deux constellations, en français, l’une en cycle 2, l’autre en cycle 3, toutes les deux en réseau d’éducation prioritaire.
Que disent les enseignants de la visite en classe ? En s’appuyant sur ce que les enseignants pensent de la visite telle qu’ils l’ont vécue depuis le début de leur professionnalisation, la visite telle qu’ils aimeraient la voir en oeuvre dans la constellation et la visite possible dans le plan français, il me paraît soutenable de mettre en débat la visite au sein de la constellation.

  • Écriture et formation / Écrire en formation
    Michel NEUMAYER, GFEN Provence

C’est à force d’inventer puis animer de nombreux ateliers de formation en milieu professionnel comme sur le terrain des ateliers d’écriture que je me suis interrogé sur ce champ de la formation des adultes largement traversé d’écritures-lectures. Des annonces de stages aux formulaires d’inscriptions, de la formulation des attentes sollicitées ici et là par les formateurs aux évaluations mises en place, le rapport à l’écrit, le lire et écrire en formation semblent aller de soi. Je souhaite ici l’interroger.
De quelles lectures parle-t-on ? De quelles écritures s’agit-il à tel ou tel ou tel moment du processus de formation ? Comment se déclinent-elles ? Que produisent-elles dans l’esprit des « se formants » : soumission aux routines, conscientisations diverses, nouvelles formes d’estime de soi ? À qui s’adressent-elles : aux pairs ?
Si toute formation vise une transformation – pour aller vite « celle d’actes et des pensées » – en quoi le lire-écrire en formation y contribue-t-il ? Comment y gagne-t-on en liberté et développe-t-on de la coopération ?

  • Philosophie et éducation nouvelle dans la formation des enseignant.e.s
    Manuel TONOLO, PRAG Philosophie, membre du secteur Philosophie du GFEN, INSPE de Grenoble, site de Chambéry

Après une vingtaine d’années heureuses à enseigner en Terminale, j’ai commencé en 2003 à intervenir à temps complet dans la formation initiale et continue des professeurs de premier et de second degré à l’IUFM, puis à l’ESPE, et enfin à l’INSPE de Grenoble. Le travail dans la formation initiale des enseignants se révélait alors l’occasion de faire comprendre à ces futurs collègues l’intérêt de la réflexion du GFEN. J’estimais important de montrer à ces étudiantes en formation le gain à retirer de la confrontation d’un contenu rigoureux de savoirs et de questionnements philosophiques avec une pédagogie qui tente de mettre en pratique l’esprit de ces principes afin de pouvoir rendre réellement accessible à tous ce savoir complexe. Voici le témoignage, vingt ans plus tard, de cet engagement en formation des enseignants.

… pour une formation réussie ?
  • Aller vers « quelque chose qui n’existait pas auparavant »
    Évelyne LEDRU-GERMAIN, Professeure d’anglais et formatrice EAFC

En effet, nombreux sont les enseignants qui disent : « Moi, je ne vais pas en formation ». Les raisons invoquées sont majoritairement de deux ordres.
« On nous prend pour des élèves. On nous dit ce qu’il faut faire, en sous-entendant qu’on ne le fait pas, qu’on n’a pas la « bonne recette ». Mais on ne nous donne pas les recettes en question. » Ou bien « On nous met en atelier pour « échanger », mais ça ne sert à rien. On élabore tout seul des supports, mais on ne sait pas si c’est bien ou pas et le formateur repart avec ».
Souvent, les collègues utilisent les deux axes explicatifs, l’un après l’autre. On voit apparaître en filigrane la notion de « bonne recette », de « bon travail », comme si les stagiaires se positionnaient comme des élèves, attendant une validation que le formateur n’accorde pas, ne souhaite pas accorder. Nous sommes là sur un effet de brouillage : quel est le rôle du formateur ? Est-il là pour valider des documents ? Pour transmettre des séquences fonctionnant sur le terrain comme on l’entend souvent en début de formation ?

  • Un outil de formation : le croisement
    Maria-Alice MÉDIONI, Secteur Langues du GFEN

Lors de nos Universités d’été (UE) du Secteur Langues1, que nous organisons chaque année au mois d’août, depuis plus de 14 ans, nous avons l’habitude de proposer quatre ateliers ou démarches par demi-journée. Cela permet d’offrir sur les quatre journées de chaque UE, 12 situations différentes à vivre, en plus de la démarche du premier jour animée en parallèle, pour tout le monde, et l’intervention d’un.e chercheuse.eur que nous invitons à apporter son point de vue sur la question qui fait l’objet de notre UE. Les participant.e.s, chaque jour, doivent choisir entre plusieurs options et se déterminer, soit par rapport à la langue — certains choisissent leur langue de spécialité, d’autres préfèrent « s’étranger le regard » —, soit par rapport au niveau — débutant ou plus outillé —, soit encore par rapport aux différentes étapes du système — primaire, secondaire, supérieur ou formation. Nous tenons à ce foisonnement, reflet de l’activité du Secteur Langues, mais sommes tout à fait conscient.e.s de la frustration ainsi — volontairement — créée.

  • Comment faire entrer tou.tes les étudiant?es dans la lecture de textes complexes ?
    Sophie CRABOS, Université de Toulouse, département de sociologie

Ayant repris des charges de cours à l’Université, j’observais un phénomène nouveau : une minorité d’étudiant.es, représentant, selon les groupes de TD, entre 1/7 et 1/4 de l’effectif, faisait mine de participer activement au cours, mais ne remettait aucun travail. Ces étudiant.e.s pouvaient passer deux ans à l’Université, étant assidu.e.s, voire participant oralement aux cours et travaux de groupes, sans jamais fournir aucun écrit. Or j’animais, entre autres, un enseignement de « Méthodologie du travail universitaire en sociologie », enseignement dont les exigences étaient élevées (quantitativement et qualitativement), il visait à faire entrer les étudiant.es dans les méthodes de la recherche documentaire, la lecture de textes savants, la compréhension de la démarche de recherche en sociologie, ainsi que l’initiation aux outils numériques, tout cela en douze séances de 2 heures.

  • Qu’est-ce qu’une formation réussie ? Côté formé
    Damien SAGE, GFEN 75

Lors du Congrès du GFEN de 2013, Frédérique Maïaux et Yves Béal ont ouvert leur démarche sur la formation de formateurs en atelier d’écriture par cette question : « Donnez un exemple de formation réussie à laquelle vous avez participé. » Cette question m’a sidéré. Je n’ai pas pu répondre. Devant ma sidération, une collègue eut cette remarque : « C’est pas sympa pour les copains du GFEN qui ont animé des démarches auxquelles tu as participé depuis toutes ces années… » J’étais, je l’avoue, bien marri…
Au moment où j’ai commencé à avoir le projet de cet article, j’ai réalisé que le malaise était toujours là. Cela fait plus de 14 ans que je suis au GFEN et la notion de « formation réussie » m’échappe toujours. Et ce n’est pas faute d’avoir vécu des démarches à visée formative, d’en avoir animé et, même, d’en avoir créé. Ce n’est pas faute non plus d’être au quotidien face à des élèves de maternelle et de devoir leur permettre d’accéder à tous les contenus prescrits par les programmes. Ce qui m’échappe, c’est notamment la notion de formation réussie du point de vue du destinataire.

 
Cahier du LIENAu cours de la dernière biennale de l’Éducation Nouvelle qui s’est tenue à Bruxelles en 2022, plusieurs thèmes ont été abordés.
Certains étaient liés à nos pratiques, nos méthodes, et d’autres abordaient des thématiques vives de nos sociétés : écologie / migration / démocratie / égalité des genres / numérique.
Pour ce supplément du LIEN au sein de Dialogue, nous avons questionné les contenus mais au-delà les raisonnements, les méthodes, les démarches, les pratiques.
Deux débats sur les huit proposés par le LIEN sont ainsi questionnés sous l’angle des savoirs :
– Débat 2 : Comment le numérique peut-il être aussi au service de l’émancipation ?
– Débat 8 : Culture scientifique et Questions Socialement Vives d’écologie.

  • L’Éducation Nouvelle face aux défis écologiques
    Catherine LEDRAPIER et Jean-Louis CORDONNIER (GFEN)
  • I.A., intelligence artificielle, apprentissage, instruction et école
    Wallid SFEIR (GBEN)

Extraits Dialogue n° 187

Dialogue n° 187 – Former, se former, ça ouvre des horizons

 
 
Editorial
  • Le GFEN est, intrinsèquement, un mouvement de formation…  Lire l’édito
    Michel BARAËR
Formation… Recherche
  • Former, c’est mettre en recherche…
    Jacques BERNARDIN, président du GFEN

Cet article rapporte une intervention de Jacques Bernardin lors du colloque de l’Association Française des Acteurs de l’Éducation (AFAE), à Guyancourt (78), le 13 janvier 2018.
Les relations terrain / recherche
Si la place de la recherche est indiscutée pour transformer les pratiques de terrain, il n’est pas inutile de dresser un état des relations qui jusqu’ici ont prévalu entre les deux univers pour saisir ce qui peut y faire obstacle.
Des logiques professionnelles différentes
Les enseignants ont pour fonction sociale d’éduquer les jeunes générations dans le cadre d’orientations éducatives périodiquement actualisées, de transmettre la culture patrimoniale que chaque époque juge indispensable, en visant prioritairement – jusqu’au terme du collège – la formation de la personne et du citoyen. Leur quotidien consiste à « faire classe », logique pragmatique exigeant d’assurer la transmission des connaissances à des élèves reconnus « tous capables d’apprendre et de progresser », mais cependant plus ou moins « disposés » à cet égard.
Les chercheurs ont pour fonction sociale de produire des savoirs, des outils d’intelligibilité du réel. Leur quotidien vise à « faire sens », logique réflexive consistant à mettre à distance les phénomènes et situations pour saisir les logiques à l’oeuvre, pour ressaisir la complexité. Ils proposent de nouveaux outils de lecture, interrogent les allant-de-soi, renouvellent les catégories de perception et de jugement.

  • … par la recherche le GFEN est un mouvement de formation et de recherche en éducation
    Jean-Louis CORDONNIER

Notre conviction, depuis les années 80 est « Je cherche, donc j’apprends ». On peut donc affirmer que pour nous, la formation se fait par la recherche.
« Ici, c’est la classe où nous sommes des chercheurs ! » affirme cet élève, chargé de faire visiter le lycée aux parents lors de la journée « portes ouvertes ». Qu’est ce qui fait donc que ma pédagogie amène les élèves à s’y sentir chercheurs, alors que j’enseigne le même contenu que mes collègues ?
Quand j’ai fait mes études de géophysique, je voulais devenir chercheur. En militant au GFEN, c’est ce que je suis devenu, attiré (entre autres choses) par l’accent mis sur la recherche dans tout processus de formation. Un des slogans du GFEN est « Tous chercheurs ». Ainsi, en 1985, l’intitulé de l’Université du gfen à Grenoble : « Je forme les autres ? Non, ils se forment, si je les mets tout de suite, et en permanence en situation de recherche partout, dans tous les lieux ».
Mardi, j’ai cours avec les premières S.

  • Former des formateurs : quand s’auto-former ne suffit pas
    Jacqueline BONNARD

Mais passe-t-on aisément du statut d’enseignant à celui de formateur ? « Faire la classe » ou « animer un groupe d’adultes » est-ce la même chose ? S’agit-il juste de passer d’un public à un autre ? Être repéré comme un enseignant « performant » suffit-il pour devenir un formateur pertinent ?
Quelle est la spécificité du formateur et quelle formation cela présuppose-t-il pour passer d’une posture à l’autre ? Suffit-il de s’auto-former pour endosser le statut ? La proximité permettant d’entrer dans la logique des formés aide-t-elle à construire des formations au plus près des attentes des praticiens ? Quels sont les gestes professionnels spécifiques aux formateurs ?
En m’appuyant sur deux expériences de mise en oeuvre de formation de formateurs, je vais tenter de répondre à ces questionnements.

La formation dans tous ses formats
  • Quels formats de la formation pour le GFEN ?
    Rémy DAVID, Professeur de philosophie à Montpellier, Directeur de programme au Collège international de Philosophie, doctorant à l’UPEC (Laboratoire LIS-EA 4395)

La formation initiale et continue de l’éducation nationale demeure, y compris pour une bonne part de ses concepteurs, relativement opaque à l’époque de l’explicitation affichée des objectifs et des évaluations, et peut paraître à la fois insuffisante quantitativement et inefficace qualitativement. Certains mouvements, notamment ceux de l’éducation nouvelle, construisent leurs propres processus formatifs, en cohérence avec leurs valeurs et leurs aspirations à la fois politiques et éducatives. Quelle place est faite à ces propositions dans le paysage des formations, et quelle spécificité se dégage de cette conception pratique, de cette pratique conceptualisée et problématisée de la formation au sens large du GFEN ?
Au regard du paysage des « formats de formation » que l’on peut dégager à partir d’une recherche en cours sur le rapport à la formation des enseignants de philosophie, il appert que les propositions du GFEN, et plus précisément de son secteur philosophie, sont particulièrement remarquables mais singulièrement isolées et rares.

  • Comment je vis mon métier de formateur informatique en tant que militant d’Éducation Nouvelle
    interview de Bruno ASTULFONI par Michel BARAËR

J’ai rencontré le GFEN en 1984 lors d’un stage à l’école normale de Bonneuil ; j’ai tout de suite adhéré et vécu d’autres stages et universités d’été.
Le secteur Informatique a été créé en 1986, et à l’université d’été GFEN de Grenoble, et nous avons préparé et animé avec Paul Recoursé et Maurice Tamisier la démarche « Inventer un Ordinateur ». Les objectifs de cette démarche étaient de permettre une conscientisation des représentations et de faire évoluer les pratiques individuelles et collectives autour des outils informatiques émergents.
C’est ensuite un processus de recherche à partir d’articles et d’ouvrages sur l’histoire des technologies qui ont abouti à l’informatique telle qu’on la connaît en 1986. (Internet n’existe pas ; c’est le moment du lancement du programme « Informatique à l’école » avec le TO7 ; les réseaux sont essentiellement des réseaux privés au sein d’entreprises ou d’universités avec le début des communications à distance avec le Minitel

  • Pourquoi nous ne formons pas aux arts plastiques…
    Hélène COHEN SOLAL

Dans le cadre d’une formation organisée par la Délégation régionale académique à la jeunesse, à l’engagement et aux sports (DRAJES) de Nantes, j’interviens avec deux ateliers dans une formation ouverte aux animateurs, bibliothécaires, artistes, écrivains, bénévoles… appelée « Ateliers d’écriture, Pratiques et recherches ». L’un des ateliers que j’avais proposés dans le cadre d’une commande sur « écrire avec les arts plastiques » est axé sur l’appropriation d’outils d’invention d’atelier. Je défends l’idée, dans les stages du secteur, que c’est au coeur de nos enjeux. La part de didactique de la matière relative aux savoirs et aux savoirs faire peut être suspendue dans nos ateliers de formation pour développer une exploration de la démarche même.

  • Parcours dans les Dialogue sur la formation

    Cinq numéros de Dialogue ont déjà porté sur la formation :
    numéro 30 « La formation en jeu Enjeu de la transformation », de décembre 1978
    numéro 75 « Sortir du cadre Formation », de juin-juillet 1992
    numéro 99 « Formation : normalisation ou émancipation ? » de mars 2001
    numéro 122 « Formation : alternance ou alternative ? » d’octobre 2006
    numéro 159 « Conformer ou transformer ? Enjeux des formations » d’octobre 2015.

Pour maintenir l’exigence

  • Principes, valeurs et pratiques du GFEN dans la formation des étudiant.e.s et notamment des futur.e.s.enseignant.e.s
    Geneviève GUILPAIN

Comment faire vivre nos valeurs, convictions dans des pratiques efficaces lorsqu’on travaille auprès d’un public d’étudiant.e .s ? Les enjeux et difficultés sont-ils les mêmes qu’avec un public d’élèves ? Devons-nous adapter nos pratiques ? Découvrons-nous d’autres opportunités ? Voici quelques-unes des questions que nous nous sommes posées qui nous ont conduit à proposer quelques témoignages précédés d’une présentation de nos lignes de convergence et préoccupations communes.
Comment lutter contre les inégalités, s’ajuster, porter une attention à la progression des apprentissages, et aux étapes nécessaires, sur le long terme afin que les étudiant.e .s qui forment un public d’une hétérogénéité chaque année plus accusée s’approprient savoirs et savoir-faire ? Comment lutter contre l’inégalité des étudiant.e.s dans un système de plus en plus ségrégatif qui ne fonctionne que pour les plus performants ? Comment notamment faire acquérir des compétences d’analyse de textes complexes lorsque la lecture ne relève plus d’un habitus partagé, alors même que les épreuves d’examen ou de concours sélectionnent sur le critère des compétences de lecture experte ?

  • Former des enseignant.e.s aux contradictions du métier
    Interview de Jean BERNARDIN par Laurent CARCELES

Laurent Carceles : Pourquoi la formation est-elle une priorité du GFEN ?
Jean Bernardin : Il ne peut y avoir, à mon avis, de véritable transformation sociale que si les citoyens pensent qu’un autre type de société est possible. Une société qui reconnaît et respecte l’humain dans chacun, quelles que soient ses origines, sa situation sociale, son histoire personnelle, ses convictions…
Cela s’apprend dans les divers lieux de socialisation qui construisent le développement des futur.es citoyen.nes, et en premier lieu l’École.
Il y a donc urgence à « révolutionner » l’École et donc la formation des enseignant.es.
Deux conditions essentielles :
Une définition claire des enjeux politiques assignés à l’École.
Une transformation des enjeux et pratiques de la formation

  • Justice pour les classes technologiques ?
    Jean-Charles ROYER

A la suite d’une proposition de l’IPR, j’ai intégré dès octobre 2021 une équipe de profs de philo afin que nous produisions ensemble des « ressources » à destination des jeunes collègues qui éprouveraient des difficultés à prendre en main les classes technologiques. Tel était le projet initial, plutôt flou dans ses modalités pratiques, mais néanmoins bienvenu, tant l’enseignement dans ces classes est peu pris en compte. Il s’est avéré assez vite qu’il ne s’agirait pas, comme j’avais pu l’espérer, de proposer des formations « en présence » afin que d’éventuelles « démarches » d’apprentissage puissent « être vécues », comme nous avons l’habitude de le dire, mais de produire des ressources numériques en ligne sur le site du ministère ! C’est alors qu’une série de doutes m’est apparue. Ce qui suit vise à formuler ces doutes, et à dire mes réponses à ce jour.

  • Le GFEN, c’est sûr, ça débloque !
    Joëlle CORDESSE, Professeur d’anglais, co6fondatrice en 1983 du Secteur Langue(s) et de sa revue Dialangues, et en 2001 des Labos de Babel. Docteure en sémiotique et communication, spécialiste de sémiotique peircienne

Mai 1982, à l’école Makarenko d’Ivry, je participe à mes premières Journées d’études du GFEN (il y en aura peu par la suite, Arcueil, Vendôme). Elles sont consacrées à la formation accélérée d’équipes pouvant proposer et animer des stages en Institution. Ces stages s’intitulent « Tous capables ! ». Ils durent 3 jours, et nous en construisons ensemble la grille type, à peu près immuable, à base de démarches des Allumettes, des Attentes, du Jeu de l’île, et d’un atelier d’écriture / de création. En entrée de stage, une démarche « Tous capables » dans une matière où les personnes se vivent a priori comme en échec, et vont vivre la surprise de se retrouver en réussite. En sortie, quelque chose autour des outils, des projets, des stratégies, où prendront place par la suite, par exemple, des démarches Sosie. Le GFEN a construit l’outil grâce auquel il devient formateur de formateurs : la démultiplication de sa capacité d’intervention dans les lieux de formation va permettre de diffuser largement les pratiques, attirer de nouveaux adhérents, agir sur la transformation des mentalités.

Cahier du LIEN
  • Susciter le débat ? Construire le débat ? Pourquoi débattre en Éducation Nouvelle ?
    Joëlle CORDESSE

Les langues-cultures, un moteur d’émancipation et de renouvellement pour l’Éducation Nouvelle ?
Comment travailler ensemble quand on ne parle pas la même langue ? En quoi est-ce une question pour l’Éducation Nouvelle et son développement ?

  • Quelles relations entre recherches et mouvements pédagogiques ?
    Étiennette VELLAS et Yves REUTER
  • « Pour une société inclusive »
    Soraya GUENDOUZ et Michel NEUMAYER

Extraits Dialogue n° 186

Dialogue n° 186 – Quand l’esprit critique

Sommaire

Éditorial
  • Contre l’obscurantisme, la lumière de la connaissance ? Quand l’esprit critique !  Lire l’édito
    Patrick RAYMOND
Critiques dès le jeune âge ?
  • Prendre soin de l’arbre…
    Sophie REBOUL, GFEN 25

L’école, dès la maternelle, est un espace pour grandir, pour apprendre, c’est un lieu de démocratisation et d’émancipation individuelle et collective.
Sous un regard ambitieux où l’on considère que les très jeunes élèves peuvent entrer dans la complexité du monde, il paraît incontournable d’apprendre à développer leur esprit critique. Mais comment ? Ils sont encore très égocentrés, possèdent des connaissances limitées, la compréhension de certaines notions leur sont encore inaccessibles…
Il s’agit alors, tout en tenant compte de l’âge des enfants, de leur apprendre à changer de regard, à se mettre en questionnement, ne pas prendre pour acquis définitif une affirmation, bousculer sa pensée personnelle, approfondir ses connaissances…
Cette posture est réalisable dans tous les domaines, de nombreuses pratiques GFEN le démontrent !

  • « Faire des sciences » ou former des chercheurs dès l’école maternelle ?
    Jacqueline BONNARD

Toutes les études montrent une désaffection des filières scientifiques ou technologiques lors de l’orientation après la classe de troisième ou de 2nde . Ce constat est corroboré par les résultats des évaluations internationales telles que TIMSS. […] Comme en 2015, les élèves Français se retrouvent en bas du tableau des 58 pays participants, leur score ayant encore baissé par rapport à la moyenne des pays de l’UE et de l’OCDE.
Les disciplines scientifiques seraient-elles synonymes d’ennui ou de difficultés à en comprendre le sens ou la finalité pour une majorité d’entre eux ?
Comment expliquer cette situation récurrente malgré des programmes qui instituent de façon obligatoire une initiation scientifique dès l’école maternelle ? Ces savoirs seraient-ils trop complexes à aborder avec de jeunes enfants et suffirait-il d’une simple initiation basée sur des expérimentations et/ou manipulations pour en donner le goût ?

  • Maternelle, littérature jeunesse et esprit critique : quand l’évidence ne va pas de soi
    Damien SAGE, GFEN 75

Est-il possible de travailler l’esprit critique dès la maternelle ? À l’âge où les élèves sont encore en train de construire leurs « premiers » rapports au langage et au monde, est-il pertinent d’essayer de leur faire prendre conscience de la potentialité réflexive du langage, de son pouvoir de mise à distance de ce qui se présente comme une évidence ?
Tout dépend de la représentation que, nous, enseignants, nous avons de la construction du langage par les jeunes enfants. Si l’on adhère à une vision que je me permets de qualifier de « séquentielle » de la construction du langage où l’enfant doit d’abord construire le langage en situation avant de pouvoir construire le langage d’évocation pour, plus tard, construire le langage pour penser, alors l’ambition décrite précédemment peut sembler démesurée. Sauf à considérer qu’il est aussi possible de penser une construction en parallèle des différentes fonctions du langage, le développement de l’une permettant d’accroître le développement des autres.

  • Échanges critiques entre élèves au quotidien : quelle place pour l’enseignant ?
    Sophie NONET

Comme le rappelle un texte d’Eduscol en 2016 : « L’esprit critique, c’est à la fois le principe et la finalité de l’école :
Principe : car on ne peut éduquer que des esprits libres et critiques : sans esprit critique, à proprement parler, un élève s’informe mais ne se forme pas. […]
Finalité : la visée de tout enseignement – quel que soit son objet – est bien de cultiver l’esprit critique […]
Mais à l’heure actuelle, seuls 29 % des professeurs des écoles français donnent fréquemment des exercices obligeant à développer l’esprit critique contre 65 % en Espagne ou 36 % en Suède selon le compte rendu de l’enquête internationale sur l’enseignement et l’apprentissage.
Maintenant le travail de l’enseignant-chercheur commence : Comment créer les conditions de l’exercice de la pensée critique dans la classe ?

 
Histoires de penser critique
  • L’esprit critique à l’épreuve du complotisme
    Geneviève GUILPAIN, secteur philosophie du GFEN

En août 2021, le secteur philo a proposé un stage s’intitulant « Complotisme : une pandémie mentale ; l’idéal du rationalisme en question ». Le complotisme ! Morceau de choix pour travailler l’esprit critique, dira-t-on ! Certes mais cela ne vaut qu’à condition de s’affranchir d’une pensée simpliste qui distinguerait, par anticipation, le sujet raisonnable exerçant de façon mesurée une pensée critique toute légitime, des « mauvais sujets » critiquables car plongés dans l’hubris du doute et du soupçon. La présentation de notre stage mettait déjà en garde contre une telle approche caricaturale du complotisme.
Une recherche éperdue de critères efficients.

Quelques réflexions pour poursuivre…
Nicole GRATALOUP

Je précise d’emblée que je n’étais pas au stage dont le texte de Geneviève rend compte, mais la lecture de ce texte m’a amenée à quelques questions et réflexions que je livre ici, en espérant que peut-être les absents n’ont pas toujours tort…

 

  • Au rayon des savoirs cassés
    Jean-Louis CORDONNIER

Je n’aime pas l’expression « esprit critique ». Elle est souvent une position d’arbitre plutôt que de joueur de terrain, quand elle n’est pas celle de spectateur critiquant (parce qu’il aurait fait mieux). J’y préfère la pensée politique qui met en relation pour proposer une lecture située, voire engagée. Les deux livres ci-dessous sont deux vastes fresques qui proposent deux lectures politiques, alternatives à l’histoire telle qu’on nous la raconte. Deux livres briseurs d’idées reçues qui foisonnent d’anecdotes détaillées sur des faux-savoirs : « j’ai toujours cru que… mais en fait… ». Beaucoup de nos démarches d’auto-socio-construction sont en réalité d’auto-socio-destruction. Ces deux livres sont une mine pour construire des démarches en histoire des sciences et en anthropologie.

  • Apprendre, c’est critique…
    Jean-Jacques VIDAL

Quand on apprend, que se passe-t-il ?
Les apprentissages élargissent-ils les connaissances en s’ajoutant à des savoirs déjà présents ? S’agrègent-ils à des savoir-faire déjà là en les enrichissant, les rendant ainsi plus efficaces ? Ou recouvrent-ils les acquis au point de les enfouir et de compromettre la possibilité de les utiliser ? Des pratiques procédurales trop tôt installées, sans tenir compte des appétences et dispositions individuelles, sont-elles délétères ?
Tout apprentissage est un processus potentiellement déstabilisateur. Gaston Bachelard l’a démontré dans La formation de l’esprit scientifique.

  • Des outils pour penser
    Sandrine BREITHAUPT, Groupe Romand d’Éducation Nouvelle

En regard des courants s’attachant à la Pensée critique, cet article est une invitation à entrer dans la pensée foisonnante et fascinante de Lev Vygotski (18961934), fondateur de la perspective historico-culturelle. Comme beaucoup d’autres au début du XXe siècle, Vygotski cherche à comprendre les rapports entre individus et société, entre esprit et matérialité, entre pensée et langage. Il cherche à dépasser certaines représentations premières du développement de la psychologie d’alors. En tant que formateur d’enseignant·e·s, il s’attachera également à saisir le rapport entre apprentissage et développement des enfants.

Un engagement du quotidien
  • Quand l’esprit crie et tique
    Sandrine LEROU, Professeure d’histoire-géographie et EMC en collège

Madame, on parle aujourd’hui ? ». Quand ils me disent cela, je dois dépasser mon « moi-prof-intérieur » car je me dis toujours : ils pensent que parler, ce n’est pas « faire cours », comme ils disent….. Et pourtant, ce « Madame on parle ? », vient bien des séances d’éducation civique telles que je les aies conçues. Au bout de quelques mois cela devient : « Madame, là faut vraiment qu’on parle ! », ou « Madame on peut parler à un moment dans la semaine ? ». Tout y passe ou presque ! Parfois on me demande des confirmations d’information pour entamer la discussion : « C’est vrai que… ? », ou nous voila juristes : « on a le droit de…. ? ». Depuis quelques années, leurs questions me surprennent de plus en plus. Nous n’avons plus, eux et moi, les mêmes sources d’information, les réseaux sociaux les conduisent vers le trash, le glauque, les ténèbres.
Alors, on parle.

  • Construire l’esprit critique en décloisonnant les disciplines : lire un roman de chevalerie en classe de 5e
    Manon RUBILONI, Professeure de français au collège

Ce réinvestissement d’une démarche GFEN pour un cours de français portant sur Yvain ou Le Chevalier au Lion part d’un constat. Les élèves de cinquième, bien qu’étudiant la période médiévale en cours d’histoire, reproduisent un cloisonnement entre les disciplines. Ils ne parviennent que difficilement à déconstruire une séance de lecture en s’appuyant sur leurs connaissances historiques acquises en cours d’histoire lors de séances abordant le thème II du programme Société, Église et pouvoir politique dans l’Occident féodal (XIe-XVe siècles). Ainsi, lors des séances de lecture analytique, les élèves se contentent trop souvent d’appliquer des modèles et des schémas d’analyse littéraire appris tout au long du cycle 3 de français, sans se servir des outils et des connaissances historiques qu’ils possèdent. Cela les mène à des analyses littéraires incomplètes, « simplistes » voire erronées. De surcroît, cet obstacle empêche les élèves de saisir les enjeux littéraires de textes médiévaux dans leur intégralité. Il les prive également de motivation et d’un plaisir intellectuel : celui de pouvoir relier les disciplines entre elles et d’accéder à un savoir anthropologique et littéraire en partant de leurs connaissances et en mobilisant leur esprit critique.

  • René Descartes avec des 4e Une pratique pour l’esprit critique
    Laurent CARCELES, professeur de français et formateur d’enseignant.e.s

L’année de 4e est une année où les élèves ont à construire de manière plus approfondie ce que sont l’explication et l’argumentation. À cette charnière, les matières scientifiques insistent sur démonstration, expériences, protocoles… tout ce qui fait passer la personne qui écrit et/ou qui lit de la compréhension, l’invention d’un imaginaire aux moyens de décrire et partager le plus précisément la réalité. Cette charnière rejoint l’histoire littéraire et l’aventure humaine des savoirs : c’est autour du XVIIe siècle que le rôle du savant a progressivement cédé la place au scientifique ; fort de méthodes et outils développés.
La démarche que je présente est issue d’interrogations personnelles et de plusieurs années d’enseignement pour des 4es. En 2016, nourri de compréhensions partagées au sein du GFEN Île de France, j’ai voulu trouver un texte que je pourrais étudier avec les élèves et qui représenterait ce XVIIe siècle que l’historien des sciences Alexandre Koyré a présenté comme le passage du monde clos à l’univers infini. Il n’hésite pas, d’ailleurs, dans cet ouvrage, à qualifier cette période de « révolution scientifique ».

Pour du politique dans les écoles
  • Avec les jeunes : former à l’esprit critique
    Colette CHARLET

C’est une problématique qu’il est urgent de mettre en travail, en cette période de désespérance, où l’on a du mal à ouvrir des perspectives, construire le dialogue et le questionnement, en particulier avec les jeunes. Mon investissement au sein d’un mouvement de jeunesse et d’éducation populaire, ma lecture de l’oeuvre de Korczak, m’ont permis de mieux comprendre ce qui se joue dans la complexité des « règles de la vie », afin d’imaginer un monde plus juste et solidaire. Des occasions m’en ont été données à la fois avec des jeunes de lycées et collèges du bassin d’Annecy lors des Semaines nationales contre les discriminations et le racisme et avec des jeunes responsables du mouvement de scoutisme laïque des Éclaireuses, Éclaireurs de France (EEDF).
Que faire face aux constats alarmants dans les établissements du secondaire ?

  • « Panique à Plougartel-les Pins ». Construire une démarche pour former à l’esprit critique
    GFEN 75

[…] en cette période, post confinement où le recours à la télévision, aux médias, ou aux réseaux sociaux est massif, l’Ecole se doit d’accompagner les élèves vers une réflexion. Dans une étude d’IPSOP de mars 2022, le temps devant écran pour les moins de 6 ans est de 6 heures par semaine et pour les 7-12 ans il est de 9 heures en moyenne par semaine. C’est particulièrement l’usage d’internet via des plateformes de streaming et replay qui a augmenté. Outre les dangers d’une forte consommation d’écran sur la concentration et le développement neurologique, nous regrettons que ces informations soient souvent dénuées d’analyse critique, de mise à distance. Nous sommes partis de ce postulat pour amener nos élèves à penser l’information. Dans cet article, nous définirons ce qu’est pour nous, l’esprit critique, en quoi il anime notre démarche. Nous relaterons les discussions autour de la construction d’une démarche : comment se faire un avis, débattre, écouter et trouver un accord. Et pour finir nous reviendrons sur notre premier atelier, animé devant les collègues du GFEN Ile de France.

  • La politique à l’école ?
    Maria-Alice MEDIONI, Secteur langues du GFEN

L’école serait le sanctuaire de la neutralité et l’enseignant, au nom de la laïcité, se devrait d’éviter, dans son enseignement, tout sujet religieux ou politique. Cette croyance, bien répandue, reflète un certain nombre de confusions, d’ignorances et d’incompréhensions : confusions, par exemple, entre laïcité et neutralité, entre laïcité et tolérance ; ignorances quant au lien étroit entre les débats politiques dans la société et les programmes scolaires ; incompréhensions ou difficulté à penser le lien entre éducation et valeurs morales, entre les orientations, voire les injonctions, éducatives — les « éducation à », la formation de l’esprit critique, etc. — et les choix politiques qu’elles révèlent.
La classe enseignante, tétanisée par ces injonctions et ces interdits, serait condamnée à l’évitement de tout sujet politique qui viendrait polluer l’esprit des élèves, afin de les protéger de tout endoctrinement : « protéger l’enfant contre la politique, c’est le protéger contre quelque chose d’impur » (Percheron, 1993 : 8).
L’école comme machine à (con)former
Pourtant, l’école a toujours eu comme mission de « former les esprits ».

Cahier du LIEN
  • Construire l’Éducation Nouvelle en Pologne
    Colette CHARLET (GFEN)

Construire l’Éducation Nouvelle en Pologne, ce combat a pris de l’ampleur dès le début du XXème siècle, pour faire face aux injustices sociales et discriminations.
Face au prolétariat errant dans les rues pauvres des grandes villes comme celle de Varsovie, il n’est pas étonnant que des intellectuels, médecins et travailleurs sociaux se soient mobilisés sur différents champs posant alors les fondations d’une éducation nouvelle moderne, défendant aussi les droits de toutes sortes, en particulier ceux des enfants.
Il ne faut pas aussi oublier la question latente de l’antisémitisme dont furent victimes des millions de personnes.
Voici mon témoignage.

Extraits Dialogue n° 185

Dialogue n° 185 – Enrayer les mécanismes d’exclusion

Sommaire

Éditorial
  • Contre ce(ux) qui exclue(nt !)   Lire l’édito
    Le collectif de rédaction du numéro
Des volontés d’équipes…
  • Un projet collectif en lycée professionnel : Tous en bac pro !
    Jacqueline BONNARD, accompagnateur MAIPE de l’académie d’Orléans-Tours

Cet article relate la genèse d’un projet visant à faire d’une filière souffrant d’une image de relégation un marchepied pour réussir quand même ses études. Il s’appuie sur les notes prises lors de l’accompagnement de ce projet ainsi que sur le bilan rédigé par les porteurs de l’action. Quand l’équipe « Productique » décide de cesser les aides individualisées, de se recentrer sur les savoirs et de se la jouer collectif (côté élève/côté prof), elle se lance un défi : « Tous en bac pro ! ». Portée par ce défi et la force du collectif, c’est une des aventures professionnelles les plus marquantes qu’il m’ait été donné de suivre.

  • Kennedy-Kergomard
    Jean-Jacques VIDAL

De part et d’autre d’un boulevard à quatre voies qui, dans les années soixante, contournait Besançon de manière nouvelle, et qui est aujourd’hui « en ville », les différents quartiers se succèdent, mais les secteurs qu’on longe en voiture ou en bus sont très différents selon qu’ils sont d’un côté ou de l’autre : classes moyennes dans des maisons ou petits immeubles, catégories populaires « issues de l’immigration » en face dans d’autres immeubles, souvent rénovés ou remplaçant d’anciennes barres démolies, dont on a contraint les habitants, parfois eux-mêmes très anciens, à déménager. […] Au début des années 2000, quand nous devenons directeurs de deux écoles maternelles très proches mais séparées par ce boulevard, Benoît et moi nous retrouvons avec des populations scolaires très différentes : à 300 m l’un de l’autre, le clivage saute aux yeux.

  • Repenser l’espace « cour de récréation »
    Pascale BILLEREY  GFEN 25 et Maud DELSART Directrice d’école élémentaire

Comment, dans nos classes, ne pas faire vivre les différences comme des inégalités ? Un reportage sur un aménagement de cour de récréation pour lutter contre la marginalisation des filles.
F ace aux défis climatiques, écologiques et sociaux, l’espace urbain devient un lieu d’expérimentation qui doit permettre à chacun de vivre mieux dans un environnement adapté à ces nouveaux enjeux.
Bien entendu, repenser l’espace scolaire en fait partie : c’est un facteur d’intégration à la vie sociale où l’on va apprendre à vivre les uns avec les autres. La cour de récréation est l’un des lieux fondateurs de construction de sa citoyenneté, de développement de sa relation aux autres et c’est loin d’être anodin au vu du nombre d’heures passées dans une cour de récréation ! « Les cours de récréation illustrent la sexuation des espaces de loisirs et jouent le rôle de lieu d’apprentissage des normes et des rôles de sexe.»

  • À l’école de l’anthropologie
    interview de Jean-Loïc LE QUELLEC par Claire BENVENISTE

Le projet Thélème au lycée Le Corbusier à Aubervilliers
Compte tenu des difficultés rencontrées tant au niveau de l’investissement dans la scolarité que de la maîtrise de la langue, l’équipe du lycée Le Corbusier a mis en place des actions fortes. Les effectifs de seconde sont limités à 19 élèves et une après-midi par semaine est banalisée pour que les élèves puissent s’inscrire dans des projets « Arts, Sciences et Culture » (ASC1 ). C’est ainsi que pas moins de 680 élèves participent à des actions culturelles depuis quatre ans, avec la possibilité de suivre le même projet pendant toute leur scolarité au lycée.

… pour inclure des possibles…
  • Écrire sa minibiographie, une fierté d’utilité publique
    Pascale LASSABLIÈRE, Animatrice d’ateliers d’écriture, Militante avec le Groupe Belge d’Éducation Nouvelle et le Lien International pour l’Éducation Nouvelle

La chaîne des savoirs est une association qui agit pour que l’on reconnaisse la réalité des personnes illettrées et lutte pour un accès au savoir tout au long de la vie. Elle est constituée d’un ensemble de « maillons »1 qui rassemblent une soixantaine de personnes en situation d’illettrisme, les « ambassadeurs », et une vingtaine d’ « accompagnateurs », formateurs salariés ou bénévoles, assistants sociaux, employés de Centres de Ressources Illettrisme…
Ce réseau s’est constitué suite à une formation-recherche-action menée par Anne Vinerier en 2001 dans le but de comprendre pourquoi les personnes en situation d’illettrisme ne s’inscrivent pas dans les organismes de formation pour (ré)apprendre à lire, écrire et compter.
En 2017, La chaîne des savoirs me demandait de penser un projet d’écriture dans le cadre d’une action soutenue par la Fondation de France. Les objectifs étaient de mettre en lumière les causes structurelles de l’illettrisme, de permettre aux rédactrices et rédacteurs de situer leur histoire dans un contexte global, et d’outiller le réseau pour développer des dispositifs de sensibilisation.

 

  • En SEGPA, apprendre pour socialiser
    Emmanuelle HAMEZ, Professeure des écoles

La socialisation est-elle le préalable aux apprentissages ? Ou est-ce par, et dans les apprentissages que les élèves vont pouvoir se socialiser, « faire ensemble », accueillir la « faiblesse » de l’Autre ? C’est cette seconde piste que j’ai explorée avec mes élèves de SEGPA dans le cadre d’un projet culturel et artistique : comment d’une classe « difficile », agglomérat d’individualités aux relations conflictuelles, on a avancé dans la construction d’un collectif davantage coopératif, respectueux, mieux engagé dans des apprentissages, jusqu’à devenir pour certains élèves des passeurs de culture dans leur famille.

  • Complexité des dispositifs d’accueil particuliers
    Jany VIDAL, GFEN 25

il y a quelques décennies, les élèves récemment arrivés en France qui ne comprenaient pas ce qu’on disait à l’école, perturbateurs pour le déroulement immuable de la classe car ayant besoin d’une attention particulière, étaient fréquemment « foutus dehors » par les maîtres, et certains ont passé dans les couloirs des heures chaque jour, seuls. Aujourd’hui, on propose des itinéraires d’accompagnement, en principe choisis et mis en place après un examen attentif des situations, en accord avec les familles.
L’inclusion est ainsi affichée, mais comment se passe-t-elle ? Et on doit faire les mêmes constats au regard des élèves présentant des troubles de mémoire de travail, des fonctions cognitives ou sociales.

… selon des normes revisitées

  • « L’école à l’épreuve de la complexité »
    Andreea CAPITANESCU BENETTI

J’ai récolté les commentaires des auteures Margarita Sanchez Mazas, Geneviève Mottet, Nilima Chankakoti et Aneta Mechi à propos de l’ouvrage qu’elles ont coordonné L’école à l’épreuve de la complexité : Radicalisation, altérité, reconnaissance, L’Harmattan (Paris, 2021).
L’ouvrage est issu des 3èmes Rencontres du Réseau International Éducation et Diversité (RIED) qui se sont tenues à Genève les 181920 juin 2018. Ce colloque abordait des « questions vives », des problèmes rencontrés par les acteurs scolaires au quotidien et qui suscitent tensions, crispations ou sentiments d’impuissance. Souvent polémiques, les thèmes de la « radicalisation », de la scolarisation des enfants réfugiés, de la discrimination ou encore du plurilinguisme s’inscrivent dans un contexte général marqué par des peurs et de la méfiance peu propices à leur traitement sous l’angle pédagogique. Le jugement de valeur par rapport à d’autres normes, d’autres coutumes, d’autres manières de faire positionne le regard du côté négatif avant même de connaître la personne, avant de l’entendre, de la voir, de la rencontrer.

  • Sujets ou hors-sujets ?
    Joëlle CORDESSE, membre du Bureau National et du collectif International du GFEN, responsable des Labos de Babel, professeure d’anglais, docteure en sémiotique et communication »

Si vous ne voulez rien écrire, n’écrivez rien. C’est tout à fait votre droit. Vous n’aurez qu’à afficher votre feuille vide avec les autres, elle signifie quelque chose et c’est bien de le dire à tout le monde et pas seulement à moi. »
Je choisis cette anecdote parce que c’était la première fois que j’osais réagir de cette manière, dans un stage institutionnel, à un refus de produire.

Cahier du LIEN

  • Cent ans d’Éducation Nouvelle pour créer une ère nouvelle !
    Diana DRAGHICI, Walid SFEIR (GROEN), Étiennette VELLAS (GREN)

Ce supplément du LIEN puise dans le numéro spécial 2021 de la revue suisse romande du Syndicat des enseignants, l’Éducateur. Il évoque l’Éducation Nouvelle, à travers un de ses mouvements, la Ligue Internationale pour l’Éducation Nouvelle, ses cent ans d’histoire(s), les implications qu’elle provoque toujours aujourd’hui sous de nombreuses latitudes, les endroits où elle a transformé l’enseignement. Il met l’accent sur « Convergence(s) pour l’Éducation Nouvelle », cette dynamique actuelle, s’appuyant sur ses valeurs fortes, son ambition humaniste toujours élevée au service d’une éducation qui se réinvente en permanence. De ce numéro, que j’ai eu le plaisir de coordonner, nous reprenons ici diverses réflexions qui traitent de quelques jalons de l’histoire de cette Éducation Nouvelle.

Extraits Dialogue n° 184

Dialogue n° 184 – 100 ans d’Education Nouvelle. Cultiver l’à venir

Sommaire

Éditorial

  • L’Éducation Nouvelle, aujourd’hui si précieuse   Lire l’édito
    Michel BARAËR et le collectif de rédaction du numéro
Pour hâter la venue du printemps
  • La Commune de Paris (1871) a-t-elle un avenir pédagogique ?
    Pascal DIARD

2021, année des 150 ans de la Commune de Paris. 2021, année du centenaire de l’Éducation Nouvelle. Une concordance des temps qui prête à ré flexion sur l’art et la manière pédagogiques de présenter un événement historique majeur à la compréhension de toutes et tous. Et de s’interroger sur la légitimité de la posture de praticien chercheur pour définir le travail de militant de l’éducation nouvelle.
Les origines d’une démarche (sept 2005)
Saisissant l’occasion d’un stage de rentrée du GFEN Île de France, je pars d’une idée de professeur d’histoire pour construire un scénario pédagogique sur la Commune de Paris.

  • Ici et ailleurs, quelle éducation nouvelle à une géographie citoyenne ?
    Interview de Gatien ELIE par Pascal DIARD (et dans le supplément en ligne)

Qu’est ce que la géographie (qui interroge le rapport à l’espace, le rapport au mondial) peut apporter au GFEN aujourd’hui et réciproquement ?
Ce que le GFEN m’apporte en tant que professeur de géographie, ce sont d’abord des pratiques d’enseignement, des pratiques pédagogiques, en par ticulier la découverte du jeu de rôle qui a été la colonne vertébrale de ma démarche « développement durable, développement impossible ? » .
On dit souvent au GFEN qu’il faut « faire revivre l’histoire des savoirs », ici il s’agit de « faire vivre des situations géographiques » aux élèves pour leur faire prendre conscience des conflits de territoires, des représentations contradictoires et des intérêts divergents qui s’y agrègent, des enjeux politiques et sociaux. Autrement dit faire vivre une dialectique du rapport à l’espace géographique. La question de la construction de l’abstraction que pose le GFEN dans la construction du savoir a été pour moi, en tant qu’enseignant, une grande rupture.

  • Sur le fil… de la marge
    Le secteur philosophie du GFEN

Qu’est ce qui fait du secteur philosophie du GFEN un lieu si particulier, si précieux aussi, en tout cas pour celles et ceux qui s’y tiennent durablement, et qui y trouvent manifestement ce qu’ils cherchent ailleurs parfois en vain ? Le groupe que forment les membres du secteur philo, qui a bien sûr évolué, qui s’est renouvelé avec le temps, conserve malgré tout, depuis 30 ans une spécificité qui est à la fois évidente intuitivement, et assez difficile à caractériser précisément.
Nous tenterons ici de proposer quelques pistes pour dire ce que représente le secteur, et le rôle qu’il joue, pistes puisées dans son histoire, et dans nos expériences partagées. Ces hypothèses ont en commun l’idée d’un équilibre instable : entre l’institution et son «dehors», au cœur d’un croisement entre politique, pédagogie et philosophie, entre l’exigence maintenue d’une certaine normativité (au sens où nous n’opérons pas de rejet de la norme scolaire) et l’écueil d’une normalisation stérile (ou standardisation des compétences).

  • Quatre couleurs d’éducation nouvelle. Les nuances de gris, on laisse ça à d’autres
    Un adhérent du GFEN

Aujourd’hui Monsieur Sapoge va au CHIEN (Collectif Hybride et Intergalactique de l’Éducation Nouvelle). Quatre nouvelles planètes viennent d’adhérer à cette Ligue galactique et Sapoge est impatient de faire connaissance avec les pratiques et les valeurs pédagogiques que vont exposer les quatre intervenants.
ARGOS et l’école des argonautes : Ulysse, ouvre la séance avec la présentation de l’éducation sur Argos, sa planète. Dès l’introduction, on sent qu’on a affaire à une femme qui a les pieds sur terre, bien enracinés. Des pommettes qui exhibent une ardeur à vivre, deux fossettes qui révèlent une belle humeur. Et un front cabochard qui impose une force têtue prête à affronter avec joie l’adversité.

Un futur déjà là

  • L’Éducation Nouvelle : un pouvoir d’étonnement toujours intact
    Geneviève GUILPAIN, enseignante de philosophie, formatrice à l’INSPE de Créteil (site de Livry-Gargan)

Un temps suspendu – Depuis quelques années, deux ou trois groupes d’étudiant.e.s chanceux/ses ont droit à un moment suspendu dans la formation marathon qu’est devenu le master Métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation.
Soit seule, soit en compagnie de Pascal Diard,enseignant détaché au GFEN, ou encore en coanimation avec une collègue « freinétique », je leur propose une douzaine d’heures de pratiques et réflexions gfenistes. Une formation en immersion totale où l’on n’est pressé ni par le temps, ni par l’évaluation, parce qu’on annonce d’emblée que « chacun.e sera largement validé.e dès lors qu’il/elle s’impliquera activement dans le travail ». Il est arrivé aussi que nous leur proposions une recherche par petits groupes portant sur une question soulevée au cours de ces deux journées (« À quelles conditions une formation peut elle être formatrice ? Quel rôle l’éducation nouvelle attribue t elle au jeu ? Qu’apporte le travail de groupe ? … »).

  • « Re-créer en s’émancipant progressivement de ses conceptions anciennes »
    Questions à Jean BERNARDIN par Laurent CARCELES

Jean Bernardin a été enseignant. Il est aujourd’hui un formateur du GFEN qui partage des ressources et des approches, avec le souci permanent de tenir ensemble objectivation théorique et les réalités concrètes les plus pratiques. Il a réinvesti et conçu plusieurs démarches. Celles-ci nourrissent les parutions du GFEN 28 en particulier, et le mouvement dans son ensemble.
Jean Bernardin, vous dites souvent que le savoir est la seule chose qui rend plus riche quand on la partage, pouvez vous nous expliquer pourquoi ?
C’est Jean Yves Rochex qui avait l’habitude de dire qu’à l’inverse des marchandises le savoir s’accroît d’être partagé. Affirmation qui me semble s’accorder tant sur le plan de l’histoire de l’humanité que sur le plan de la construction du sujet et qui interroge le double sens du mot « savoir » : à la fois contenu qui a déjà été élaboré par les générations qui m’ont précédé et processus de construction de cet objet par un sujet.

  • Du silence en pédagogie…
    Michel NEUMAYER

Au-delà de la pensée des poètes, je voudrais revenir dans ce troisième numéro des « 100 ans d’Éducation Nouvelle » sur la notion de « question » en pédagogie et interroger sa place en Éducation Nouvelle, face aux défis d’un futur incertain.
Je veux briser le carcan du « questionner et donc répondre », ce binôme insécable auquel l’enfant et l’adulte, ces deux acteurs de la relation pédagogique si souvent répondent, peut être trop souvent sans les réinterroger. Les pédagogies dominantes sont encore souvent celles qui cherchent à colmater le vide relationnel, le suspens dans le langage que l’irruption d’une « question » peut susciter. Pourquoi ?
Quelle place laisser au doute chez l’apprenant ? Comment en tant que formateur suspendre en nous le désir de parole ? Comment entendre la puissance poétique des paradoxes ? Comment s’abstenir de tout ce qui fige la pensée ?

D’une bouture l’autre
  • Le GFEN en Île-de-France : passés, présents, avenirs
    Jeanne HAUGOUBART-BONNEFOY et Laurent CARCELES

Cet article est le fruit d’un travail collaboratif entre Jeanne HAUGOUBART%u2010BONNEFOY (ex DION), qui a animé le groupe Île de France pendant deux décennies, et Laurent CARCELES qui a connu et rejoint le GFEN grâce à Jeanne.
1976 : Un groupe d’enseignants découvre le GFEN
« Après 15 années d’enseignement en région parisienne (à Saint Denis 93 puis à Créteil et Bonneuil sur Marne 94), investie politiquement dans le Mouvement de la Paix, les questions de l’éducation à la paix et de la réussite de tous les enfants deviennent de plus en plus incontournables pour moi. En dépit des pratiques de coopération, de projets de création comme la conception, la réalisation de longs métrages et la production de petits romans issus de ces films, de séjours réguliers en classes de découverte, du refus d’user des punitions/récompenses…, ma pédagogie –très fortement inspirée par le mouvement Freinet rencontré pendant ma formation initiale– , pédagogie que je veux « active » ne vient pas à bout des échecs que rencontrent encore trop d’enfants dans le champ des savoirs. Dans notre école, nous sommes déjà un groupe d’enseignants opposés de puis plusieurs années à l’orientation ségrégative des élèves de CM2 en classes de 6e différenciées : voie I(enseignement général long, classique ou moderne) voie II (enseignement moderne court) voie III (6e de transition pratique).


  • Quels possibles… renouvellements ?
    Laurent CARCELES et Pascal DIARD

Partager, permettre des possibles d’éducation que les démarches GFEN ouvrent. C’est ce que nous tentons depuis dix ans. Pascal Diard, en tant que détaché national depuis 2013. Laurent Carceles depuis 2015, en tant que déchargé par le Rectorat de Créteil pour le GFEN, puis formateur Maîtrise De la Langue pour l’académie de Créteil avec, pour mission, de continuer à faire vivre des démarches auprès d’enseignantes et enseignants. Porteurs des héritages de l’Éducation Nouvelle, et plus précisément de celui construit et transmis au  sein du groupe Île de France notamment par Jeanne Dion, nous avons animé des centaines d’heures de formation sur tous les « terrains » :  formation au — plus ou moins — long cours dans les Réseaux d’Éducation Prioritaire (REP), stages de regroupement au Plan Académique de Formation (PAF), Aide Négociée de Territoire (ANT) en établissement, stages syndicaux, personnels de catégorie C en reconversion, éducateurs de la Protection Judiciaire de la Jeunesse (PJJ) et les jeunes qu’ils accueillent… […]
Laurent Carceles vous propose de plonger dans le concret d’une formation récente d’enseignants, puis Pascal Diard au cœur d’une formation d’ « éducs » de la PJJ.


  • Et si nous entrions tous dans la tapisserie de Bayeux ?
    Sandrine LEROU, professeur d’histoire, collège Travail de Bagnolet (93)

L’histoire commence par mon choix du stage LAN0101 au Plan Académique de Formation : former des lecteurs et scripteurs compétents. J’enseigne l’histoire depuis bien long temps. Le nombre de mes années d’expériences, cumulées aux deux délicates dernières (années noyées dans le télé enseignement covid confine ment demi jauge), exigeait un nouveau regard sur mes cours. Déjà adepte de méthodes particulières (jeux de rôles, etc.), je m’ennuyais presque dans mes séances de travaux en groupe. À bout, je ne pensais même plus à organiser des sorties. J’étais en quête d’une « recharge », en quelque sorte.
À moi donc les expériences heureuses du texte recréé, du texte à trous, du texte à dévoilement progressif ! À chaque fois que je vivais une des démarches proposées, je cherchais tout de suite comment l’appliquer aux documents et travaux que donne l’historien en classe. En effet, le professeur d’histoire se trouve toujours devant un paradoxe : il doit, tout à la fois, s’appuyer sur des documents d’époque et remettre ces mêmes documents en question. Or, bien trop souvent, les élèves ne les voient que comme des illustrations du propos, et les considèrent comme une preuve. Ils n’en voient pas les limites. Le professeur n’a, en effet, pas toujours le temps de proposer l’ensemble des versions d’un même événement.

Ombres et sous-bois

  • Pour une redéfinition de l’émancipation
    Sandrine BREITHAUPT, Groupe Roman d’Éducation Nouvelle

C’est un peu par hasard que je suis tombée sur un livre qui date déjà de 2009, intitulé Ils ont voulu changer l’école. Histoire des pédagogies actives dans le Jura, 1950 1970, dirigé par Mémoires d’Ici et édité par Alphil aux Presses Universitaires Suisses. À l’occasion des 100 ans de L’EN, j’ai approfondi ma lecture et je partage aujourd’hui mes découvertes.
Je le ferai en deux temps. Le premier cherchera à saisir ce que nous pouvons apprendre de l’expérience jurassienne, de ce passé bien révolu, comme l’écrivait Sauvain, tout en cherchant à comprendre le déclin d’une certaine école alors très active dans la région. Le second s’arrêtera brièvement sur le présent pandémique, signe d’un espace propice peut être à une réorganisation scolaire pour se pencher enfin sur un avenir possible.

 

  • Quel avenir pour le « Tous capables » ?
    Jean-Jacques VIDAL

Ils « partagent la capacité d’apprendre et de progresser » : la visée à mettre en œuvre pour tous les enfants est inscrite dans « Les principes de l’éducation » de la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République de juillet 2013.
Le « Tous capables », marqueur principal du Gfen au point d’être « dans l’ADN » du mouvement, est ainsi devenu un principe institutionnalisé.
Mais, pour les classes où les professeurs sont confrontés à trop d’empêchements, cette formulation participe très fortement à la mise à l’écart de ses objectifs : ils ne croient pas à son efficience pour les élèves dans les classes où ils enseignent, dans les écoles qui sont les leurs. Et il ne s’agit pas là uniquement de débutants nommés sur des postes difficiles, qui mettraient leur déclassement — le terme semble ironique, mais son vécu est amer — sur le compte de leur incompétence ou de leur manque d’expérience.

Graines d’espoir dans le champ des possibles
  • Lettre du Hermel 14 février 2022 (Liban)
    Ghoussoune WAHOUD

Chers amis de l’Éducation Nouvelle,
En 2020, mes amis et moi avons fondé le GLIEN le groupe libanais d’Éducation Nouvelle qui fait partie du LIEN. Nous avons créé l’école « Esprits Libres » où nous valorisons et cultivons les valeurs de responsabilité, d’autonomie, de respect, de liberté, de citoyenneté, d’empathie et de bienveillance. Notre mission est d’avoir de futurs responsables ayant des valeurs et capables de faire le changement qu’on vise dans notre pays. Mais pratiquement, comment travaillons nous ?

  • Douze perspectives, douze chantiers pour l’éducation nouvelle…
    Philippe MEIRIEU (Philippe Meirieu était le grand témoin de la Première Biennale de l’Éducation Nouvelle.)

Après avoir brossé un portrait de notre environnement montrant un univers individualiste qui peine à construire du commun assumé et se perd dans une consommation compulsive de « l’épuisable » ; une société où les savoirs se perdent dans la multiplication d’informations virales… ; une école qui creuse les inégalités sociales en raison du caractère massivement « laxiste » de ses pratiques… Philippe Meirieu avait proposé que nous ouvrions ces 12 chantiers, à partir de quelques thématiques rencontrées à l’occasion de cette Biennale. Le titre de son intervention alliait tant ce que fut l’Éducation Nouvelle que ce qu’elle doit continuer à faire en tout temps pour demeurer toujours nouvelle.

  • Concevoir une formation : l’expérience du GFEN…
    Jacques BERNARDIN

Il est fréquent d’entendre des reproches à l’égard de formations jugées trop « théoriques » et insuffisamment pratiques, et/ou en décalage avec les problèmes professionnels de terrain. Pour ceux auxquels elle s’adresse, la théorie n’est pas opératoire lorsqu’elle précède la conscience des problèmes qu’elle est censée expliquer ou lorsqu’elle n’ouvre pas sur une alternative à l’ordinaire. Suffit il a contrario de prescrire de « bonnes pratiques » ? Cela rabat la professionnalité enseignante à un métier d’exécution et laisse entendre que certaines pratiques vaudraient quels que soient les situations, le contexte et les acteurs en présence. Plus encore, que le dispositif serait opératoire indépendamment de la façon de le mettre en œuvre et de l’intention éducative qui le surplombe ? Au mieux, cette prescription règle provisoirement un problème, mais confirme et renforce la dépendance aux supposés experts et laisse en l’état le développement professionnel attendu

  • L’expérience d’une consultante de l’éducation parentale
    Ting LI (LIEN) Wuhan-Chine

Une harmonisation chinoise : le besoin de réussite des enfants et le besoin de la Nation En 2021, l’Administration de l’Éducation Nationale Chinoise a annoncé l’«Avis sur la poursuite de l’allégement de la charge de travail et de la formation extrascolaire des élèves de l’enseignement obligatoire» (2021). L’explication officielle de cet avis est la suivante : Pourquoi le bureau de l’Éducation Nationale met il une telle importance sur le déchargement des élèves ? Tout d’abord, je vais présenter brièvement le contexte social.
Le système de Sécurité sociale en Chine est en train de s’améliorer. À part les fonctionnaires, la plupart des gens de la classe moyenne ne comptent pas sur les aides sociales pour garantir leur retraite et les cas graves de problèmes de santé. Les parents mettent l’accent sur l’avenir de leur enfant, il faut réussir à l’école, faire des études supérieures dans les meilleures universités, trouver un travail bien rémunéré.

  • Pédagogies alternatives et Éducation Nouvelle : quels horizons ?
    Sylvain WAGNON, Faculté d’éducation de l’Université de Montpellier (Questions posées par Étiennette VELLAS)

Effectivement, je pense que les pédagogies alternatives forment aujourd’hui une nébuleuse qui se compose de nombreux mouvements, écoles et expériences éducatives et qu’elles sont révélatrices des mutations de nos sociétés. L’ambition des pédagogies alternatives est d’incarner une autre voie, une autre façon d’éduquer, d’enseigner, de comprendre les apprentissages, de redéfinir les relations entre adultes et enfants, enfin de penser nos sociétés. Le terme alternatif est puissant, radical et fédérateur pour des mouvements très disparates qui entendent s’opposer à un modèle dominant. Mais il me semble que plusieurs axes fédèrent la plupart de ces mouvements.

Supplément en ligne  télécharger

  • Pourquoi répondre à une invitation syndicale ?
    Jean-Jacques VIDAL
  • Du concept de fruit au concept de classification
    Jacqueline BONNARD
  • Ateliers d’écriture et de création : ces lieux qui n’existent pas encore
    Stéphanie FOUQUET, Laurent CARCELES

Extraits Dialogue n° 183

Dialogue n° 183 – 100 ans d’Education Nouvelle : la faire vivre aujourd’hui

Éditorial
  • Cette histoire internationale commune que nous vivons avec nos différences  Lire
    Collectif de rédaction du n° issu du GFEN et du LIEN
L’Éducation Nouvelle a une histoire
  • Je ne conçois pas l’éducation sans référence à l’Éducation Nouvelle
    Entretien avec Gaston MIALARET
    conduit par Odette et Michel NEUMAYER (GFEN), Étiennette VELLAS, Jean-Marc RICHARD (GREN)  (suite du n° 182)
    Pensez-vous que pédagogues et scientifiques doivent travailler ensemble ?
    J’ai dit souvent : d’une part il faut que les chercheurs aient une formation pédagogique. Et deuxièmement, il faut que le praticien ait une initiation à la recherche. Pour pouvoir collaborer. Et alors ça pose des problèmes, ce n’est pas aussi simple. Mais il faut absolument que le maître soit intégré, qu’il fasse partie de l’équipe de recherche. Et pour ça il faut qu’il ait une certaine formation
    scientifique pour comprendre et pour qu’il puisse apporter ses informations.
    Remontons un peu dans le temps. Les filiations de l’Éducation Nouvelle vous les voyez où ? Comment vous nous raconteriez ce qui s’est passé en 1921 ?
    Grosse question ça. Parce que justement l’Éducation nouvelle c’est tout un ensemble de petits bouillonnements qui apparaissent. D’abord, je crois que Rousseau a marqué une rupture incontestablement là. Claparède l’a bien montré : avant Rousseau il y avait quand même une certaine attitude, après Rousseau il y en avait une autre.

  • D’hier à aujourd’hui, les apports de l’Éducation Nouvelle au débat éducatif
    Jacques BERNARDIN (suite du n° 182)
    Contre l’essentialisation, l’Éducation Nouvelle parle de potentialité ininterrompue de développement : désormais, les recherches sur la plasticité cérébrale le confirment. Plusieurs facteurs y contribuent, notamment les sollicitations du milieu et l’activité de l’apprenant.
    L’importance du milieu, de ses stimulations (contre l’idée d’« auto-développement»)
    Le milieu où l’individu évolue n’est pas un milieu naturel, mais culturel et technique, milieu social façonné et transformé par l’histoire humaine. Sous dépendance vitale de son entourage, le jeune enfant ne cesse d’apprendre des expériences et interactions, d’abord avec ses proches puis en fréquentant d’autres univers, dont l’école. Chacun est ainsi à la croisée de plusieurs milieux, d’autant d’influences, de sollicitations, de références. Loin de n’être que le réceptacle de ces influences, face aux situations vécues, il va puiser dans l’ensemble de ce répertoire, faire des comparaisons et des choix qui lui sont propres et s’émanciper progressivement des influences initiales. Des activités au Centre de loisirs aux jeux dans la cour en passant par les situations d’apprentissages en classe, chaque groupe d’appartenance le contraint à la conformité (se plier aux règles communes) et à la singularité (trouver ou y faire sa place). Processus conjoint de socialisation et de personnalisation: si on ne peut réinventer les règles du langage, s’y plier permet de pouvoir dire « je »… Le GFEN développera la notion de « milieu stimulant»…
Tous capables
  • L’école de la bienveillance… du bien être dans la nature…mais… la construction des savoirs ?
    Pascale BILLEREY, Sophie REBOUL, Jean-Jacques VIDAL (GFEN 25)
    Beaucoup d’écoles et de crèches sont sollicitées pour laisser les enfants jouer dehors et cela fait de plus en plus d’adeptes. Être confinés pendant des mois a renforcé ce besoin d’extérieur et renouvelé cette approche de l’espace dans lequel évoluent plus librement les enfants.
    Ceci se justifierait pour promouvoir une école de la bienveillance, de l’écoute, du développement personnel. De belles intentions, mais on peut se demander où sont passés les savoirs, le langage, la culture ?
  • Tous capables ! Du pari éthique à la loi d’orientation
    Jacques BERNARDIN (président du GFEN)
    Audace défendue au Sénat avant d’être ratifiée par l’Assemblée nationale, l’idée que « tous les enfants partagent la capacité d’apprendre et de progresser » est désormais inscrite dans la loi de juillet 2013 en tant que principe de l’éducation.
    « Tous capables ! » La formule portée avec audace par le GFEN (mouvement pédagogique héritier de Langevin et de Wallon, présidents successifs de 1936 à 1962) fut d’abord un parti-pris éthique (relevant d’une philosophie de l’éducation) et simultanément un défi pédagogique (pour en attester) avant de trouver un étayage scientifique, puis de devenir un principe institutionnalisé.
  • La naissance de « Tous capables ! » et ses malentendus
    Jean-Louis CORDONNIER (GFEN 66, secteur Sciences)
    Le slogan « Tous capables ! » n’a pas toujours été présent dans les orientations du GFEN. Il apparaît au début des années 80 et se précise ensuite. Depuis, il s’est parfois affadi, parfois utilisé à contre-sens. Explorons !
    L’éducation nouvelle des débuts ne se préoccupe pas du Tous capables ! Au congrès de Calais (1921), elle affirme que l’éducation doit respecter l’individualité de l’enfant et que les études doivent donner libre cours à ses intérêts innés (Pour l’ère nouvelle, N°1, Calais 1921). Le congrès de Nice (1932) ajoute que l’éducation doit mettre l’enfant en mesure de saisir les complexités de la vie sociale et économique de son temps et d’accueillir la contribution originale de toute autre nation à la culture humaine universelle.
  • L’Éducation Nouvelle, une exigence intellectuelle !
    Catherine LEDRAPIER (GFEN secteur Sciences, LIEN)
    Je veux tordre le cou à une idée trop répandue mais fausse : l’Éducation Nouvelle c’est le « laisser-aller ». Sous prétexte de respect de la personnalité de l’enfant et de sa liberté, il n’y aurait aucune contrainte, en particulier aucune exigence intellectuelle ! L’abandon des méthodes coercitives signifierait laxisme ! L’objet de cet article est de présenter et d’analyser pour comparaison deux exemples très différents de conceptualisation pris dans des pédagogies nouvelles des plus opposées. Ce qui permettra entre autres de juger des exigences intellectuelles… Dans un premier temps, j’expliciterai un cas de conceptualisation dans la pédagogie Montessori1. Dans un deuxième temps, sur le même sujet, j’expliciterai comment se fait la conceptualisation dans une démarche relevant du GFEN ou du LIEN.
Pratiques du changement
  • Ateliers d’écriture : comment la langue se travaille et nous travaille
    Joëlle CORDESSE et Patricia CROS
    A Melun, une famille Rom s’est installée provisoirement. Nous demandons à la militante du MRAP qui est en contact avec eux et que nous connaissons, si un atelier d’écriture pourrait les intéresser. «Bien sûr» nous répond-elle. Quelques jours plus tard, nous déroulons notre grand rouleau de papier (la fresque) dans la cour de leur maison et nous y déposons des feutres de couleur. Les enfants se précipitent pour dessiner, certains écrivent leurs prénoms. Nous écrivons les nôtres puis nous commençons à légender les dessins, à écrire les mots qui émergent de la situation (bribes de conversation, noms d’objets se trouvant dans la cour…). Les enfants copient spontanément les mots et les énoncent plusieurs fois à voix haute. Petit à petit, les adultes forment un cercle autour de la fresque et discutent. Nous essayons de capter des mots en roumain et de les écrire (phonétiquement car le roumain ne nous est pas familier). La fresque s’étoffe dans les deux langues.
  • D’une révolte à une révolution, même à l’école. Du neuf en Éducation Nouvelle
    Charles PEPINSTER (Groupe Belge d’Education Nouvelle)
    Depuis des décennies, les huit inspecteurs de cette région de Belgique qui se croient souvent progressistes, organisent pourtant chaque année des « Examens cantonaux » sous la houlette d’un inspecteur principal. Il s’agit d’un examen externe fait de questions scolaires destinées à des centaines d’enfants de douze ans. Après trois jours d’épreuves (externes à leurs écoles), les examinateurs ‘évaluent’. Ils disposent de barèmes de correction pour attribuer un certificat officiel d’études de base aux récipiendaires ayant obtenu au moins 50 % des points. Ce système me trouble puis me révolte parce qu’il conforte l’enseignement traditionnel sélectif, entraîne le bachotage, le stress et mange le temps des vrais apprentissages. De plus, le chiffrage arbitraire des réponses enfantines me révulse. Je me décide, en 1978 à ne plus participer à cette combine. Je développe l’objection de conscience aux examens notés que l’un ou l’autre collègue inspecteur semble approuver mais n’ose pas le dire.
  • Dans le silence et le calme, dans le bruit et l’agitation, l’Éducation Nouvelle est une histoire à vivre
    Joël SAINTIPHAT (LIEN, IEPEHN, Haïti) et Sandrine BREITHAUPT (LIEN, GREN, Suisse)
    L’Éducation Nouvelle traverse les temps, les espaces et les cultures. C’est ainsi que nous pouvons nous retrouver entre militantes et militants dans la campagne haïtienne de la vallée de l’Artibonite et au bord du lac Léman en Suisse romande. A priori tout nous sépare, mais à y regarder de plus près, beaucoup nous rassemble. Nous portons ainsi des revendications, des valeurs communes et aussi la volonté d’un monde meilleur, plus solidaire. Nous pensons que ce monde-là peut se réaliser au travers de l’émancipation, par les savoirs d’une solidarité pédagogique, d’une lutte constante pour une école constructive, utilitaire et active et non assise (comme nous l’a transmis Ferrière il y a 100 ans déjà), plus respectueuse de l’enfant.
    Bien sûr, nous ne sommes pas dupes et savons que tout ceci est extrêmement fragile, car nous faisons indubitablement face aux inégalités sociales.
  • Le « Réseau des apprenants » Un questionnement au coeur d’une aventure humaine
    Cécile BUELENS (Lire et écrire)  et Pascale LASSABLIÈRE (GBEN)
    De mai 2010 à juin 2012, avec des apprenants en alphabétisation de l’asbl Lire et Écrire de Wallonie et de Bruxelles, nous avons construit un projet participatif de formation. En racontant ici cette expérience, parfois accompagnée d’un vif sentiment de solitude, nous aimerions la partager et en tirer des leçons.
    Ces leçons sont de plusieurs ordres : comment « gérer » des décalages à plusieurs niveaux / Comment travailler avec des institutions lourdes / Comment faire de l’échec un ferment pour le changement.
Porter l’Éducation Nouvelle aujourd’hui
  • Oser la parole, l’écoute. L’Éducation Nouvelle est-elle nouvelle en Tunisie ?
    Mounira KHOUADJA (Initiative Tunisienne pour l’Éducation Nouvelle)
    Les années qui ont suivi la Deuxième Guerre mondiale ont été riches d’expériences où l’élève des écoles tunisiennes que je connaissais, malgré toutes les insuffisances, se plaisait à l’école, terrain d’expérimentation d’approches actives leur permettant, ainsi qu’à l’enseignant, d’en faire un espace de recherche, de collaboration, de coopération, de construction de savoir et surtout de bonheur ! Je pense à l’École primaire de Metline située dans la région de Bizerte, aux écoles primaires de Hiboun et de Réjiche dans la région de Mahdia et bien d’autres ici et là que je ne saurais citer par manque d’archives précises.
    Des réseaux francophones de l’Éducation Nouvelle ont semé à tout vent des graines fécondes permettant aux valeurs et aux principes d’être diffusés et réappropriés pour être mis en pratique à travers des transferts pédagogiques singuliers malgré les conjonctures sociales et politiques complexes : pauvreté, haine du colon, déni de l’école… Expérimentations pédagogiques menées par Marie-Anne Carroi, figure oubliée mais fondamentale des réseaux francophones de l’éducation pendant l’entre-deux-guerres.

  • Les nouveaux militants et l’histoire du GFEN. Interview croisée de 3 « jeunes » militants du groupe Paris
    par Damien SAGE (GFEN 75)
    Cet article présente une interview croisée de Camille, Maxime et Sarah, tous les trois engagés dans l’animation du GFEN-75 depuis 2 ans. Cette interview prend place dans le cadre du centenaire de l’Éducation Nouvelle. J’ai voulu voir si l’histoire du GFEN était connue par les nouveaux militants, comment la rencontre avec cette histoire s’était faite et si celle-ci jouait sur leur engagement.
    Ce projet me permettait de me décentrer de mon propre vécu sur cette question et d’explorer si l’histoire du mouvement pouvait être un élément d’accroche pertinent pour de nouveaux militants. En ce qui me concerne, j’ai découvert le GFEN rapidement quand je suis entré dans le métier grâce à la rencontre avec une conseillère pédagogique, militante du GFEN, avec qui les échanges étaient constructifs par rapport aux difficultés que je rencontrais. Ce n’est qu’au fil du temps que j’ai pris connaissance de l’histoire et de l’historicité du GFEN.

  • Le village, les enfants, l’atelier. Autour d’un atelier «canoë» en Roumanie
    Diana DRAGHICI (Groupe roumain d’Éducation Nouvelle et LIEN)
    Tout ceci est né à Eselnita, dans ce village sur le bord du Danube où vivent 4 ethnies (roumains, roms, serbes et tchèques). Un superbe village dans le défilé du Danube, rempli de riches touristes l’été et où presque chaque famille a un membre qui doit travailler à l’étranger pour entretenir la famille.
    Ce que nous avons cherché à mettre en place, c’est une pédagogie émancipatrice appuyée sur l’apprentissage en solidarité et pour une société solidaire, l’auto-socio-construction de savoirs, la mise en recherche permanente, l’autonomie de l’enfant, le travail en équipe pour tous réussir et comprendre, la mise en lumière du rapport entre liberté de mouvement physique et liberté
    intellectuelle, l’importance de la confiance en soi et dans les autres, la créativité, l’esprit critique,
    l’esprit citoyen et écologiste. Est-ce cela l’Éducation Nouvelle ?
  • Penser, vivre l’Éducation Nouvelle. Un patchwork de solitude ?
    Claire DESCLOUX (GREN, Suisse & ProPhilo)
    L’enseignement m’apparaît comme très mystérieux…
    Chaque pan de ma vie peut se révéler lumineux ou truffé de zones d’ombre : pourtant, parfois le monde de l’enseignement m’apparaît comme très très mystérieux. Face aux élèves, j’ai vraiment désiré lier « nos solitudes d’enfants et d’adultes », peut-être même tenté de les superposer. Était-ce faire preuve d’ignorance, ou d’une once d’utopie ? Pourtant il me semble parfois y être parvenue. Par ailleurs, le joug de l’institution entravée par des directives et des obligations de conformité, le minimalisme et aussi l’indifférence de certains enseignants face aux difficultés des apprenants ont suscité en moi d’immenses colères, mal réprimées parfois et m’ont plongée dans une vraie solitude faite de tristesse et d’incompréhension.

Extraits Dialogue n° 182

Dialogue n° 182
100 ans d’Education Nouvelle : une histoire à partager

Editorial
  • Cette histoire… qui n’est pas que la nôtre !   Lire
    Collectif de réalisation du numéro, issu du GFEN et du LIEN

Glossaire

  • Sigles et abréviations
L’Éducation Nouvelle a une histoire
  • Louise Michel, précurseure de l’Éducation Nouvelle ?
    Jean-Jacques VIDALEn 1871, quand la Commune de Paris s’insurge durant quelques semaines et tente d’installer les fondamentaux d’une République sociale, Louise Michel, totalement engagée dans les évènements et très investie sur les questions pédagogiques depuis ses débuts comme maîtresse d’école, fait des propositions au gouvernement communard en faveur d’une nouvelle méthode d’enseignement dans des écoles laïques.
    À cette époque, le terme d’Éducation nouvelle circule déjà depuis une décennie : ses enjeux s’élaborent au travers de la réflexion éducative et de toutes ses expérimentations durant le 19e siècle. Mais, quoique déjà nouvelle, cette éducation n’est pas encore « Nouvelle ».
    Pourtant, les enseignantes engagées dans la construction dès l’école communale d’une citoyenneté éclairée pour leurs élèves apportent par leurs pratiques des réponses forcément militantes à des questions qui ne sont pas posées, ni par la société de l’époque, ni par les réflexions en cours pour construire l’ « école républicaine ».
  • Paul Faucher, aventurier de l’Éducation Nouvelle
    Colette CHARLET et Jean-Louis CORDONNIERPaul Faucher est bien connu comme fondateur des Albums du Père Castor. Ce qu’on sait moins, c’est qu’il fut un pionnier de l’Éducation Nouvelle et joua un rôle important dans les débuts du GFEN, dont il a été président en 1935 et 1936.
    Paul Faucher est né en 1898. En 1916, il finit ses études en obtenant le brevet de capacité pour l’enseignement primaire. Mais c’est la guerre… À 18 ans, il peut s’engager comme soldat, puis participer en 1919 à l’occupation de l’Allemagne. Il en gardera un profond dégoût face à l’inanité de la guerre. Bien qu’ayant le brevet d’instituteur, il ne rejoint pas l’instruction publique, et en 1921,  devient commis libraire chez Flammarion. On y remarque son sens de l’organisation et ses connaissances en littérature : en 1922, il est nommé gérant de la succursale du Havre.
    C’est ainsi qu’en 1923, il entre en contact avec le Conseiller français du commerce extérieur de la France à Londres, Tony Guéritte. Par cet intermédiaire, il fait connaissance avec son épouse, Madeleine Guéritte, qui lui présente alors sa revue, La Nouvelle Éducation (L.N.E.). Avec Roger Cousinet, elle vient de fonder L.N.E. juste avant le congrès fondateur de la LIEN – Ligue Internationale de l’Éducation Nouvelle en 1921 à Calais.
  • « Je ne conçois pas l’éducation sans référence à l’Éducation Nouvelle »
    Entretien avec Gaston MIALARET par Odette et Michel NEUMAYER, Étiennette VELLAS, Jean-Marc RICHARDDans mon jeune temps, j’ai commencé comme instituteur, je préparais mon professorat à ce moment-là et, de très bonne heure, j’ai été conseiller pédagogique, c’est-à-dire maître de classe d’application. Dès que j’ai été conseiller pédagogique, et c’était juste après la Libération, je me suis intéressé aux « points de vue » de l’Éducation Nouvelle. Et j’ai adhéré au GFEN en 49-50. Dès ce moment-là, préparant l’inspection primaire aussi, je me suis documenté sur les travaux de Decroly, Montessori, et j’ai découvert quelque chose qui me paraissait quand même nécessaire si on voulait devenir vraiment un éducateur digne de ce nom. Arrivant à Paris à l’École supérieure de Saint-Cloud, pour y faire une inspection, je me suis lancé complètement. J’ai rencontré l’Éducation Nouvelle, les groupes, les gens. J’assistais aux réunions, et comme ça, petit à petit, j’ai travaillé avec Wallon. J’ai été nommé membre du bureau du GFEN, puis ensuite président. L’Éducation Nouvelle, c’est quand même pour moi quelque chose qui fait partie de ma vie. Je crois que je ne conçois pas l’éducation sans avoir cette référence à l’Éducation Nouvelle.
  • Le GÉMAE, affluent constitutif du GFEN
    Entretien avec Josette JOLIBERT par Joëlle CORDESSE et Jean-Louis CORDONNIERNous, la quinzaine de jeunes profs qui avons créé le GÉMAE, avions en commun :
    – d’être des profs débutants qui commençaient à enseigner alors qu’ils n’avaient reçu aucune formation pédagogique durant leurs études, ni en fac, ni en École Normale Supérieure ;
    – d’avoir pratiqué un long militantisme contre la guerre d’Algérie – laquelle avait accompagné toutes nos études et venait, en 1962, de se terminer – et d’y avoir acquis une expérience variée d’actions collectives. Nous étions d’anciens étudiants de l’UNEF, de l’UEC, du PSU, cathos de gauche, etc. et, à un ou deux ans près, nous avons
    eu notre premier poste autour de 1962 ; d’être, pour beaucoup d’entre nous, d’anciens élèves d’Écoles Normales primaires, qui, à ce titre, avions fait en seconde (le recrutement en École Normale se faisait alors en fin de troisième) un stage obligatoire de formation de moniteurs de colonies de vacances dans le cadre des CÉMEA (Centres d’Entraînement aux Méthodes d’Éducation
    Actives). On découvrait ainsi l’Éducation Nouvelle non pas à l’école mais dans les colos. Ça se terminait par le BAFA (Brevet d’Aptitude aux Fonctions d’Animateur) que nous avions à peu près tous.
  • Parler d’histoire et de mémoire. Propos sur l’atelier d’écriture
    Josette MARTYLa rupture qu’apportait l’atelier d’écriture en prônant ce faire ne fut pas intégrée en tant que rupture avec l’idéologie dominante. L’atelier apportait et apporte une pratique structurée par des consignes élaborées. Il met en scène l’acte d’écriture. Il propose une « méthodologie » qui sort la création de l’élitisme. Activité de groupe, chacun écrit et lit, s’écoute et s’entend. Les mots prennent du corps. Dans le cours de l’atelier le Moi de chacun devient un Je actif. Ce pouvoir gagné sur les mots est une force d’émancipation. Le sujet s’autorise à écrire, à élargir ses lectures. Il devient curieux de l’écriture des autres. Tout texte perd son mystère et s’éclaire de son sens plein de pensées à découvrir. La bibliothèque du sujet écrivant s’élargit.
  • L’école Al Doustourya : Regards sur l’École Constitutionnelle (Jérusalem 1909)
    Ramzi TadrosJe voudrais ici évoquer le parcours d’un homme, Khalil Al Sakakini dont j’ai, non sans mal, découvert les écrits. Ils me semblent témoigner d’une étonnante pensée pédagogique qui me semble proche de ce que j’ai découvert de l’Éducation Nouvelle d’hier et d’aujourd’hui à travers ma fréquentation du GFEN en Provence et du LIEN.
    En 1909 Khalil Al Sakakini et Ahmed Khalidi fondent l’école Al Doustouria (École de la Constitution) où ils mettent en place une pédagogie et des pratiques hors normes pour l’époque. En effet, ils constatent la désuétude de l’enseignement traditionnel ainsi que celui des écoles de l’état ottoman d’une part, tout en critiquant par ailleurs l’inadaptation des écoles missionnaires catholique et protestante qui étaient en plein développement.

Être porteur de cette histoire

  • Éducation Nouvelle : audace contre routine ?
    Michel HUBERDans la perspective de ces deux numéros de Dialogue sur les 100 ans de l’Éducation Nouvelle, Étiennette Vellas, au nom du Lien,
    m’invite à réagir à la fameuse critique qui nous a toujours été faite : « Vous êtes dangereux, vous leur apprenez à penser ! ». Pour répondre à cette accusation, je me permettrai de mobiliser mes expériences professionnelles et personnelles formalisées dans un de mes derniers écrits.
    Professeur d’Histoire-Géographie, je ne supportais pas que mes élèves s’ennuient pendant mes cours. Au bout de 3 ans d’enseignement en Lycée, à Corbeil-Essonnes (91) et à Antony (92), le cours magistral traditionnel me procurait peu de joie. J’envisageais même de quitter l’enseignement lorsqu’une collègue, professeur de Philosophie, me parla du GFEN, un mouvement pédagogique proche de notre courant syndical.
  • Notre recherche d’une éducation nouvelle : bribes d’histoire et traces de pratiques
    Joëlle CORDESSE et Étiennette VELLASL’histoire de l’Éducation Nouvelle n’a pas encore été faite.
    La voir comme une recherche en éducation, recherche d’une éducation nouvelle pour une ère nouvelle, commencée depuis plus de 100 ans, est l’entrée que nous proposons dans notre texte.
    – En rappelant par quelques-unes de ses facettes développées dans nos propres Mouvements du GFEN et du LIEN (15 mouvements aujourd’hui) que cette recherche est multiple et diverse.
    – En nous concentrant sur cette manière de chercher que nous nommons une auto-socio-construction des savoirs, qui se veut, dans le même temps et dès l’origine, construction des personnes qui la vivent et de la société.
    – En mettant l’accent sur l’histoire de cette recherche faite à l’intérieur du GFEN. Sa recherche pionnière faisant écho à celles des mouvements du LIEN, à travers rencontres, écritures en commun.
  • 1921- 2021, un courant de l’Éducation Nouvelle en mouvements
    Infographie de Saskia VELLAS

  • Culture de paix, écriture et Éducation nouvelle « Naître après »
    Michel NEUMAYERJe voudrais ici faire l’éloge d’une pensée pédagogique qui sache ne pas faire fi des complémentarités entre « petite » et « grande » histoire. Je voudrais qu’elle nourrisse une conception de « l’engagement en pédagogie », notion importante dont nous avons tant besoin, que nous pensions aux apprenant.e.s, aux formatrices et formateurs, aux enseignant.e.s.
    Ce texte débute par un bref exergue qui situe l’origine de ma réflexion. Il est suivi de rapides fragments biographiques. Ma thèse centrale en matière d’écriture et d’émancipation est ensuite explicitée et brièvement étayée par trois exemples d’ateliers d’écriture de « culture de paix ».

L’Éducation Nouvelle, caractéristiques et enjeux

  •  D’hier à aujourd’hui, les apports de l’Éducation Nouvelle au débat éducatif
    Jacques BERNARDINIl est bien difficile de parler de l’éducation nouvelle au singulier, tant les courants qui la composent sont divers au niveau de la philosophie qui les inspire comme à celui des outils et méthodes qui les caractérisent. L’amalgame prête le flanc aux critiques et procès, mais aussi aux récupérations idéologiques : de la condamnation des « pédagogistes » au nom d’une culture qu’ils sont censés négliger à la promotion d’une éducation « alternative »… mais privée, le conservatisme élitiste prospère, sur fond de dégradation du crédit de l’école publique. Cela posé, quels éléments singularisent l’apport de l’éducation nouvelle au débat éducatif ?
    Si l’éducation vise l’insertion dans la société, doit-elle se plier aux seuls besoins de l’économie, prioriser l’accès à l’emploi et la reconduction de l’ordre social, comme cela a prévalu historiquement ? Depuis ses origines – qu’on peut faire remonter, dans ses aspirations, au Siècle des lumières – l’Éducation Nouvelle vise essentiellement l’émancipation intellectuelle, la capacité pour chacun de penser par soi-même tout en s’inscrivant dans une socialisation élargie, de participer aux débats de son époque et de contribuer à l’évolution des rapports sociaux. C’est de ce point de vue qu’elle juge les méthodes : au-delà même des contenus d’apprentissages explicites, à quelles finalités préparent-elles ?
  • « Plus jamais ça ! » Du slogan à l’action
    Maria-Alice MEDIONIPlus jamais ça ! ». Cette formule est bien connue dans l’Éducation Nouvelle. Elle fait partie de son histoire, d’un moment de rupture dans les consciences qui garde encore (hélas ?) toute son acuité.
    L’objet de cet article est de revenir sur l’émergence de cette prise de position et de s’interroger sur sa dramatique persistance au point qu’on pourrait s’exclamer tout autant aujourd’hui en disant : « Encore ça ! ». Qu’est-ce qui a fait « faillite » dans ce beau projet, où sont nos freins, nos incapacités, sur quoi faut-il porter le travail et l’action encore aujourd’hui ? Sans prétendre à l’exhaustivité quant à la présentation des origines de la formule, ni à la prétention quant aux « solutions » à envisager, je propose juste un modeste temps d’arrêt pour réfléchir à ce mot d’ordre, dans notre histoire.

  • 100 d’Éducation nouvelle toujours nouvelle. Continuité et nouveautés
    Catherine LEDRAPIERLe centenaire est l’occasion de faire le point sur l’Éducation Nouvelle, si mal connue. Je vais tenter de cerner ce qui a fait unanimité au sein de la grande diversité qu’est l’Éducation Nouvelle, de discerner quelques différences et quelques évolutions au cours de ces 100 ans.
    On dit que l’Éducation Nouvelle a cent ans, car la LIEN qui officialise le réseau international a 100 ans. Mais les écoles nouvelles existaient bien avant ! Apparues en divers endroits du globe fin XIXe, ce sont des initiatives audacieuses, en rupture avec les pratiques traditionnelles (d’où leur nom), poursuivant le même but : que l’enfant puisse agir librement, que son éducation soit intégrale (polyvalente, polytechnique, valorisant les arts, l’éducation physique et le travail manuel). Dès 1899 le BIEN(1) les caractérise.
  • « Vous êtes dangereux, vous leur apprenez à penser »
    Odette BASSISParoles adressées à Henri Bassis et moi-même, engagés au Tchad en 1971 – il y a 50 ans ! – et dites par le représentant ministériel français venu à Ndjamena en 1975.
    Il en est de tout savoir, dans toute situation de vie, que d’avoir à engager des pas, aussi minimes soient-ils, dans un espace réflexif donné. C’est là où « apprendre » ne peut pas se suffire à lui-même s’il n’ouvre des chemins dont l’enjeu décisif, bien plus que d’ajouter seulement au panier des « connaissances-à-retenir-et-appliquer» n’engage le devenir pensant du sujet apprenant lui-même. C’est là cependant où « un seul pas fait dans l’apprentissage peut signifier cent pas dans le développement » en soulignant que c’est par rapport à un mode d’enseignement… « qui apporte plus que ce qu’il apporte immédiatement ».
  • 2021 : création de Convergence(s) pour l’Éducation Nouvelle
    Avancer avec des ambitions partagées et un projet politique commun

    Étiennette VELLASL’Éducation Nouvelle est souvent déclarée morte, du moins vue comme un mouvement du passé. Nous ses praticien.nes  d’aujourd’hui sommes alors conduits à opérer cette rectification : Non ! l ‘Éducation Nouvelle n’est ni morte ni faiblarde ! Elle vit, se développe, se ramifie.
    Cette situation de méconnaissance est en partie due à la disparition des Congrès de la Ligue Internationale de l’Éducation Nouvelle (La LIEN) après la deuxième guerre mondiale. Si l’histoire d’un siècle d ‘EN n’a toujours pas été faite, notre mémoire collective de militant.e.s a cependant fait de ces congrès des lieux remarquables en soulignant la diversité des participants, un public augmentant à chaque congrès, des échanges possibles entre scientifiques, pédagogues et administrateurs scolaires.
    Et surtout des lieux porteurs d’un espoir commun d’un monde plus fraternel à faire advenir par une éducation nouvelle.

Extraits Dialogue n° 181

Dialogue n° 181 –  Perspectives sur l’enseignement à distance. Penser la présence

Editorial

  • Tenir la distance  Lire
    Michel BARAËR
Retours sur vécus
  • Faire classe ensemble L’énigme de la présence
    Geneviève GUILPAIN, Professeur de philosophie, formatrice à l’INSPÉ de CréteilJe hasarde un « bonjour. Vous m’entendez ? », et je lis presqu’aussitôt des « oui, oui, on vous entend ». J’ai envie de leur dire qu’ils ont bien de la chance de m’entendre car moi, je ne m’entends pas ou plutôt je n’entends que moi. Ce n’est pas le moindre des paradoxes. Dans cette salle de cours de l’INSPE dans laquelle j’accueillais encore il y a deux semaines un groupe parlant, plaisantant, s’agitant, les tables ont été repoussées, les chaises empilées et je suis toute seule assise devant mon écran et à côté du tableau blanc (on m’a expliqué que je pouvais écrire, projeter et que tout pouvait être vu par mes étudiantes dispersées aux quatre coins de la banlieue, voire au-delà). L’espace est tout à moi. Je suis la seule à parler à voix haute dans un silence que rien ne vient troubler ; je n’entends que ma propre voix, et celle-ci reste sans écho – et je ne m’exprime pas au sens figuré en voulant designer l’impossibilité de percevoir les réactions que suscite mon propos – ; dans cet espace neutralisé, désert, ma parole ne rencontre aucun corps sensible qui vient l’accueillir, l’amortir, ou la renvoyer ; ma voix est sans écho ; elle se perd, je ne sais où. Je comprends soudainement ce que signifie « parler dans le vide ».
  • Enseigner les langues en des temps troublés
    Maria-Alice MEDIONI, Saloua KAABECHE, Magali KOUTTI Nathalie FARENEAU, Secteur Langues du GFEN
    Dès le début du premier confinement en mars 2020, c’est à un empressement généreux auquel on a pu assister, de la part des enseignants qui se sont rués, parfois sans distance, sur les consignes irréfléchies et arbitraires du ministère, en proposant du travail en ligne pour les élèves, en dépit du bon sens ! Cet enthousiasme débordant qui a conduit à investir le numérique comme jamais, est d’autant plus étonnant que bon nombre d’enseignants de langues étrangères manifestaient jusque-là une résistance de bon aloi face aux injonctions de l’institution qui poussait toujours vers le tout numérique. La « continuité pédagogique » préconisée par le MEN a été prise au pied de la lettre : on continue le programme, vaille que vaille, en utilisant les procédés, par exemple, de la classe inversée et de la visioconférence. Pour autant, peu de différences avec ce qui se passe dans la classe ordinaire : des exercices à faire et à rendre, souvent même notés !
    Du côté des parents, les réactions sont diverses. Certains, probablement angoissés pour leurs enfants, en demandent toujours plus ; d’autres saturent dès les premières semaines.
  • La formation à distance témoignage de Betty LABOREL, formatrice auprès de cadres
    recueilli par Geneviève GUILPAIN
    Lors des confinements, nous nous sommes trouvés dans l’obligation de tenir, pour certains groupes, les sessions de formation en visio. Sachant que les dates des épreuves n’avaient fait l’objet d’aucun aménagement, — les services de l’État concernés étant plus ou moins dépassés par les évènements —, et qu’une difficulté maximale se faisait jour pour les demandeurs d’emploi ne disposant que d’un financement d’un an.
    C’est dans ce contexte plus qu’anxiogène pour les étudiants que nous avons dû nous adapter très vite. Chaque séance à distance devait donc être pensée dans le triple respect des heures de formation à délivrer aux étudiants au regard du référentieldiplôme (ils doivent avoir reçu 7 heures de formation effectives), des heures effectivement finançables pour l’organisme (qui doit avoir bien délivré 7 heures et le prouver) et des heures payables à l’intervenant pour chaque séance (il doit avoir travaillé 7 heures pour chaque séance, comme s’il était en présentiel). Le tout, en respectant aussi la thématique du jour (programme contractualisé par les conventions de formation).
  • À lire sur le supplément en ligne :
    – Cinq parents, militants Quart Monde, partagent leurs expériences des confinements de 2020 ATD Quart Monde
    – Des (éducations) nouvelles du numérique Laurent CARCELES
Des prises de position
  • Franchir le mur du virtuel ? Explorer les brèches
    Collectif Seine et VosgesAlors que le collectif s’apprêtait à mener son stage durant les vacances de la Toussaint 2020, le protocole sanitaire s’est renforcé l’obligeant à mener son stage à distance. Durant 5 jours le stage a eu lieu. Voici un article collectif écrit en distanciel, émergeant des questions et ruptures vécues.
    Nous vivons un temps de bifurcation ! Celle-ci est identifiable lorsque la valeur d’un paramètre du système, variant de façon continue, franchit une valeur critique. Un seuil se passe. Des propriétés émergent, suffisamment pour que l’on considère qu’un seuil est passé. Quel seuil ? Quelles propriétés nouvelles ? Que sommes-nous en train de construire dans cette turbulence numérico-politique ? Faut-il nous laisser étouffer par ce précipité de l’adaptation forcée ? Le seuil serait-il suffisamment critique pour qu’il nous empêche de penser, nous empêche d’agir ?
  • Enseignement à distance, emploi de dispositifs numériques, quels usages ?
    Saloua KAABECHE, professeur d’espagnol en collège, GFEN secteur langues
    Jusqu’au 16 mars 2020, certains ne voyaient dans ces outils que des avantages ! Côté enseignants, il devient plus aisé de faire parvenir du travail aux élèves (présenté comme une solution miracle lorsque l’élève (ou même le prof) est absent !). Ils offrent une interface pour classer tous les cours, une messagerie sécurisée… Côté élèves, tout est disponible ! Même plus besoin selon certains d’inscrire ses devoirs dans l’agenda à la fin du cours (« ben oui, Madame, tout est sur l’ENT »). À force, nous avons fini par croire que tous les élèves maîtrisaient tout cet environnement… et nous avons eu tort !
    À quel moment avons-nous pu vérifier que nos élèves dominaient cet outil ? Seul le confinement nous a permis de constater que non seulement rien ou presque n’était acquis mais qu’en plus le numérique serait un obstacle aux apprentissages et à la transmission pour un très grand nombre (enseignants inclus) !

  • Le numérique : un révélateur de deux systèmes de valeurs qui s’affrontent
    Dominique BUCHETON, professeure honoraire, université de Montpellier
    L’école n’échappe pas aux transformations sociétales et politiques : elle en est la chambre d’écho. La question du numérique scolaire, ses usages, ses finalités, en est un des révélateurs. Deux visions de l’éducation s’affrontent. L’une, néolibérale, largement répandue dans toute l’Europe comme à Singapour a développé un avatar français particulièrement autoritaire. La deuxième, s’opposant frontalement à la première, propose une vision humaniste, culturelle et sociale de l’éducation. Une vision qui est le fruit de toute l’histoire et des avancées de l’école républicaine française et dont les valeurs et principes sont fortement mis en danger un peu plus chaque jour. Une riposte vigoureuse, responsable, argumentée, audacieuse dans ses propositions s’impose.
    Le numérique est notre nouveau « milieu ». Il transforme nos façons de lire, d’écrire, de nous informer, d’apprendre, de nous relier aux autres, de créer… L’École doit impérativement « encapaciter » les élèves pour qu’ils habitent et explorent cet environnement nouveau, pour qu’ils y agissent en tant que citoyens éclairés et critiques. Le monde qui advient est et sera soumis au numérique. Pour le meilleur ou le pire. Il sera ce que nous en ferons.
  • À lire sur le supplément en ligne :
    – Prendre distance avec le (tout) numérique ? Quand la télé commande !
    Pascal DIARD
Des possibles en oeuvre… mais…
  • Distanciel et collectif, quels possibles ?
    Stéphanie FOUQUET
    Si le collectif est parfois difficile à gérer en classe (relations entre élèves, respect des prises de parole et canalisation de celles-ci…), le distanciel permettant de s’adresser à chaque élève individuellement, devrait avoir gommé les effets perturbateurs du groupe. Il devrait avoir permis à chacun de s’extraire des lourdeurs du collectif et de construire sa bulle, celle qui doit lui permettre, dans une solitude bienveillante de se lancer dans l’aventure des savoirs dormant dans son ordinateur qu’un simple clic permettrait de réveiller, grâce à la progression pensée et individualisée que lui aurait faite son enseignant.
    À vrai dire, au regard des dernières évaluations nationales, nous avons perdu une bonne partie de nos élèves, et surtout dans les REP. Pour autant, que comprendre de la situation ? L’acte pédagogique doit-il uniquement être pensé en présentiel, dans une logique vivante et incarnée ? Peuton le penser en distanciel (terme émergeant dans la novlangue institutionnelle, posant pour acquis les bienfaits de cette pratique par écrans interposés) ?

  • Un travail collaboratif à distance ?
    Michel BARAËR
    Les technologies numériques facilitent les échanges. Les documents électroniques sont aisément transférables, la messagerie offre rapidité et souplesse à la correspondance, le SMS est un supplément bien commode à la communication téléphonique…
    Mais ces technologies ont-elles d’autres effets que techniques ? Jusqu’où modifient-elles les relations d’échanges ? Sont-elles, par exemple, susceptibles de permettre des activités vraiment collaboratives lorsque les participants sont à distance ?
    J’essaie d’apporter des éléments de réponse à cette dernière question à partir de l’exemple d’un atelier collaboratif entre étudiants sur un espace de travail en ligne.
  • Penser le complot à distance ? Bilan d’une démarche
    Julien CUEILLE, Alexis AVRIL, professeurs de philosophie
    La démarche à distance : un choix par défaut fructueux ?
    L’expérience de la démarche en ligne n’était pas une évidence pour nous. Compte tenu des circonstances, comme on dit, nous avons fait nôtre la philosophie ambiante, celle du « c’est mieux que rien » et du « après tout, tout le monde le fait, pourquoi pas nous ? ». Philosophie ou idéologie ? En tout cas on mesure bien la pression considérable exercée par cette force sans visage, mais non sans conséquences, qu’on appelle l’influence majoritaire.
    Déformation professionnelle oblige, nous nous sommes sentis tenus de rationaliser notre choix : comme l’objet de la démarche porte précisément sur un certain rapport aux médias, et qu’une partie de cette démarche consiste également en une recherche d’informations sur Internet, il ne semblait pas complètement illégitime de réaliser la démarche entièrement à distance. Est-ce là une cohérence supplémentaire, ou une simple complaisance pour l’environnement numérique et son emprise insidieuse ?
  • Un enseignement numérique sous contrainte
    Clément LARRIVÉ, Conseiller (techno-) pédagogique à l’Université Libre de Bruxelles
    Trois principes, décrits par Mallory Schaub Geley (conseillère pédagogique à l’Université de Genève, et titulaire d’un doctorat en psychologie des perceptions), ont caractérisé ce contexte « COVID » :
    -Le principe d’incertitude :
    « Ne pas savoir » fait forcément partie de l’équation. Inutile d’attendre indéfiniment des consignes claires : personne ne sait ce qui va se passer et personne n’a l’expérience de ce que nous sommes en train de vivre. Essayons de vivre avec cette incertitude : on sait qu’on ne sait pas.
    – Le principe de protection :
    Ce dont on peut être certain·e·s, c’est que nous sommes fatigué·e·s et émotionnellement marqué·e·s par cette période, à des titres divers. Il en va de même pour les étudiant·e·s. Les décisions que nous prenons doivent donc en tenir compte, il s’agit de nous protéger les uns et les autres et pas uniquement du COVID.
    – Le principe de précaution :
    Puisque nous ne savons pas ce qui va se passer (retour à la normale plus vite que prévu, retour à un confinement strict), il importe que les efforts consentis pour améliorer notre enseignement soient bénéfiques sur le plan de l’apprentissage même après la crise.
  • Les cailloux paranormaux
    Méryl MARCHETTI, Secteur Écriture et Poésie du GFEN
    L’outil numérique et les mythes de fondation
    Les illusions du numérique. Bien sûr, nous sommes bourrés d’illusions, et nous avons besoin de leurs mouvements dans nos gestes pour continuer à agir et mener des projets. Un logiciel de comptabilité qui compte et établit les comptes pour l’asso. Une visioconférence afin de déverrouiller les portes de salles interdites. L’outil qui sait guérir le sang. Cette banalité magique qui n’a ni queue ni tête parce qu’elle ne cesse de commencer. Se saisir de l’outil numérique, quand notre doigt presse l’interrupteur de l’ordinateur, c’est répéter quotidiennement un acte de fondation et entrer dans un autre temps où le sujet s’efface derrière un masque (les trolls), la fatigue du corps au travail est annihilée par l’attraction hypnotique de l’activité vivante dans l’écran, l’être humain se résout à un immense oeil fixé sur le feu pixélisé, et des naissances ont lieu par transfert de fichiers d’un corps à un autre.
  • Projet collectif de correspondance poétique
    Julien CRISTOFOLI, GFEN 72
    Les membres du GFEN 72 ne se sont que peu réuni.es pendant la période de mars à novembre. Pour autant, au fur et à mesure du premier trimestre, il est apparu comme une impérieuse nécessité d’échanger et de sortir des constats tournants très/trop souvent autour du virus et de ses conséquences, pour (re)commencer à construire et inventer ensemble afin de retrouver sens et plaisir dans l’action d’enseigner en cohérence avec nos valeurs.
    Lors de nos « échanges » en visio, nous avons fait le constat que le manque de sens touchait tout autant les enseignant·es que les élèves. Ce faisant, il nous a semblé indispensable d’y remédier, d’y faire face et si possible ensemble.
  • Le travail personnel des élèves au service d’une autonomie et d’un engagement dans les apprentissages
    Jany VIDAL
    La réalité du terrain en Rep+, où j’enseigne, m’a obligé à rapidement abandonner le numérique comme outils de l’enseignement à distance. Il a donc fallu réfléchir à d’autres changements de pratique pour assurer une continuité dans les apprentissages.
    Le problème d’autonomie des élèves, révélé par le travail à distance, existait avant la crise sanitaire. Cette question se posait déjà au sujet des devoirs à faire à la maison. Le malentendu entre l’école et les familles, sur l’objet du travail prescrit, empêche souvent de réduire les difficultés des élèves. Le fait est que l’application du protocole sanitaire a pour conséquence de confronter plus souvent les élèves à cette difficulté.
    Plutôt que de leur fournir ponctuellement le travail fait à l’école, à faire seul à la maison, mon intention était de les aider à s’engager, même seul, dans des apprentissages. Le défi est de les rendre suffisamment autonomes pour que les périodes sans école ne soient pas, pour eux, un décrochage avec toute activité scolaire.
  • À lire sur le supplément en ligne  :
    – Lassitude et décrochage
    Maria-Alice MEDIONI, Eddy SEBAHI, Agnès MIGNOT, Valérie PÉAN, Marie et Sylvain GALY
Nous avons reçu
  • Enseigner via Le Vendée Globe : une fausse bonne idée ?
    Gaëlle LEFEUVRE, Conseillère d’éducation populaire et de jeunesse, réalisatrice
    Nombre d’enseignants se sont saisis de cet « événement » pour faire travailler les élèves sur des matières les plus diverses.
    Le site d’un enseignant nous apprend ainsi que « cette course est un formidable support pédagogique pour travailler la géographie, bien sûr, mais aussi la littérature, l’histoire (les grandes découvertes), les savoirs (les vents, les marées). »
    Chaque année, le Conseil Départemental de Vendée édite une mallette pédagogique sur le sujet.
    À première vue, rien là que de très banal : le Vendée Globe n’est pas, loin s’en faut, le seul évènement utilisé à des fins pédagogiques. Que ceci ne nous empêche pas de jeter un oeil critique sur le bienfondé du choix d’un tel support d’éducation.
    Plus d’un siècle d’« éducation nouvelle »
    Après Jean-Jacques Rousseau, des penseurs, chercheurs et pédagogues ont contribué à l’élaboration de ce que l’on a nommé l’« Éducation Nouvelle ». Au travers de « méthodes d’éducation active », ce courant s’est développé, dans une perspective cognitiviste, dans et hors l’école.
Le cahier du LIEN
  • Du numérique dans l’éducation !
    Sandrine BREITHAUPT (GREN) Pascal MONTOISY (GBEN) Coord. Manuela RAVECCA (GIEN Italie) Pascale LASSABLIÈRE (GBEN) Walid SFEIR (GBEN & GROEN Belgique, Roumanie)
    Alors que le monde peine encore à la gestion de la pandémie du Coronavirus, des questions refont surface dans les réflexions pédagogiques. Celle du « numérique dans l’éducation » en fait partie.
    Pour des raisons idéologiques ou émotionnelles, tantôt rejetés, tantôt adulés, les apports de ce que nous regroupons sous la bannière du numérique font l’objet de grandes discussions dans les milieux de l’éducation. La lutte contre les inégalités sociales et scolaires passerait-elle par l’accès au numérique ?

Extraits Dialogue n° 180

Dialogue n° 180 –  Pourquoi faire école ?

Éditorial
  • Mais à quoi sert l’école ?  Lire
    Patrick RAYMOND, Membre du collectif de rédaction
Regards du dedans… Regards du dehors
  • Du dedans vers l’ailleurs
    Marie BESANÇON, Éducatrice spécialisée
    Educatrice spécialisée, je travaille pour un service de prévention spécialisée au sein d’une association de sauvegarde de l’enfance. Les missions de la prévention spécialisée sont celles de l’aide sociale à l’enfance avec des spécificités : pas de mandat judiciaire, libre adhésion, secret professionnel. Nous sommes une équipe de deux éducateurs ayant un logement professionnel au sein du quartier sans y vivre. Cette situation spécifique est pertinente dans la mesure où elle permet une combinaison entre le dedans et le dehors. En effet, l’implantation sur la durée me permet de connaître et d’être reconnue à l’intérieur d’une entité. La distance géographique et sociale, entre le territoire où j’exerce et mon lieu de vie, me permet de véhiculer de « l’extérieur », autant en ouverture psychique que réelle. En effet, des ailleurs sont possibles et souhaitables…
    L’appartement des éducateurs est un lieu où tout un chacun peut être accueilli lors de temps de permanence ou sur rendez-vous.
  • Trouver un sens à l’école : paroles de collégiens
    Sylvie LANGE, Professeur de français (collège Gisèle Halimi d’Aubervilliers)
    Je suis malade : une grosse rhinopharyngite avec extinction de voix. Mais comment faire à Aubervilliers, en REP+, avec mes classes de 4e et de 3e ?
    J’hésite à m’arrêter, jusqu’à ce que je tombe sur l’émission d’Adèle Van Reeth sur France Culture, traitant de la cour, des courtisans et des Caractères, avec une spécialiste de La Bruyère présentée d’emblée par son  »TITRE  »… de noblesse académique.
    Je n’entends pas le nom de la spécialiste, je n’entends que son  »titre ». De quelle noblesse vient-elle donc, cette experte de la Bruyère ?
    France Culture, d’un coup, m’a rappelé pourquoi je vais prendre le chemin du collège malgré cette voix qui me fait défaut !
    Comment supporter en effet que notre monde et notre société soient encore organisés selon des Titres ? Comment accepter que les élèves d’Aubervilliers ou d’ailleurs n’auront que peu de chance, non pas d’avoir des titres, mais de vivre dans une communauté égalitaire où une majorité ne se ferait pas dominer et exploiter par une minorité supérieurement éduquée ?
  • À quoi sert l’école ?
    Mathilde DEHARBE, GFEN 72
    Cette question nous sommes nombreux et nombreuses à nous la poser, enseignantes, alors que l’on nous demande de plus en plus de mettre l’accent sur les « fondamentaux » du lire, écrire et compter, au-delà desquels le rôle de l’école est aujourd’hui largement attesté.
    Le regard des élèves cités ci-dessous en témoigne, mais voient-ils précisément ces compétences plus implicites, moins « scolaires », que nous cherchons à développer chez eux ? Qu’en garderont-ils à leur entrée dans l’âge adulte et dans le milieu professionnel ?
    Certaines réponses recueillies dans les classes de différentes écoles de la Sarthe l’esquissent.
  • Une société sans école d’Ivan Illich
    note de lecture par Michel BARAËR
    « Sans aucun doute, l’éducation a tout à gagner de la déscolarisation de la société, même si cette exigence paraît, à bien des enseignants, une trahison face à la lutte contre les ténèbres de l’ignorance. Mais la lumière s’est éteinte depuis longtemps dans les écoles » (p. 49).
    À sa sortie, en 1971, Une société sans école fit grand bruit. Son appel au démantèlement du système scolaire était en résonance avec les travaux de Bourdieu qui en dévoilaient alors le caractère ségrégatif, avec les critiques de mai 1968 qui avaient, notamment, attaqué le mandarinat à l’université. Le livre correspondait aussi à un moment de désillusion sur les pouvoirs de l’école : une dizaine d’années après l’ouverture de l’enseignement secondaire à tous les élèves, il devenait de plus en plus évident que cet accès n’allait pas fournir les effets égalisateurs espérés.
L’école au service d’un maintien de l’ordre ?
  • À quoi sert l’Éducation nationale ?
    Claude LELIÈVRE, Historien de l’éducation
    Ce n’est pas — tant s’en faut — la même question que « à quoi sert l’école ? ». Mais, compte-tenu de l’importance qu’a revêtue — et revêt encore — l’Éducation nationale en France, cela peut être l’une des façons d’aborder le problème (ou l’une de ses faces).
    De la profondeur historique de l’Éducation nationale
    Contrairement à ce que l’on croit souvent, la question de l’existence d’une « Éducation nationale » a été posée dès la fin de l’Ancien Régime, avant même le moment historique de la Révolution française.
    Sous l’Ancien Régime, l’école était généralement sous tutelle de l’Église. L’État intervenait très peu et laissait le clergé régulier ou séculier s’occuper de l’enseignement ou le surveiller (à l’exception des universités, relativement autonomes). Le renvoi des Jésuites en 1762 donne à l’État l’opportunité d’être saisi de la question de l’enseignement. Les Jésuites sont évincés de plus d’une centaine de collèges et l’on peut songer à mettre ces établissements d’élite sous une tutelle nouvelle : celle des pouvoirs publics.
  • Le Grand Oral, une évaluation qui nous dit tout
    Joëlle CORDESSE
    En général, la forme donnée à des épreuves d’examen terminal oriente les pratiques enseignantes. J’ai beaucoup aimé, par exemple, l’introduction dans les années 90 d’une interrogation orale sur documents inconnus aux oraux d’anglais du Bac et du BTS. Sa préparation encourageait à faire aborder tous les documents, y compris les textes du programme, d’une manière active, comme des objets à décrire, à explorer, à déconstruire. Nous les abordions de front, sans explications préalables de ma part, et les élèves s’habituaient à prendre des indices, à deviner, à produire des interprétations, à en changer, à débattre, à construire une argumentation. Ainsi, je les encourageais à se mettre dans une position où ils allaient entraîner leur examinateur avec eux sur un chemin de découverte progressive de leur interprétation du document. Leur discours s’élaborait au fur et à mesure, dans la collecte de détails qui deviendraient pour eux des indices, et globalement, dans une situation d’interaction et de dialogue avec eux-mêmes qui faisait une place active à l’auditeur.
  • Continuité vs historicité(s), quand la réflexivité s’en mêle
    La « transformation pédagogique » à l’université (30 avril 2020)
    Eloïse DURAND, Anthropologue, militante pédagogique GFEN (article révisé au 13 mars 2021)La crise sanitaire générée par l’épidémie de coronavirus (Covid19) a fait ressortir la question des inégalités sociales dans le domaine de l’éducation, et son instrumentalisation : au moment où la relation pédagogique est perturbée par une situation inédite de confinement qui nécessiterait un temps de réflexion, les enseignants reçoivent l’injonction de continuer… et continuent… à « maintenir le lien pédagogique vis-à-vis des familles et des élèves les plus éloignés de l’école » (Eduscol, 04/2020), à garantir « le contrôle des connaissances », et le calendrier des examens à l’université (F. Vidal, 03/2020). La « continuité pédagogique » s’apparente ainsi à un phénomène de « double contrainte », aux effets délétères : à travers la généralisation du télétravail, c’est l’évaluation permanente des performances (numériques) de tous les enseignants et de tous les élèves/étudiants. Si cette « fuite en avant »1 est difficile à mesurer pour le corps enseignant, cela fait déjà un moment que lycéens et étudiants manifestent un refus net et catégorique – Mouvements contre l’instauration du « SMIC jeune » (1994), du Contrat Première Embauche (CPE Loi pour «l’égalité des chances,» 2006), ou de la Loi Travail (2016) – mais qui les prend au sérieux ?
  • Crédulurie Une aventure avec Monsieur Sapoje
    Jean-Louis CORDONNIER
    Roman-photo
D’autres possibles déjà là
  • Savoirs en partage, savoirs de passage : pour une école qui apprenne à se déprendre
    Florent RODIER, professeur d’histoire-géographie
    En 1967, lors d’une conférence au Cercle d’études architecturales, Michel Foucault a théorisé le concept d’hétérotopie qu’il définit comme « des lieux réels, des lieux effectifs qui sont dessinés dans l’institution de la société et qui sont des sortes de contre-emplacements, sortes d’utopies effectivement réalisées » 1. Reprenant à son compte ce concept, le philosophe de l’éducation Eirick Prairat avance l’idée que « l’école s’est construite et ce, de manière successive, en référence à trois grandes hétérotopies : l’hétérotopie religieuse, l’hétérotopie militaire et plus récemment l’hétérotopie politique » 2. À la suite de cette observation, Eirick Prairat se pose une question : « Où sommes-nous finalement lorsque nous sommes à l’école ? 3 ». L’auteur tente d’y répondre en dégageant quatre propriétés caractéristiques selon lui de l’école : elle est un lieu spécifique de transmission et de formation ; un lieu intermédiaire et transitionnel ; un lieu d’exercice et de simulation ; enfin, un lieu hospitalier, l’hospitalité étant définie comme l’espace fait à autrui.
  • La diversité culturelle : une ressource pédagogique plutôt qu’un handicap
    L’équipe de l’anthropologie pour tous du lycée Le Corbusier ; Catherine ROBERT, Isabelle RICHER, Valérie LOUYS, Jean-Loïc LE QUELLEC, Christian BAUDELOT et Nicolas GRIMAL
    Considérer que la diversité est un défaut, voire un obstacle, laisse supposer que l’uniformité serait une valeur et un but, et qu’il ne saurait exister de totalité qu’unifiée. Une classe, un lycée homogènes seraient, idéalement, composés d’individus identiques ou interchangeables, qui, comme un seul homme, tireraient bénéfice d’un enseignement commun. On sait depuis longtemps que l’école, quand elle est émancipatrice plutôt que normalisatrice, s’accommode très bien de la diversité des niveaux, à condition d’adapter la pédagogie aux différences et aux spécificités individuelles des élèves.
    Dans la société plurielle qui est aujourd’hui la nôtre, la diversité culturelle est présentée comme un frein à la réussite scolaire : l’antienne de la déploration trouve, à cet égard, nombre de pleureuses pour regretter l’unité fantasmatique d’une école républicaine pour tous. Le vocabulaire est symptomatique : au lieu de diversité, on parle d’hétérogénéité, qu’on suppose une entrave à l’identité.
  • L’école : un objet politique ?
    Alexis AVRIL, professeur de philosophie
    Éduquer au politique et y réfléchir exige d’en faire « pour de bon ». Quoi de mieux que la situation des apprenants, à savoir leur place à l’école, pour y arriver ?
    Quand il est question d’éducation morale, il n’est pas rare qu’on prenne pour objet d’étude des situations que les élèves n’ont jamais vécu et ne vivront jamais (espérons-le d’ailleurs !) de près ou de loin. Ainsi ce fameux exemple en philosophie censé illustrer le débat entre Kant et les utilitaristes : « si tu pouvais sacrifier un homme pour en sauver mille autres, le ferais-tu ? » Même si ces situations recouvrent de véritables problèmes éthiques, les décisions à prendre, complètement décontextualisées, impressionnent sans jamais pouvoir modifier les pratiques et conduisent plutôt les apprenants à prendre des postures de principe (« je sais que je ferais ça si j’étais dans cette situation »). On a alors de beaux objets qui, s’ils peuvent faire penser autrement, ne font jamais agir autrement. Tel est sans doute le défi qui doit occuper l’enseignant dans ce domaine : comment montrer aux apprenants qu’ils sont confrontés à ces problèmes concrètement en contexte scolaire même s’ils n’apparaissent pas comme un dilemme tragique2 ? Et ensuite comment faire le lien entre ces problèmes pratiques et les positions théoriques auxquelles ils renvoient ? Il s’agit bien ici de faire construire un savoir qui s’appuie sur une pratique vécue et donc susceptible d’engendrer des changements réels chez le petit d’homme.
  • Du monde réel à l’univers mathématique
    Sophie REBOUL, GFEN 25
    L’école où je travaille se trouve dans un quartier défavorisé, le français n’est pas la langue maternelle pour nombre des élèves, il est nécessaire de mettre les parents en confiance et de les accompagner pour qu’ils comprennent les attendus de l’école maternelle… Mes collègues d’élémentaire de l’école me rendent compte des difficultés que leurs élèves rencontrent lorsqu’ils ont un problème mathématique à résoudre. Les plus importants obstacles concernent la compréhension de l’énoncé et la réalisation utile du schéma. Il s’agit pour les élèves d’entrer dans une activité complexe où il faut représenter, analyser et résoudre dans l’abstrait en suivant une logique et des méthodes propres aux mathématiques.
    La démarche que je propose à mes élèves de moyenne et grande section, adaptée de celle d’Odette Bassis1, leur permet d’entrer dans ce monde étrange, très éloigné de leur univers sensible. Ils sont amenés à la fois à identifier ce qu’on cherche à travers la question posée et à comprendre le récit en tant qu’énoncé mathématique. Ils doivent extraire les informations nécessaires à la résolution, les représenter symboliquement pour en faire des objets mathématiques qu’ils manipulent dans l’abstrait.
… Autre lieu, même projet
  • Dessiner… je n’sais pas ! Une semaine pour lever les fatalités
    Jacqueline VAHÉ-DEGROUAS
    Dessiner… je n’sais pas ! Bizarre pour un atelier qui projette d’engager un rapport positif aux arts plastiques… j’ai proposé cet atelier à l’Espace des Possibles, lieu de vacances alternatives et enrichissantes, où chacun peut proposer un atelier, de 2010 à 2017. Chez la plupart de ceux qui sont venus, cela sonnait comme une fatalité.
    Pourtant, lors de la synergie — dernière soirée où les vacanciers présentent quelque chose de leur semaine en atelier — en 2010, les participants traversaient la salle, dansant, brandissant et accrochant aux murs les portraits réalisés. D’autres fois, debout, leur livre en images sur le coeur, ils racontaient l’histoire qu’ils avaient inventée et surtout celle de sa création. Ou tenaient table d’auteur, avec leur oeuvre de la semaine… productions personnelles, uniques, artistiques…
Le cahier du LIEN
  • À la guerre comme à la guerre !
    Joëlle CORDESSE Catherine LEDRAPIER (coord., GFEN)
    – La 3ème conquête. Mounira KHOUADJA (ITPEN Tunisie)
    – Face à l’ethnicisme et à l’esprit de guerre, des projets d’éducation multiculturelle. La naissance du GKEN Kenya & Sud-Soudan. John Otinya Iyadi (GKEN / GSSEN), Joëlle Cordesse
    – L’éducation nouvelle… face à la troisième guerre mondiale. Catherine LEDRAPIER (GFEN)
    – Nouvelle guerre… Nouvelle éducation ! Ghoussoune WAHOUD (Liban)
    – Une vie dans la guerre ! (Haïti). Joël Saintiphat, enseignant, formateur (IEHPEN)
    – Catastrophe pédagogique ou pédagogie de la catastrophe ? Sandrine BREITHAUPT (GREN).
    – Les manichéens d’aujourd’hui. Walid SFEIR (GBEN & GROEN Belgique, Roumanie)

Extraits Dialogue n° 179

Dialogue n° 179 – L’espoir aussi se construit

Editorial
  • En mouvement !    Lire
    Jean-Jacques VIDAL
Tisser du commun
  • Le collectif confronté au risque de sa perte. Libres esquisses
    Geneviève GUILPAIN, Professeure de philosophie, formatrice à l’INSPE de Créteil-UPEC
    Lorsqu’en mars 2020 les établissements ont fermé, nous nous sommes retrouvés brutalement seuls, privés délivrés non seulement de la présence des élèves mais de celle de nos collègues enseignants et autres adultes de l’établissement. Nous avons été conduits alors à penser plus précisément le rôle joué dans notre vie professionnelle par « ce collectif », ce « corps », cette « communauté ». Des sentiments ambivalents ont pu nous animer : soupirs d’aise en un premier temps, car le collectif des « chers collègues », qu’il soit bavard ou silencieux, contestataire ou obéissant, routinier ou boulimique de projets est, avouons-le, souvent pesant et rarement à la hauteur de nos attentes. Après les élèves (sic), nos collègues ne sont-ils pas l’objet préféré de nos critiques ? Nous avons aussi pu éprouver quelques frustrations, car il est fréquent et pratique de trouver une collègue prête à nous dépanner, lorsque nous rencontrons une difficulté technique ou pédagogique. Et puis les pauses café sont tout de même plus réjouissantes à quelques-unes que celles que l’on prend seule à quelques mètres de son ordinateur dont les mauvaises plaisanteries nous font généralement grimacer. Ceci entendu, que se joue-t-il plus précisément entre une enseignante et son milieu professionnel ? Qu’est-ce qui fait la force ou la faiblesse du collectif ? Peut-on  en prolonger l’existence virtuellement, ou la recréer ? Peut-il exister à distance ? Et si oui, comment ?

  • Résister sans rompre
    Groupe maternelle du Gfen 25
    Pour les enseignants engagés dans une manière réflexive de travailler, le maintien de pratiques assumées, même discret, exige convictions et détermination.
    On peut les comparer à des « résistants de l’intérieur », puisqu’ils doivent faire preuve de résilience, au sens mécanique du terme : face aux coups portés par le conformisme ambiant et à l’usure ressentie, ils doivent maintenir une structure cohérente dans l’ensemble de leurs pratiques en préservant une identité professionnelle fonctionnelle.
    Face à la hiérarchie qui peut aller jusqu’à suggérer de sauver les apparences en se pliant formellement aux directives (« faites-les, ces évaluations, et transmettez les résultats ; après vous ferez comme vous voudrez, c’est la liberté pédagogique ! »), et aux usagers ou partenaires de l’école qui demandent aux enseignants les plus engagés de justifier les protocoles généralisés, assurés qu’ils auront des réponses de leur part, car ils ne se défaussent généralement pas, il faut tenir !
    Il faut aussi rester le collègue des conformistes malveillants dont les réflexions revanchardes ne manqueront pas d’être lancées si des difficultés habituelles ou des problèmes spécifiques surviennent : « ah bon, c’est pas mieux alors, avec tes méthodes…».
  • Partager le travail (personnel) d’infatigables pédagogues
    Collectif : enseignants de Pantin et Laurent CARCELES
    Depuis quatre ans, Pascal Lahet, coordonnateur pédagogique du Réseau d’Éducation Prioritaire (REP+) Jean Lolive, à Pantin en Seine Saint-Denis, travaille avec nous pour partager les démarches GFEN sur le réseau. Il tente de faire de cette déclaration d’intention institutionnelle une réalité. Pour concrétiser cette idée, des enseignants ont accepté de s’engager avec Pascal Diard et moi, Laurent Carceles, année après année, dans une coconstruction. Laquelle ? Et comment en rendre compte pour nous et pour les autres ? Avec les principes d’auto-socio-construction et l’émancipation intellectuelle, en faisant vivre des démarches et en prenant appui sur le collectif. Car il permet de concevoir et de tenter ses propres démarches, donne des moyens pour formuler sa vision pratique de la pédagogie et de l’enseignement. Le collectif permet aussi, à chacun.e, de faire le constat de ce qu’il s’est approprié, et comment il l’a fait, pour le faire entendre aux autres.

De la politique en pédagogie…

  • Pour une pédagogie de l’aventure
    Jean-Louis CORDONNIER
    Dans la présentation de la Biennale de l’éducation nouvelle de 2017, on peut lire : « La pédagogie au coeur d’un projet politique ». L’éducation nouvelle est par essence politique, et secondairement pédagogique. Mais pour faire de la bonne politique, il faut commencer au ras des fraises.
    Chez mes grands-parents, il y avait un livre illustré de « leçons de choses ». On y voyait les images sereines du travail dans une tannerie, les techniques de bûcheronnage, ou le découpage du cochon. Le projet était sans doute d’enseigner aux élèves à regarder ce qui se passait dans leur environnement de village rural. Ces métiers — sabotier, tailleur, forgeron — ont beaucoup  régressé ou disparu. Maintenant, on n’enseigne plus les leçons de choses aux élèves, on leur enseigne les Sciences. Mais là où l’on aurait pu enseigner une science proche, le choix a été fait d’enseigner une science qui mime un modèle réduit des sciences universitaires contemporaines, une science mise en scène pour la faire percevoir comme ordonnée, sérieuse, rationnelle, éloignée du quotidien. Elle se déguise ou se décore avec des blouses blanches, des microscopes, des oscilloscopes, des laboratoires carrelés. Elle s’exprime par des graphiques, une langue souvent ésotérique. Ses objets sont les virus, les galaxies, les gènes ou les neurones, le climat de la Terre, toutes ces choses invisibles ou inaccessibles.
    Simultanément, on ne fait pas travailler aux élèves les objets de leur environnement immédiat
  • En classe, faire de la poésie pour la poésie : une objection à la pensée rapide
    Justine DONNARD, Professeur des écoles
    Complexité du monde et complexité de la langue
    Faire de la poésie en classe relève d’un choix politique et idéologique : le choix de mettre les élèves, dès le plus jeune âge, en relation avec la complexité de l’homme, du monde et de la langue. Le poète est en alerte constante au monde. Il ne fuit pas la réalité, il l’observe attentivement, sensiblement pour révéler sa vérité et son mystère à travers son regard. La veilleuse du surveillant s’est éteinte – Et le surveillant dans la nuit – s’est éteint aussi – Les enfants en rêvant – avaient soufflé sur lui nous révèle Jacques Prévert. Parfois impuissant face à la réalité de la vie, le recours à la poésie permet de parler et de questionner les mystères, les difficultés et les complexités du monde avec une langue qui se libère des règles et des conventions : Les parents – sont étranges – pour leurs enfants – chers anges – Quand ils naissent – Ils les fessent. – Quand ils meurent, – Ils les pleurent.
    Pour dire cette complexité de l’homme et du monde, le poète use d’un langage libre, inattendu, qui déroute, un langage réinventé comme nous réinventerions notre humanité et notre rapport au monde. Est-ce qu’on peut faire taire – les oiseaux ? – On ne fait pas taire les poètes – Dans une cage – Ils chantent encore.
  • L’enseignement professionnel, révélateur des inégalités face à l’éducation
    Jacqueline BONNARD
    « Éclairer l’action par la pensée, vivifier la pensée par l’action », l’articulation entre pensée et action caractérise l’orientation du GFEN et pousse à analyser les situations afin d’outiller le regard. Étudier l’histoire de l’enseignement professionnel permet d’interroger sa place dans la formation du futur citoyen. Les choix des décideurs sont éminemment politiques, en particulier le référentiel élaboré par une génération sur les savoirs à acquérir par la génération suivante, dans la perspective d’une formation tout au long de la vie. Formation centrée sur employabilité ou éducabilité ? Vise-t-on une « élévation continue du niveau culturel de la nation » ou une formation à deux vitesses où les « laissés pour compte » seront assignés à des emplois peu qualifiés et incertains ? Comment interpréter l’intérêt actuel du patronat pour des écoles professionnelles créées par les entreprises ?
… à la pédagogie en politique
  • Pédagogie et politique : d’un engagement l’autre
    Rozenn MÉTAYER
    Citoyenne engagée depuis 2003 dans des combats pour garder des droits fondamentaux acquis de haute lutte par nos aînés (assurance chômage et santé, système solidaire de retraite, code du travail…), j’ai été sympathisante du mouvement ATTAC, de la Fête de l’Humanité Bretagne et de mouvements écologistes (Collectif Notre-Dame des Landes et Alternatiba). Mon engagement en politique depuis une vingtaine d’années prend corps sur les pavés, sous les bannières et les slogans des manifestations. Mais pas que …
    Militante pédagogique dès ma sortie de l’IUFM en 2001, pour développer l’envie et le goût d’apprendre des enfants, je me suis engagée dans des mouvements de recherche pédagogique : le groupe Freinet 44 puis le GFEN 56. Peu à peu, j’ai compris combien les activités d’apprentissage proposées chaque jour aux élèves, permettent ou non de faire vivre et ressentir des valeurs comme la coopération et l’égalité par exemple. Aujourd’hui, dans le contexte politique et social que nous connaissons, et forte de mes pratiques pédagogiques à l’école élémentaire, j’affirme haut et fort que « je fais de la politique en classe ».
  • Conférence interrompue avec Bernard Friot
    Stéphanie FOUQUET, Jocelyne CLÉMENT, Bernard FRIOT
    Cet article va chercher, par le jeu des interviews, à cerner les enjeux d’un moment politique et pédagogique important pour les acteurs locaux d’une lutte qui n’a pas dit son dernier mot. Le 11 mars 2020 (trois jours avant le premier confinement) a eu lieu une conférence dite «interrompue» avec Bernard Friot, un sociologue et économiste, professeur émérite à Paris X et militant du Parti Communiste Français. Plus d’une bonne centaine de personnes ont participé à cette conférence qui s’est tenue dans les locaux du PCF à Vaux Le Pénil, en Seine et Marne, avec des gens venus de nombreux secteurs d’activités à l’appel d’un collectif très actif dans le mouvement contre la loi retraite, le GIGM 77 (Grévistes Interprofessionnels du Grand Melun).
  • Que peuvent les démarches du GFEN hors l’école ? Récit de la construction d’un calendrier des grévistes
    Damien SAGE
    Le GFEN offre des outils qui ne permettent pas seulement de faire classe avec intelligence, mais aussi de questionner ses pratiques de classe et les valeurs sous-jacentes. À ce titre, si je n’avais pas rencontré le GFEN et les personnes qui portent ses valeurs, je ne sais pas si j’aurais tenu très longtemps dans le métier d’enseignant. Cela m’a permis aussi bien de faire classe différemment, que de construire du sens concernant ce que je fais avec les élèves.
    De plus, cheminer avec le GFEN m’a permis de me construire une conscience politique. Au travers du prisme de l’école et grâces aux échanges que j’ai pu avoir avec les autres militants du mouvement, je me suis peu à peu réapproprié les grilles de lectures et les analyses politiques qui traversent le mouvement. Cela s’est bien évidemment fait dans une dialectique permanente avec la « réalité ». Au sein de cette « réalité » les idées du GFEN me permettent de faire du tri et de me mettre en accord avec les valeurs que je tente de porter, que ces valeurs soient conscientes ou inconscientes.

Controverse : utopie ou visée ?
  • Comment penser l’avenir ? Par l’utopie ? Par le projet ? Par la visée ?
    Débat entre Pascal DIARD et Michel NEUMAYER, questionnés par Dominique PIVETEAUD
    Dominique : Certains évoquent l’idée que le contexte actuel nous condamne à l’utopie, comme si ce concept n’était pas directement lié à l’action. Que pensez-vous de cela et pourriez-vous proposer une définition du terme d’utopie ?
    Michel : Je rappelle rapidement que la vulgate d’utopie renvoie aujourd’hui à des représentations qui, de mon point de vue, sont à plus d’un titre des biais cognitifs. Je postule qu’ils nous empêchent d’en penser la richesse. Quels biais ? D’un côté, le rappel d’errements liés au passé des systèmes totalitaires du 20e siècle mais sans en retracer la complexité de leurs origines. D’un autre « l’oubli » d’utopies socialistes passées – je pense aux kibboutz de l’État d’Israël naissant – sans considérer à quel point il sert les actuels pouvoirs sur place. Sans parler d’autres approximations autour de « l’île » de Thomas More (16e siècle) et son désir humaniste du bonheur trouvé. Ou encore aux 18e et 19e siècles les phalanstères, familistères et autres cités ouvrières du capitalisme de cette époque. Cela fait beaucoup !

Laïcité : une question toujours vive

  • De la nécessité de déplier le concept de laïcité
    Patrick RAYMOND, professeur d’histoire, géographie, enseignement moral et civique
    La laïcité a une histoire — sa dimension épistémologique
    Invention pour résoudre des problèmes pratiques, elle a d’abord été, pour reprendre une terminologie empruntée à Odette Bassis, un « savoir-pour-soi » (invention pratique) avant de devenir un « savoir-en-soi » (objet d’étude et de transmission).
    Ces problèmes se sont posés à la France bien avant que le mot « laïcité » n’apparaisse dans la langue (vers 1871) et qu’il nomme une pratique inscrite dans des lois. Le concept devant sans cesse être revisité. Ces problèmes sont au nombre de trois essentiellement :
    %u2022 Assurer le bien commun (l’intérêt collectif) dans une société diversifiée. Produire du collectif en dépassant le particulier ; avec pour corollaire la primauté de la loi civile dans le domaine public. Les sentiments particuliers d’une partie de la population ne doivent pas dicter la loi commune en même temps qu’une démocratie « ne peut interdire l’expression d’un point de vue dès lors qu’il heurte quelqu’un ».
    %u2022 Assurer la souveraineté nationale en ne dépendant pas d’une autorité extérieure (physique et/ou morale) dans la prise des décisions qui intéressent le bien commun.
    %u2022 Garantir les libertés, en premier lieu celles de l’individu, parmi elles, celle de conscience
  • Création et savoir (s) démocratique (s)
    Patrick RAYMOND
    Dans Le Monde des Livres en date du 30 janvier 2015, Jean Birnbaum écrivait :
    « […] les terroristes ne savent pas lire […] ils s’avèrent incapables d’envisager la lecture comme pratique d’interprétation, comme élan vers l’autre, comme geste de vie. Car lire ce n’est pas vitrifier le langage, c’est le remettre en mouvement. Lire, ce n’est pas idolâtrer un texte, c’est l’ouvrir à l’infinie pluralité du sens. »
    Sans mettre en cause leur capacité à déchiffrer les mots, il parlait de lire le livre dont ils se réclament ; mais la généralisation à un lire-comprendre, que je suggère, en extrayant ce passage, a toute sa pertinence. « Le seul vrai lire étant un lire actif, créateur et critique, un lire entre les lignes. » écrivait Henri Bassis.
    J’ajouterais, les terroristes ne savent pas écrire non plus. Écrire au sens, dans et par des écritures de création, de permettre la construction de personnes créatrices, responsables, critiques, soucieuses de l’Autre, porteuses des valeurs de la République et du vivre ensemble.
Note de lecture
  • L’école de Jules Ferry : un mythe qui a la vie dure de Jean Foucambert
    par Dominique PIVETEAUD, Conseiller pédagogique
    Relire aujourd’hui l’ouvrage de Jean Foucambert L’école de Jules Ferry, paru en 1986, a quelque chose d’édifiant et de troublant. Édifiant dans le sens où je retrouve un objet qui a participé à l’édification de ma conscience politique d’enseignant et qui a contribué à construire un réflexe de chercheur de petite bête et de dénicheur des valeurs sous-jacentes aux pratiques. Troublant dans la mesure où l’analyse que faisait Jean Foucambert de l’école dans les années 1980 demeure d’une actualité brûlante et inquiétante. La question posée par l’auteur : en quoi L’école de Jules Ferry nous concerne-t-elle encore ? Est encore la nôtre actuellement si notre intention est bien de questionner les fondements idéologiques qui pilotent les politiques éducatives. Le GFEN n’ayant pas pour objectif de transformer la structure elle-même, la question porte bien évidemment sur la participation des pratiques pédagogiques quotidiennes à la pérennisation d’un modèle paternaliste et par voie de conséquence à la continuité des inégalités et à l’aphasie de la pensée. La question de l’émancipation est au coeur de l’affaire et l’on sent bien combien, sans en faire le plus souvent un objectif revendiqué et assumé, les praticiens agissent, dans un insu bien entretenu, des modalités pédagogiques plus asservissantes qu’émancipatrices. Du point de vue du formateur, faire levier n’est pas chose simple.

Le cahier du LIEN

  • Face au covid ?
    Colette CHARLET (GFEN) Claire DESCLOUX (GREN) Mounira KHOUADJA (ITEN Tunisie)
    Notre terre est ronde, le monde est immense et nous savons tous que des peuples souffrent, se révoltent, se battent et meurent. Chacun le sait dans l’instant, quel que soit l’événement. Les ondes messagères sont porteuses de bonnes et de mauvaises nouvelles. Notre terre est lisse pour ceux qui restent spectateurs de catastrophes lointaines. Il a pourtant suffi qu’un virus inconnu s’immisce et étende ses tentacules du Nord au Sud et d’Est en Ouest pour que cette terre si lisse et ce monde si grand se transforment en une seule unité, atteinte d’une même souffrance.
    Chacun, petit ou grand, a vu son univers changer : le moindre souci a enflé, parfois au point d’exploser. Un quotidien difficile s’est alors souvent révélé irréalisable et insensé. Les adultes ont parfois tangué, voire chaviré, quel que soit l’amarrage. Les enfants eux ont continué à jouer, à apprendre, mais peut-être plus à comprendre. À développer leur esprit critique.

Extraits Dialogue N° 178

Dialogue n° 178 – Les « méthodes » à l’épreuve des finalités

Actes des rencontres nationales d’éducation dans et hors l’école – Besançon 12 octobre 2019

Ouverture
  • «Tous capables !» une visée anthropologique à concrétiser dans les pratiques réelles  Lire
    Pascal DIARD
  • Attention au «virage neuronal de l’éducation»
    Michel HENRY
    Chers amis du GFEN, nous sommes en présence d’une offensive idéologique d’une ampleur rarement atteinte et nous devons mobiliser toutes nos forces pour la contrer.
    Vous pensez peut-être que j’exagère ? Jugez-en.
    D’abord, voici quelques citations relevées dans la presse et dans des ouvrages récemment parus. Sous le titre L’engagement actif dans Apprendre, les talents du cerveau, le défi des machines, livre écrit par Stanislas Dehaene édité chez Odile Jacob en 2018 : « Le mieux est une pédagogie qui rende l’étudiant actif, mais qui soit étroitement guidée par l’enseignant – un enseignement structuré qui commence par les fondamentaux pour construire une pyramide de sens… L’échec du constructivisme le montre bien »… « L’idée que l’enfant doit être attentif… ne doit pas être confondue avec le constructivisme connu également sous le nom de pédagogies actives ».
    Ainsi le GFEN est en première ligne.
    Mais l’offensive ne se limite pas au terrain pédagogique. Elle est beaucoup plus profonde.
Ateliers
  • La copie promenée
    Justine PAUL-GUEBERT
    La copie est un exercice incontournable à l’école auquel les élèves ont recours de manière fréquente. Pourtant, les enseignants ont souvent à se plaindre des erreurs de copie de leurs élèves.Mais qu’est-ce que copier et comment enseigner la copie ?
    Nous tenterons d’abord de définir la copie en nous intéressant à ses fonctions et à ses usages en classe. Ensuite, nous nous pencherons sur le rôle de l’enseignant face à cette compétence. Enfin, nous illustrerons nos propos en soumettant une démarche utilisable dans des classes de cycle 2, 3 et 4.
  • Écrire pour penser, apprendre et se construire
    Brigitte ANGÉLI et Pascale BILLEREY
    Pour une approche culturelle de l’écrit
    L’expresso du Café Pédagogique du 14 mai 2020 a publié une tribune dans laquelle une quinzaine de hauts fonctionnaires (Dasen, inspecteurs généraux, cadres du ministère) dénoncent un projet éducatif réactionnaire à l’encontre de la liberté pédagogique des enseignants, mais aussi de la « liberté de pensée d’une Institution toute entière mise au pas ».
    Ils déplorent un scientisme débridé : « Ici, ne règne qu’une vision de la recherche cognitive, sans la didactique, sans les sciences de l’éducation, ni la sociologie de l’école.» « «Tout se joue dans le cerveau» dit le ministre. Vive l’imagerie du cerveau. À bas les 100 ans de recherches pluridisciplinaires sur l’école ! La communication ministérielle est formelle, en laissant croire que la simple «remédiatio» technique, fondée sur des procédures et des protocoles, sur du «pilotage par les preuves» suite à des tests de positionnement pourra vaincre la difficulté scolaire. Les neurosciences (et encore, une école particulière) sont érigées au rang de nouvelle doctrine pédagogique au détriment du savoir-faire des enseignants et des personnels d’encadrement de terrain ; elles se substituent ainsi à la compréhension des enjeux culturels, sociaux et cognitifs des apprentissages scolaires ».
    Notre groupe GFEN Franche-Comté se retrouve dans les propos de cette tribune car ils correspondent à ce que nous proposons dans nos travaux : à l’opposé d’une conception de la langue exclusivement phono-linguistique, développer une approche culturelle de l’écrit.

  • Si lire c’est comprendre
    Jacques BERNARDIN
    Les prescriptions officielles concernant l’apprentissage de la lecture, fortement ramassées sur la maîtrise du code et la combinatoire dès le début du CP, sont désormais étendues à la maternelle, invitée dès la moyenne section à en préparer les conditions. S’il ne s’agit pas de nier la part du code dans l’accès à la maîtrise, cela ne saurait si simplement répondre à la réalité des difficultés des élèves d’une part, à l’attendu formatif d’autre part, lié à la compréhension.
    Comme ces Rencontres y invitent, il faut soumettre « les méthodes à l’épreuve des finalités ». La réussite de tous étant l’objectif visé, il apparaît indispensable de considérer de plus près ce qui peut y faire obstacle… y compris dans les classes qui se sont rangées sous la prescription.
  • Un débat, ça s’prépare ou ça s’invente ?
    Pascal DIARD
    C’est l’histoire d’un atelier prévu qui s’est déroulé dans des conditions imprévues. Permettez-moi donc de faire l’éloge de la spontanéité cultivée, autrement dit de tenter de répondre à comment, grâce à la pratique du débat, faire de la contingence un moment prévisible de construction culturelle.
    Un atelier imprévu mais pas imprévisible
    Ce qui n’était pas prévu, c’était l’absence de dernière minute de l’animateur et, par conséquent, des documents de la démarche qu’il comptait faire vivre : comment Jérôme, dans ses classes de 5e d’un collège de Fontainebleau, créait les conditions d’un débat sur la scientificité mathématique des nombres négatifs.
  • Conceptualiser ses pratiques. Un retour réflexif indispensable
    Michel HUBER
    La finalité de l’Éducation nouvelle, du GFEN en particulier, est de remonter, appreneurs et apprenants, jusqu’aux causes premières des réalités. Remonter jusque là où nous le permet l’état des sciences du moment. Un double mouvement s’opère de l’objet au concept, des concepts à l’action sur ces objets.
    Remonter jusqu’au fondement théorique n’est pas l’apanage des « bons élèves », de « l’élite » du futur. Nos pratiques rendent possible le « tous capables » d’accéder à la compréhension du Monde, de mettre le doigt sur ce qui serait décisif pour orienter cette dispensable action sur le réel.
    Les journées d’étude de Besançon étaient l’occasion de nous focaliser sur les concepts qui orientent nos pratiques pédagogiques. Pour ce faire, j’ai imaginé un dispositif sur 2 heures 30 qui mobilisa 17 participants sur la problématique suivante : Conceptualiser ses pratiques, quel sens cela peut-il avoir ? Pour quelle visée sociale ? Avec quel (s) dispositif (s) ? Pour quelle efficacité ?
  • Pour une anthropologie des savoirs scolaires
    Geneviève ORION
    La philosophie à l’école peut s’aborder de bien des manières : il s’agit souvent d’un débat animé par l’adulte qui tient alors une place centrale. Le courant AGSAS2 (Ateliers de Groupes de Soutien au Soutien) est reconnu tout autant que les autres par la chaire de philosophie à l’UNESCO, avec une approche particulière initiée par Jacques Lévine.
    En tant qu’enseignante spécialisée en RASED, cette démarche est un outil qui répond à plusieurs enjeux : développer activement les compétences psychosociales, mettre à disposition des classes et de leurs enseignants un dispositif accessible à tous, et apprendre aux élèves à penser par soi-même. Parmi les points forts qui sont en jeu, il est possible d’identifier l’écoute mutuelle, le respect de la parole des pairs, le sentiment d’appartenance à un groupe, l’égalité entre pairs, la confiance en l’autre, la pensée intériorisée, la confiance en soi et l’estime de soi. Le protocole est simple et il est un fondement de cette démarche : il propose d’emblée un retrait de l’adulte ou de l’animateur, les participants régulant eux-mêmes la distribution de la parole, l’écoute respectueuse et le maintien dans le sujet. La position de l’adulte en retrait du groupe qui échange, exige de développer une posture d’observation confiante et patiente en la capacité du groupe et la ressource de chaque participant.
  • Les enjeux d’une démarche de construction du savoir
    Odette BASSIS et Pascale BILLEREY
    Dans le champ de l’Éducation revient souvent la nécessité de relancer le débat, la réflexion sur les enjeux éducatifs. Où se dirige l’Éducation ? Du côté des sciences uniquement cognitives ? Du côté d’une école se satisfaisant d’apprentissages mécaniques ? Du côté d’une école centrée sur une certaine « naïveté naturaliste » où l’enfant est par nature créatif, mais où la question sociale de la transmission de savoir reste secondaire ? Ou du côté d’une école qui permette à chacun d’accéder aux savoirs complexes, de devenir citoyens dans le savoir ? À quoi ça sert d’enseigner et d’éduquer si tout n’est qu’affaire de dons, de talents ou d’ADN ou d’appel à l’intérêt spontané des élèves ce qui se révèle finalement très élitiste? Stanislas Dehaene (2018, p. 263) en rajoute encore dans ce débat, en assimilant le constructivisme à de la pédagogie active ou de la découverte : « Pas question pour autant de laisser l’élève tout découvrir par lui-même, ce serait retomber dans l’écueil des pédagogies de la découverte ».
    L’École se retrouve en tension, clivée entre toutes ces différentes orientations éducatives. C’est pourquoi il nous semble primordial dans un premier temps d’essayer de débusquer ces dérives computationnelles dans l’Éducation, voire même de mettre en exergue certaines falsifications éthiques, pédagogiques, politiques. Dans un second temps, nous revisiterons les enjeux de la démarche d’auto-socio-construction du savoir : un projet anthropologique qui dévoile une conception de l’homme dans
Les mouvements participant aux Rencontres

  • L’AFEV (Association de la Fondation Étudiante pour la ville)
    Eymeric MINUEL
    L’AFEV agit depuis 30 ans dans l’engagement citoyen et solidaire des étudiants, dans la Ville. Forte de cette conviction que la jeunesse étudiante a soif d’engagements, que ces engagements sont tout à la fois une ressource essentielle à mobiliser dans les territoires de la politique de la Ville, et aussi que par ces engagements, nous pouvons accompagner les étudiants dans l’apprentissage de la citoyenneté, en prenant une place dans leur territoire d’étude.

  • Les CEMÉA (Centres d’Entraînement aux Méthodes d’Education Actives)
    François SIMON
    Le parti pris des personnes
    « Tout être humain peut se développer et même se transformer au cours de sa vie, il en a le désir et les possibilités », c’est un des principes des Ceméa et c’est le leitmotiv qui nous anime dans toutes les actions que nous mettons en place.
  • Le GFEN (Groupe Français d’Éducation Nouvelle)
    Jean BERNARDIN
    Le GFEN est un mouvement de praticiens chercheurs dont les travaux s’enracinent dans les apports de ses présidents successifs :
  • L’OCCE (Office Central de la Coopération à l’École)
    Véronique BARAIZE
    CONTRIBUER À L’ÉDUCABILITE DU GENRE HUMAIN.
    Comment les méthodes promues par l’OCCE permettent-elles la réussite de tous ?
    L’OCCE est plutôt reconnu comme un mouvement d’éducation sociale quand il est connu autrement que pour la gestion de l’argent. Il a en effet développé l’éducation citoyenne dès son origine en faisant de la coopérative scolaire un levier d’apprentissages citoyens.
  • Les PEP (Pupilles de l’Enseignement Public)
    Aline VOISIN
    Comment les PEP participent à l’éducabilité du genre humain ?
    Les Pupilles de l’Enseignement Public, mouvement d’éducation populaire, créé en 1915 par des enseignants a toujours eu la mission de venir en aide aux enfants les plus fragiles et en premier lieu sur le plan de l’éducation au travers des différentes activités développées tout au long de son histoire.
Clôture
  • Les méthodes à l’épreuve des finalités
    Jacques BERNARDIN
    Cette question concerne l’activité de l’éducateur, de l’enseignant mais aussi le pilotage du système éducatif. En effet, les pratiques pédagogiques ont aujourd’hui tendance à être de plus en plus encadrées, au motif d’une efficacité qui aurait été attestée par des méta-analyses de source nord-américaines notamment et/ou par l’imagerie cérébrale. Importée du modèle médical, l’evidence-based education l’éducation basée sur des preuves — rejette toute autre approche du côté des sciences molles, discutables voire soupçonnées d’idéologie. Ainsi, la sociologie est accusée d’« excuser » les difficultés scolaires, quand l’approche méthodique assise sur les neurosciences fait promesse de les araser.
    Non seulement l’imposition de méthodes dites « scientifiquement fondées » heurte le principe de liberté pédagogique, reconnu depuis la fondation de l’école publique et rappelé dans la Loi Le Pors de juillet 1983, mais on peut aussi s’interroger sur les preuves en question. Preuves de quoi ? Certes, ça s’allume sur l’écran, mais est-ce que cela suffit à produire un raisonnement brillant ? Arrêtons-nous sur quelques zones d’ombre…
Hors thématique
  • La notion de rapport au savoir : origines et problématiques
    Bernard CHARLOT
    La vie est une aventure — avec des imprévus, de l’inattendu, des rencontres. Mais cette aventure est rarement l’effet de complets hasards. Quand on y réfléchit, apparaissent des logiques qui font que ces rencontres inattendues étaient possibles ; on ne rencontre pas n’importe qui, n’importe où, n’importe quand. Le GFEN a reçu de l’extérieur la notion de rapport au savoir, par mon intermédiaire, au début des années 80, mais, d’une certaine façon, cette notion fait partie de son ADN, tout au moins implicitement.
    La question du rapport au savoir est aussi ancienne que la philosophie. « Connais-toi toi-même », conseillait déjà Platon, et Descartes validait l’évidence des idées claires en partant de la coïncidence entre « je pense » et « je suis ». Si la question est ancienne, la notion est plus récente. Elle apparaît pour la première fois, semble-t-il, chez Lacan, en 1960, dans une conférence où il critique l’idée d’unité du sujet et pose le rapport au savoir comme élément constitutif de ce sujet. La notion a donc partie liée, dès l’origine, avec la psychanalyse, la question du sujet et celle du désir. Elle a partie liée, également par une autre voie, avec la sociologie, la question de l’école et celle des inégalités sociales face à l’école. Elle apparaît en effet, sous des formes voisines, chez Bourdieu — d’une façon indépendante de Lacan. Dans La Reproduction1, en 1970, Bourdieu et Passeron utilisent les expressions « rapport au langage », « rapport au langage et au savoir », « rapport à la culture ».
  • Les gestes professionnels dans la classe. Éthique et pratiques pour les temps qui viennent de Dominique BUCHETON
    Note de lecture par Maria-Alice MÉDIONI
    Attention : c’est un livre politique que vous aurez entre les mains si, et je vous y engage, vous vous y plongez ! C’est un livre qui éclaire la pratique, fait le pari de l’humain, place les enjeux à la hauteur de la planète et donne de l’énergie.
Le cahier du LIEN

  • À demain la terre ! Petits cailloux d’éducation nouvelle
    Emmanuel
    BOUVIER (GREN) Jean-Louis CORDONNIER Michel NEUMAYER (GFEN) Diana DRAGHICI (GROEN) Lorson OVILMAR Joël SAINTIPHAT (IEPENH) Étiennette VELLAS (GREN)
    « Le monde d’après tant espéré risque fort d’être semblable, sinon identique, au monde d’avant » écrit récemment Dominique Bourg1, philosophe, professeur à la Faculté des géosciences et de l’environnement de l’Université de Lausanne. Il ajoute : « Alors que nous menacent diverses catastrophes écologiques et autres effondrements, jamais nous ne nous sommes si peu montrés prêts à les anticiper, ni même à leur faire face. En cause : le progrès tous azimuts d’un certain crétinisme, tant au plan individuel que collectif. Doit-on définitivement désespérer ou peut-on rêver a%u0300 une possible décrétinisation ? » Voici une parole forte d’un très honorable Cassandre à laquelle ce supplément du LIEN donne une réponse optimiste.
    Il existe en éducation, hier comme aujourd’hui, bien des lieux où des ruptures s’inventent. Celles présentées ici illustrent une Éducation nouvelle où se croisent le faire réfléchi au quotidien (dans une école élémentaire suisse, dans un lycée français), l’expérimentation sociale intergénérationnelle (en Roumanie), un regard sociétal critique sur un pays caribéen (Haïti) en quête d’une justice climatique autant économique que culturelle et encore le signalement d’un Appel à éduquer pour le Jour d’après (+ 2 degrés).

Extraits Dialogue N° 177

Dialogue n° 177 – Pour que les élèves se saisissent pleinement de leur travail personnel

Éditorial

  • Un numéro historique ? Lire
    Patrick RAYMOND

Le travail personnel : de quoi parle-t-on ?

  • Le «travail personnel» de l’élève : une histoire plus longue que l’on ne croit
    Claude LELIÈVRESi l’on fait un grand bond en arrière d’un siècle et demi, bien au-delà des péripéties des  »devoirs faits » ou des  »orphelins de 16 heures  » de notre XXIe siècle, ou même des « accompagnements » individualisés voire personnalisés, bien au-delà aussi des tentatives de développement du  »travail autonome » des années 1970, on peut se retrouver en plein coeur du fonctionnement ordinaire des élèves de l’enseignement secondaire dans les années 1870 par la description qu’en fait alors Michel Bréal, l’un des grands idéologues républicains des débuts de la Troisième République. Elle vaut d’être largement citée car elle est tout à fait significative, et même  »renversante ».
    « En classe, le professeur contrôle le travail de l’étude et fournit pour l’étude de nouveaux matériaux à mettre en oeuvre. Assurément le professeur exige en classe une certaine somme d’attention et d’activité ; mais personne ne niera que le principal effort se fait à l’étude. C’est là que l’élève exerce son esprit et étend ses connaissances en faisant les devoirs, en apprenant les leçons, en préparant les auteurs. Quand il vient s’asseoir sur les bancs de la classe, il sait déjà d’avance, il a déjà manié tous les objets dont on va l’entretenir.

  • Le travail personnel : devoir ou nécessité ?
    Jacques BERNARDINLe manque de travail personnel est souvent évoqué comme facteur aggravant voire cause de difficultés scolaires. Mais de quoi parle-t-on : de l’investissement personnel dans la classe ou de l’effectuation du travail demandé en dehors de la classe ? Dans la réalité, on sent bien que l’un va avec l’autre. L’élève accroché en classe est fréquemment celui qui rechigne le moins à «faire ses devoirs» à la maison. À l’inverse, les élèves qui les désinvestissent sont fréquemment les plus fragiles en classe. Finalement, le manque de travail personnel est-il cause ou conséquence de ce qui se passe en classe ?
    Les uns ne font leur devoir d’écolier que sous la contrainte (« si on n’est pas derrière… », disent les parents), par souci de se mettre en conformité avec ce qu’ils perçoivent comme une exigence de l’institution scolaire (il faut faire ses devoirs), quand les autres estiment nécessaire de prolonger le travail de l’école pour en tirer tous les bénéfices, de façon durable.
    Quelles sont les raisons de cette désaffection du travail personnel par certains élèves ? Sur quoi peuton agir pour transformer les choses ? Mais tout d’abord, interrogeons la place du travail demandé hors la classe dans la réussite scolaire.
  • Le travail personnel : les gestes de l’étude
    Maria-Alice MÉDIONIIl convient, me semble-t-il, d’interroger la notion de « travail personnel » pour lever certaines confusions. Le mot « travail » renvoie nécessairement à l’idée d’effort mais nous savons que beaucoup des apprenants dont on regrette qu’ils ne travaillent pas assez passent pourtant beaucoup de temps à s’efforcer de faire les tâches demandées par l’enseignant, parfois davantage que d’autres qui, eux, apprennent « sans effort ». Les premiers souffrent d’un sentiment de profonde injustice lorsqu’ils entendent ce type de reproche et voient, parallèlement combien l’enseignant loue les mérites des seconds qui se sont beaucoup moins « tués à la tâche ». Mais si l’on se réfère à la définition du travail selon le CNTRL (Centre national de ressources textuelles et lexicales), il faut distinguer le travail qui « vise à la modification des éléments naturels, à la création et/ou à la production de nouvelles choses, de nouvelles idées » et « améliore nos facultés morales ou intellectuelles », de l’« Activité contraignante qui occupe. (…) Besogne, tâche ». Le mot « personnel », quant à lui, renvoie à l’apprenant lui-même et au fait que ce travail ne peut être fait par personne à sa place, mais, à l’école, l’on a tôt fait d’assimiler « personnel » à « individuel ». Enfin, le « travail personnel » est, dans l’immense majorité des cas, compris comme le travail hors la classe, concrètement, celui des devoirs à la maison. Je me souviens, par exemple, d’une formation suivie à l’IFE en 2014 sur le travail personnel où seule la question des devoirs à la maison avait été, en fin de compte, abordée.

C’est en classe que ça commence…

  • Un carnet intime des savoirs. Le bloc-notes
    Aurélie JUGANLa participation au groupe GFEN 25 qui s’intéresse aux écrits réflexifs m’a permis d’imaginer un dispositif qui permettrait de systématiser l’exercice de l’expression des représentations des élèves dans un lieu suffisamment sécurisant pour permettre leurs remises en cause. Cet espace d’expression écrite avait pour ambition d’engager l’élève dans la mise à jour de ses représentations du savoir travaillé au cours de la séance. L’objectif est de mettre en chantier ces représentations en les confrontant à d’autres. Ces dernières peuvent être celles des élèves d’un groupe de travail, des auteurs de documents proposés, des oeuvres artistiques, ses propres représentations initiales consignées auparavant ou encore des intervenants extérieurs.
  • Mettre les élèves en travail pour qu’ils s’émancipent : une question de méthode ?
    Florent RODIERJ’ai très vite compris quel professeur je ne voulais pas être. Il m’aura, en revanche, fallu du temps pour entrapercevoir enfin le professeur que j’aspire à devenir. Lors de mes premières années en tant qu’enseignant, j’ai été animé par trois sentiments : l’illégitimité, l’insatisfaction et l’irrésolution. Illégitimité parce que je ne me sentais pas en capacité d’aider les élèves. Insatisfaction parce que je portais un regard très sévère sur mon travail. Irrésolution, enfin, car « pour quoi éduquer ? » était une question qui ne me quittait pas.
    Pendant trois années, animé par ces sentiments voisins, j’ai multiplié les tâtonnements, les errements, mais aussi les lectures et les découvertes. Puis, à la fin de l’année scolaire 2019, je me suis lancé un défi : « Tu as accumulé des connaissances, maintenant, sers t’en afin de créer ta propre méthode. Et une fois que tu auras créé ta méthode, satisfais-t’en jusqu’à ce que tu en trouves une meilleure. » Et ainsi, trois mois durant, j’ai mis au point cette « méthode », fruit de plusieurs d’années de réflexions tous azimuts. « Le tous capables ! », si cher aux militants du GFEN, vaut aussi, et peut-être même au premier chef, pour les enseignants.
  • Du travail en classe au travail personnel. Présentation d’une action de formation
    Pascale BILLEREY, Philippe LAHIANISur la question du travail personnel de l’élève, beaucoup de demandes de formation en direction d’enseignants, d’assistants d’éducation, d’acteurs périscolaires et de parents nous ont été adressées ces dernières années. Cela peut s’expliquer par le fait que depuis ses origines, le GFEN se préoccupe d’enrichir le pouvoir d’agir des citoyens afin qu’ils osent s’engager dans une réflexion / action critique « Contribuer conjointement à former l’Homme et le Citoyen, à éclairer l’action par la pensée, à vivifier la pensée par l’action. » (Henri Wallon)1
    Comment dépasser le large consensus qui affirme que l’accès à la réussite se développe par le travail personnel, sans s’attaquer à la question des inégalités dans le rapport au savoir et à la culture scolaire, sans analyser le processus de la transmission des savoirs ?
    Comment faire prendre conscience aux élèves, enseignants et acteurs éducatifs que le travail scolaire nécessite un questionnement « instruit », pas de simples informations ou connaissances à décliner, mais une appropriation de concepts et que finalement, le travail personnel, ça peut se préparer déjà dans la classe ?

Pour quoi s’engager ?

  • Travail personnel de l’élève : comment créer du désir sur le temps de classe ?
    Damien SAGELa question du travail personnel de l’élève est souvent abordée sous la question des devoirs faits à la maison. L’élève qui ferait ses devoirs serait celui investi dans ses apprentissages et inversement celui qui ne fait pas ses devoirs serait démobilisé par rapport aux apprentissages. Ce point de vue a été critiqué par la recherche en sciences de l’éducation1, même si ces critiques sont restées très confidentielles, que ce soit pour les parents – qui restent toujours très en attente des devoirs, même si ceuxci pourrissent leur vie de famille – et pour les enseignants – collègues qui sont nombreux à ne pas « comprendre » pourquoi les élèves ne font pas leurs devoirs et les sanctionnent pour les devoirs nonfaits.
    La question sousjacente est celleci : une fois que l’élève est sorti de l’école, que faitil de ce qu’il y a fait et appris ? Peutil intégrer ce qu’il a fait et appris sans y revenir en dehors du cadre du cours ? La question est donc celle de l’appropriation des savoirs par les élèves.
    En maternelle, où je travaille, la question des devoirs ne se pose pas : il n’y en a pas ! Et pourtant, mes élèves construisent des savoirs, grandissent, apprennent, bien qu’il n’y ait pas de travail imposé à la maison ! Comment l’investissement personnel des élèves de maternelle dans leurs apprentissages (et pas seulement dans leur travail scolaire) peutil permettre de penser différemment la question du travail personnel de l’élève ?

  • Accompagnement au travail personnel d’un jeune réfugié apprenant notre langue
    Joëlle CORDESSEJe suis marraine d’un jeune réfugié afghan. Je le vois peu, habituellement une fois par semaine. Il est logé dans un foyer de réfugiés à 60 km et deux heures de bus de chez nous. Il vient dormir à la maison le mardi soir après l’entraînement de volley. Quelquefois, le mercredi matin, je passe un peu de temps avec lui pour lui faire travailler le français. Il est en France depuis un peu plus de deux ans. Il voit peu de Français, à part son « social ».
    Au début, il ne communiquait que par l’intermédiaire de son Iphone, à l’aide d’un traducteur automatique auquel il dictait ses phrases dans sa langue. Il montrait ensuite le texte obtenu sur le téléphone, quand on n’avait pas réussi à se comprendre en anglais. Une de mes premières victoires a été de le convaincre de demander à son téléphone une traduction vers le français plutôt que vers l’anglais. Il a d’abord eu un peu de mal à croire que, vivant en France, l’anglais ne lui suffirait pas.
  • Je triche donc j’apprends   Supplément en ligne
    Jean-Louis CORDONNIER

Les parents : un relais nécessaire

  • Parents/enseignants : le pari de la reconnaissance et de la complémentarité
    Pascale BOYER, Claire BENVENISTEEn partant des apprentissages réussis par les enfants à la maison, donner à voir aux parents la fonction culturelle et socialisante des apprentissages scolaires.
    Voyant les parents déserter nos réunions de rentrée ou ne pas répondre à nos demandes de rendezvous, nous sommes parfois tentés de céder aux sirènes médiaticopolitiques qui déclarent les familles populaires démissionnaires. Sans même avoir à en appeler à nos valeurs démocratiques et émancipatrices, les chiffres de l’Insee1 et le travail ethnographique mené par S. Kakpo2 nous remettent les idées en place : les familles populaires se mobilisent autour de la question des devoirs, ont foi en leur utilité, et prescrivent même souvent du travail supplémentaire. L’engagement de ces familles montre sans ambiguïté qu’elles ne sont pas démissionnaires.
    Comment expliquer alors que les enseignants éprouvent tant de difficultés à les rencontrer ?
  • Parents confinés, parents éloignés ?
    Sophie REBOULSophie enseigne en grande section de maternelle dans un quartier défavorisé de Besançon. Ce texte rend compte de ses commentaires après avoir vécu les quinze premiers jours de confinement. Je propose un programme journalier composé d’activités qui touchent aux cinq domaines d’apprentissage (même l’activité physique). Chaque activité mobilise les parents dix à quinze minutes. Il n’y a pas l’obligation de tout réaliser, mais j’encourage à « faire travailler chaque jour son enfant, qu’on peut m’en rendre compte et que je répondrai ». J’envoie par mail les consignes de travail pour le lendemain pour qu’ils puissent en prendre connaissance la veille, me questionner et s’organiser. Les parents semblent satisfaits de cette formule, ils m’ont tous répondu que cela leur convenait, la plupart sont demandeurs. Ils me disent « on fait au mieux, on fait comme on peut » mais ne veulent pas que je modifie cette façon de travailler. Je pense que cet envoi régulier les rassure, qu’ils ont besoin de suggestions pour occuper leur enfant dans leur minuscule appartement, qu’ils sont fiers de « montrer à la maîtresse » ce qu’ils font avec leur enfant. Ils apprécient ce lien avec moi : je reçois des messages constamment.

  • Mes chers élèves, chers parents
    Damien SAGEDamien enseigne en école maternelle. Dans cet article les courriels qu’il a fait parvenir à ses élèves et à leurs parents dans les premières semaines de la période de confinement.

Quand le confinement contraint à penser autrement

  • Le travail personnel de l’élève au temps du coronavirus compte rendu
    Sophie REBOUL, Michel BARAËR
    Le thème de ce Dialogue 177 – le travail personnel de l’élève – a été choisi bien avant l’arrivée du coronavirus mais les conséquences de la pandémie : la fermeture des lieux scolaires, la « continuité pédagogique » à distance, ont fortement modifié les conditions d’exercice de ce travail personnel. Pour tenter de mesurer les effets – importants – du confinement, nous avons proposé le questionnaire suivant à plusieurs enseignants (les réponses portent sur la période qui a précédé les vacances de printemps). 20 collègues nous ont répondu.

  • Comment le passage au tout numérique fait naître l’évidence du travailler ensemble pour
    vivre ensemble

    Marie-Pierre DUBERNETIl y avait l’avant Covid19, il y aura un après. Seule certitude du moment… Mais quel après ? Qui tirera la leçon de la situation que nous subissons aujourd’hui ? Quelles ruptures avec le monde d’avant ? Pour quelle alternative ? Etrangement, à l’heure où le GFEN s’apprête à fêter son centenaire, le monde vit une situation que certains se plaisent à comparer aux pires moments de conflits de l’Histoire de l’humanité. Alors, plus jamais ça ! Lorsque je suis rentrée chez moi, le vendredi 13 mars, après avoir quitté mes élèves et sans être sûre de les revoir — et oui, je fais en plus partie des personnes à risque — une seule obsession m’habitait. Comment faire de cette continuité pédagogique imposée, un objet de réflexion, d’analyse de pratiques, de mise en oeuvre d’une pédagogie fidèle à nos valeurs, d’occasion de créer du lien, non seulement entre mes élèves et moi, entre eux et leurs parents, entre leurs parents et moi… ? Mais surtout une occasion de tenter de construire, pour beaucoup d’entre eux, un nouveau rapport au savoir !
  • Des bancs de l’École à la maison
    Erell BARAËRErell est professeur de français en lycée. Ce texte rend compte de ses commentaires après le vécu des premières semaines de confinement.
    Le travail personnel vient habituellement s’ajouter en amont ou en aval à celui réalisé en classe. Dans le cadre du confinement, la « classe » dans sa dimension physique, dans sa temporalité habituelle, disparaît. Le travail n’est donc plus que personnel à mon sens, même s’il est stimulé, « accompagné » à distance par l’enseignant et même si celuici peut solliciter des interactions entre élèves. D’où son caractère extrêmement inégal d’ailleurs : les élèves ne peuvent pas tous, pour des raisons matérielles, certes, mais peutêtre plus encore sociales et culturelles, fournir ce travail personnel. Ce constat ne remet toutefois pas en cause, à mes yeux, la nécessité d’une continuité pédagogique (ces inégalités existent déjà à l’École quand elle se fait en présentiel, même si elles sont actuellement très nettement accrues) mais invite à la réfléchir autrement, à penser autrement le travail personnel.
    De point de départ ou de matière à consolidation en temps normal, il devient le « coeur » du travail, le seul possible en temps de fermeture des écoles/établissements. Dès lors, il peut devenir très lourd pour certains élèves, notamment ceux plus fragiles scolairement qui ont particulièrement besoin du groupe classe et de ses échanges pour créer du sens et saisir l’implicite de l’école. Il peut aussi ne pas être fait, comme en temps normal, ce qui pose d’ailleurs toujours la question de la pertinence du travail personnel et de son risque d’accentuer les inégalités. Mais, puisque dorénavant, il est le « coeur » du travail, il devient particulièrement nécessaire.
  • Quand les élèves ont dû travailler… tous seuls à la maison  Supplément en ligne
    Patrick RAYMOND

 

Note de lecture

  • Les langues-cultures moteurs de démocratie et de développement coordonné par Martine
    BOUDET

    par Jean-Louis CORDONNIER

Le cahier du LIEN

  • Corps/esprit… Un couple inséparable
    Jalila BEN ZINEB (ITEN), Michel SIMONIS (GBEN), Oleg de ROBERTY (GREN) Mélanie NOESEN (GLEN) Mike RICHARTZ (GLEN)Dans la suite du N°170 de Dialogue «Éducation et sexualité», ce supplément du LIEN veut introduire un chainon entre l’éducation et la sexualité : celui du corps tout entier, des cinq sens et la motricité, nourrissant la réflexion sur la dimension «politique» de notre action : positions de pouvoir, aliénation ou émancipation ?
    Les mesures de confinement actuelles mettent en lumière que la distanciation dite «sociale» a généré à la fois de l’isolement social avec les multiples formes de « mise à distance» consenties et/ou imposées et le manque de contact corporel. Le port du masque altère une bonne part de la communication, met en évidence combien celle-ci est largement non verbale, donc corporelle.

Extraits Dialogue N° 176

Dialogue n° 176 – Prendre la main sur l’évaluation

 

Éditorial

  • L’évaluation,valeurs et usages  Lire
    Jacques BERNARDIN

À quoi a-t-on affaire ?

  • Comment entendez-vous le concept d’évaluation ? Y trouvez-vous de l’intérêt ? Pourquoi ?
    Laurent CARCELES, Joëlle CORDESSE, Pascal DIARD, Eloïse DURAND, Sylviane MAILLET, Michel NEUMAYERVoici quelques réponses de membres du GFEN aux questions posées dans le titre. Elles font apparaître certains aspects de la richesse et de la variété des conceptions de l’évaluation au sein du GFEN.
  • Évaluer entre malentendus et ambivalences
    Rémy DAVID,Rémy DAVID Enseignant de philosophie au lycée Philippe Lamour de Nîmes
    Directeur de programme au Collège international de philosophieCela fait près de 22 ans que j’enseigne, et l’on ne m’a jamais appris à évaluer. Comment m’y prendre concrètement pour établir la valeur des travaux de mes élèves de terminale, et les préparer à l’examen final ? Confronté à cette aporie professionnelle qu’aucune culture de métier, qu’aucun inspecteur, ne vient relayer ou étayer, on a estimé que puisque le concours de recrutement et ma titularisation suffisaient à le certifier, je savais évaluer dans ma discipline. Y aurait-il un « effet Jourdain » de l’évaluation : tout le monde évaluerait sans le savoir ? Peut-être, mais cela ne nous aide pas à savoir ce que l’on fait lorsqu’on évalue, ni  comment évaluer justement et efficacement.
    La question est donc comment s’y prend-on pour évaluer : si l’on ne me le demande pas, je sais le faire ; si l’on me demande comment je procède, je ne sais plus. Sans doute l’évaluation est-elle une activité où se concentre un savoir-faire non conscientisé mais mobilisé : déplier cette disposition acquise (un habitus professionnel ?), déployer ses enjeux me semble nécessaire si l’on veut chercher à construire le sens, à procéder de manière plus explicite et partageable, et si l’on aspire à devenir plus juste que ce l’on est « spontanément ».

  • Les effets pervers de l’évaluation obsessionnelle et du salaire au mérite
    Evelyne BECHTOLD-ROGNONCe texte est extrait du livre d’Évelyne Bechtold-Rognon Pourquoi joindre l’inutile au désagréable ? En finir avec le nouveau management public, publié en 2018 par Les Éditions de l’Atelier/Les Éditions Ouvrières.

    Un millier d’enseignant-es anglais-es ont triché. En aidant leurs élèves. C’est ce qu’on pouvait lire sur Slate le 12 février 20181. Le site reprend un article du Guardian, qui précise : « Près de 2 300 professeurs se sont compromis entre 2012 et 2016 en trichant aux épreuves de l’OCR (Oxford, Cambridge and RSA Examinations), l’une des commissions d’examens les plus importantes et prestigieuses du Royaume-Uni. » Mais pourquoi ? Comment est -ce possible ? Les enseignant-es aiment-ils tellement leurs élèves qu’elles et ils ne peuvent supporter de les voir plancher sans les aider ? Alors même qu’elles et ils savent bien que le but de leur travail est de les rendre autonomes, et qu’une telle « assistance inappropriée » est aux antipodes de cette mission ?

  • La menace du stéréotype
    Jean-Louis CORDONNIERLa psychologie sociale expérimente pour valider ses hypothèses. Dans le champ des apprentissages, elle a mis en évidence l’effet Pygmalion, qui a donné lieu à la démarche « Les attentes », imaginée par André Duny. Un autre apport de cette discipline est « l’erreur fondamentale». Plus récemment, la psychologie sociale a inventé le concept de menace de stéréotype qui concerne l’évaluation des compétences. La plupart des articles sur le sujet étant en anglais, j’en fais ici un rapide survol. Depuis les années cinquante, il avait été repéré que les stéréotypes intériorisés peuvent être source d’échec. Par exemple la croyance que «les femmes sont plus faibles que les hommes en mathématiques ; je suis une femme ; c’est pour cela que je suis faible en maths», favorise l’échec en maths.
  • L’évaluation en chantier (d’insertion)
    Elisabeth LABORELIl y a une dizaine d’années j’ai eu en charge la coordination de deux chantiers d’insertion : l’un dans les quartiers Nord de Marseille, l’autre sur un territoire du pourtour de l’Étang de Berre. J’ai été plus tard administratrice d’une association support de quatre  chantiers d’insertion sur Marseille. Notre réflexion portant sur la (les) question(s) d’évaluation, il m’a semblé utile de faire  témoignage de ces expériences pour signifier mes doutes persistants en la matière : que cherchons-nous à évaluer, à qui sont  destinées les données produites lors des processus d’évaluation ? Sommes-nous toujours capables d’appréhender et combattre les effets pervers des démarches, qu’elles soient imposées ou choisies ? Que nous disent ces démarches à propos des dynamiques de transformation à l’oeuvre ?
    Ce champ d’exercice n’échappe pas à l’affichage de convictions très arrêtées alors même que les pratiques confrontent à la difficulté permanente à opérer le choix d’outils pertinents et à expliciter le sens de ce qui se joue vraiment, à la fois par et pour les
    personnes auxquelles ces dispositifs s’adressent.
  • Savoir où l’on en est pour envisager un possible devenir
    Pascal DIARDLa triple question « Qui suis-je ? D’où viens-je ? Où vais-je ? », Pierre Dac répondait : « Je suis moi, je viens de chez moi et j’y retourne ! ». On pourrait paraphraser cette boutade à propos de l’évaluation : «Qui m’évalue ? D’où on m’évalue ? Pour aller où ? » et répondre : «Quelqu’un, de quelque part et pour que je reste à l’endroit que l’on m’assigne ». Tellement les critères de l’évaluation habituelle, dans l’école comme hors l’école, restent obscurs dans leurs pratiques et leur logique !
    Mais par quels chemins passe la conscientisation nécessaire de la logique radicalement mystificatrice de l’évaluation ? Je vous embarque sur les sentiers de quelques moments de conscientisation que j’ai vécus.
  • Cher collectif de rédaction de la revue Dialogue…
    Emeline VIMEUX

Le cahier du LIEN
Notre réflexion est ici : en quoi nos actes professionnels et militants sont-ils influencés, nourris, « commandés » par nos convictions, par des utopies, par des hypothèses dont nous acceptons qu’elles soient par nature invérifiable ; par des questions insondables telles que apprendre, former et se former dans le prisme du vivre ?

  • Éducation nouvelle et spiritualité. Le corps, l’esprit, la pensée
    Jean-Louis
    CORDONNIER (GFEN) Michel NEUMAYER (GFEN) Charles PEPINSTER (GBEN)
    TINGLI (GREN/LIFE/Université de Genève) Étiennette VELLAS (GREN)
    Ghoussoune WAHOUD

D’autres propositions

  • Comment rendre formative une évaluation sommative ?
    Réflexions autour d’une pratique d’évaluation coopérative basée sur la tâche complexe de rédaction de synthèse
    Laetitia BISSON, Florie CRISTOFOLI, Mathilde DEHARBELes temps d’évaluations sommatives proposés individuellement, et généralement sous forme de questions-réponses, peuvent être une source de stress pour les élèves, quel que soit leur niveau : une angoisse de la page blanche pour certain.es, la restitution partielle des connaissances pour d’autres, la pression de la réussite et la peur de l’erreur… Ces pratiques d’évaluation peuvent  amener les élèves à développer des stratégies individualistes poussant à la compétition. De plus, ces dispositifs engendrent souvent des restitutions lacunaires – peu d’élèves s’engageant dans la production de réponses complexes.
    Ce type d’évaluation correspond à un exercice purement scolaire dont la tâche principale pour les élèves se résume souvent à restituer des informations mémorisées. Il ne permet pas à l’enseignant.e d’évaluer les capacités d’argumentation, de questionnement et d’utilisation des outils adaptés.
    Nous cherchions donc à mettre en oeuvre de nouveaux modes d’évaluations plus positifs, et à développer, en amont chez les élèves, les compétences de production d’écrits complexes et d’argumentation.
  • Les compétences et leur évaluation
    Maria-Alice MÉDIONI, Université Lyon 2 – Secteur Langues du GFENL’article qui suit est un extrait modifié de L’évaluation formative au coeur du processus d’apprentissage. Des outils pour la classe et pour la formation, publié par Chronique sociale en 2016.

    La notion de compétence s’est imposée ces dernières années dans le monde de l’éducation et de la formation. Venue de l’entreprise, cette notion est décriée par nombre d’acteurs éducatifs : elle renvoie à une vision libérale de l’éducation et individualiste des apprentissages scolaires ; elle s’oppose à l’idée de qualification au profit de la capacité à s’adapter aux situations nouvelles, à innover ; elle entre en contradiction avec les connaissances. Cette critique est plus particulièrement développée par Nico Hirtt :
    « derrière l’approche par compétences se cachent essentiellement des objectifs économiques liés à l’évolution du marché du travail ;
    – l’approche par compétences constitue bel et bien, quoi qu’en disent ses défenseurs, un abandon des savoirs ;
    – l’approche par compétences ne peut en aucune façon se réclamer du constructivisme pédagogique ; il se situe en réalité à l’opposé des pédagogies progressistes ;
    – loin de favoriser l’innovation pédagogique, l’approche par compétences enferme les pratiques enseignantes dans une bureaucratie routinière ;
    – l’approche par compétences est un élément de dérégulation qui renforce l’inégalité (sociale) du système éducatif. »

  • Les différentes valeurs de l’évaluation
    Jean-Jacques VIDALAutrefois, on était noté, classé, caractérisé au fil des scores obtenus, des commentaires qu’ils produisaient et des conséquences
    de leur utilisation exclusive pour le devenir personnel. Par l’école, pour le reste de la vie. Il fallait traverser ces épreuves, mais une fois scolairement certifié et recruté dans un secteur professionnel, on était censé s’adapter aux usages partagés d’un métier, et nonobstant quelques contrôles ou inspections, assez rares pour faire événement personnel, on « faisait son travail ».
    C’est encore ainsi, en apparence. Sauf qu’on perd plus souvent son travail, ou c’est lui qui nous perd. En profondeur, une conformation générale s’est produite, et… « qui n’est pas évalué n’a plus beaucoup de valeur ».
    Ce ne sont donc plus seulement les élèves ou les postulants qui vivent les notations et orientations qui en découlent, mais tout le monde, dans tous les secteurs et structures : le directeur de chaque point de vente d’une enseigne commerciale annonce régulièrement les scores comparés du magasin aux moindres intérimaires, car son devenir en dépend. Les agences de notation attribuent leur sanction à tous les niveaux des politiques.
  • Évaluer pour apprendre des élèves
    Jean BERNARDINUne classe de Cours élémentaire […] très hétérogène tant au niveau des acquisitions (maîtrise de connaissances) qu’au niveau des attitudes et comportements. […] Tout se passe comme s’il y avait un « malentendu » entre ce que j’attends des élèves et ce
    qu’eux attendent de l’école et croient que j’attends d’eux. Certains répondent aux questions avant même qu’elles ne soient posées, d’autres, le crayon à la main, se précipitent pour « remplir la fiche » ou « faire l’opération », d’autres encore sont dans l’attente que l’adulte leur dise (ou leur répète) ce qu’il faut faire et comment il faut le faire. Chacun campe sur ses propositions lors du travail de groupe, où le vote à la majorité remplace la confrontation des propositions, et les moments de correction collective ne trouvent sens que dans le comptage des réponses justes/ fausses…
    Bref, comme nous le dirions aujourd’hui, les élèves se mobilisent sur des tâches à effectuer sans véritablement entrer dans une activité intellectuelle réflexive.
  • La meilleure façon d’évaluer… (ce n’est pas la nôtre)
    Laurent CARCELESDans les milieux randonneurs, il existe une ritournelle traditionnelle, parmi celles qui sont censées donner de l’énergie pour franchir
    les longues distances : « La meilleur’façon d’marcher / C’est encor’la nôtreuh / C’est de mettr’un pied d’vant l’autr’ / Et d’recommencer ». Je n’ai été ni scout, ni éclaireur, mais je connais cette chanson. Même si je ne vous propose pas un long périple, je vous emmène faire un petit bout de chemin avec mes élèves de 6ème de cette année scolaire 2019-2020. Grâce à eux, j’ai vécu une évaluation d’une démarche que je leur avais fait vivre (un texte à trous), ce qui m’a fait changer l’évaluation prévue à l’issue de ce travail.
  • L’intelligence au travail, si on n’y prend garde, c’est du sable qui file entre les doigts
    Michel NEUMAYERC’est un réseau belge d’associations qui m’a contacté pour une évaluation. Elles agissent dans le domaine social (magasin de seconde main, lieux d’écoute, tables de convivialité, accueil santé, accueils migrants, défense des droits de la personne, formation alpha, conférences, films, etc.), dans et autour de l’école et la formation d’adultes en alphabétisation, dans les grandes villes et les zones rurales, etc.
    Mon intention dans cet article n’est pas d’entrer dans le détail des ateliers d’évaluation que j’ai menés. Ils sont évoqués au fur et à mesure. Mon souhait est, en matière d’évaluation, de développer un argumentaire plus anthropologique. J’entends par là que je me situe au carrefour de questions liées au regard, à l’écriture, la notion de trace, à la santé, aux notions d’intelligence collective, de  collectifs de travail et d’action militante. Je veux relier la question de l’évaluation à un ensemble de savoirs, de pratiques, de valeurs que l’Éducation nouvelle porte plus que jamais aujourd’hui et qu’elle a élaborés au fil de son histoire, notamment à partir des années 1980.
  • Conseils de jardinier : si vos petits pois sont rouges
    Jacqueline BONNARDÉchange surpris dans la salle des profs à la récréation. «Ils sont comment les 5 C aujourd’hui ? » demande le collègue de mathématiques au professeur de musique. – « Ben, répond l’autre, Bryan est éteint ; pour Kévin la flûte c’est mission impossible… Quant à Stéphanie elle préfère se repoudrer le nez plutôt que d’apprendre à respirer… et puis j’ai envoyé Samir prendre l’air, il parait que la flûte, c’est pas de la vraie musique… Les maths, ça les inspire peut-être davantage… – Va pas falloir qu’ils me gonflent… je n’suis pas d’humeur! »
    Et voilà la machine à café transformée en mur de lamentations, chacun y allant de son couplet sur les élèves de cette classe, certes difficile, mais sur laquelle aucune réflexion collective n’a été menée pour comprendre les difficultés des élèves et envisager des actions concertées. Car à quoi bon se concerter, ceux-là ne s’intéressent à rien, ne comprennent rien, refusent de travailler.

Extraits Dialogue N° 175

Dialogue n° 175 – J’enseigne donc je conçois

 
Éditorial
  • Concevoir ses pratiques   Lire
    Jean-Jacques VIDAL
Concevoir pour quoi ?
  • Concevoir : une histoire humaine au futur présent
    Pascal DIARD, Formateur nomadisantConcevoir ses pratiques quand on est enseignant, cela peut sembler aller de soi puisque ce métier n’est pas de simple exécution. En fait, rien ne va de soi à partir du moment où l’on essaye de penser ses pratiques, d’élaborer des savoirs sur ses expériences. Et c’est à cet endroit stratégique de la pensée humaine que la dialectique de la pensée et de l’action, de la théorie et de la pratique s’avère plus que jamais nécessaire.
    La conception d’une démarche ne sert que si l’on en use !
    Cela fait déjà un bout de temps que je fais vivre le texte à trous pour entrer dans la compréhension du « Code Noir ». Mon objectif au départ, avec mes élèves de 2nde, était, tel que je le leur formulais, une invitation à se vivre capables de lire des textes historiques difficiles, exigence formelle honorable s’il en est. Dernièrement, j’ai reçu le témoignage de 2 enseignants, Tristan et Gatien, qui ont réinvesti de manière créative cet « outil » qui, du fait, s’est avéré plus que cela : un vrai moment de démarche !
  • Ouvrir de nouveaux espaces de pensée
    Odette BASSISDevenir enseignant n’est pas chose facile. Un monde s’ouvre, tendu entre devoir de tenir les attendus professionnels et désir d’ouvrir — et déjà pour soi-même — un espace de vie et d’initiatives enrichissantes. Un espace où apprendre est au centre. Mais quel « apprendre » ? Celui du maître qui enseigne, celui de l’élève qui reçoit ?
    Et si l’enjeu, pour l’enseignant, pouvait devenir, et déjà pour lui-même, d’ouvrir de nouveaux espaces de pensée, de nouvelles entrées dans ce qu’est savoir ? Mais alors, de quoi bousculer son propre rapport au savoir !? Oui, sans doute, mais pour ajouter du vivant et ouvrir un champ réflexif au déjà là ! Et faire que l’apprenant ne soit plus seulement celui qui reçoit, retient et applique, mais puisse devenir pleinement acteur sur cette scène où se joue son propre rapport à savoir. Un horizon transformateur pour l’enseignant, par l’enseignant.
  • Huit expériences de transformation
    Le GROUPE MATERNELLE 25Le groupe « maternelle 25 » a entrepris l’année dernière de questionner huit enseignant-es dans leurs classes : quatre dans un quartier en REP+, trois maternelles et une élémentaire, une grande section et un CP dans des écoles de la périphérie bisontine, un CP « en ville » et une classe maternelle dont l’enseignante a été nommée sur «projet innovant ».
    Tous ont réorganisé leur enseignement grâce à un regard réflexif sur la pédagogie, à partir de leurs convictions sur le sens de l’école, par des chemins différents, pour transformer leurs pratiques. Cela nous intéressait : sans tous se réclamer explicitement d’un type de pédagogie ou des valeurs d’un mouvement d’éducation, les profs d’école en question ont décidé de ne plus faire «comme la plupart», ou comme ils faisaient eux-mêmes auparavant. Progressivement ou à l’occasion d’une nouvelle nomination, d’un changement de niveau, avec ou sans la participation à des réunions et des temps de réflexion avec d’autres, on agit particulièrement sur certains aspects professionnels, parfois de manière globale.
  • Inconcevables pratiques ?
    Jean-Jacques VIDALLa lettre laissée par notre collègue directrice d’école, « épouvantablement fatiguée », décrivait l’impasse où se retrouvent les enseignants qui font fonctionner l’école élémentaire : complètement ou partiellement « déchargé-es », avec une classe un, deux ou trois jours par semaine, selon la taille et le secteur de l’école, on attend d’eux une ingénierie sans limite.
    Interlocutrices systématiques des administrations, des collectivités territoriales, souvent des parents et bien sûr des élèves, les personnes chargées de « diriger » comme le dit l’institution, d’ « organiser » pour leurs collègues, d’ « être » l’école comme le voient les usagers, sont donc comme celle-ci : en équilibre précaire ou épuisées. Chacun s’adresse à elles, non seulement pour transmettre, assurer les liaisons, faire les liens, répondre à tous et à tout sans leur en donner le temps ni les outils. D’ailleurs tout arrive en même temps, rien n’est définitivement résolu, « ce qui est normal dans ce métier, mais on ne s’y attend pas à ce point-là», dit une directrice. « Tout est dans l’immédiateté… »
    Ainsi, sauf à considérer que la possibilité et l’intérêt de concevoir ses pratiques ne concernent que les dispositifs pédagogiques en classe, on montrerait qu’on méconnaît le travail réel et tout ce qu’il rend possible en éclairant exclusivement le versant didactique de l’école.

Concevoir : inventer ? adapter ? interpréter ?…

  • Concevoir sa pratique une activité complexe ou comment, entre reprise et rupture, créer du nouveau
    Maria-Alice MÉDIONI, Secteur Langues GFEN Centre de langues-Université Lyon 2Qu’est-ce que concevoir ? Tout inventer ou ré-inventer, interpréter en fonction d’une intention qui pilote l’action, d’un problème à résoudre ? Seul ou à plusieurs ? Comment se saisit-on d’une pratique existante dans le GFEN particulièrement, pour en faire du nouveau ? Car, pourquoi inventer le fil à couper le beurre quand on dispose d’une mallette bien remplie ? Et comment s’y prend-on alors ?
    Telles sont les questions qui se sont imposées à moi à l’annonce de ce numéro de Dialogue sur ce que signifie « concevoir sa pratique ».
  • Tambouille culinaire et patouille pédagogique
    Damien SAGE, GFEN 75Cela fait 12 ans que je suis Professeur des Écoles — et quasiment autant de temps que je fréquente le GFEN. Comme le diraient Goscinny et Uderzo : je suis tombé dans le GFEN quand j’étais petit. Grâce à cette fréquentation régulière des pratiques et des idées de l’Éducation Nouvelle, j’ai rapidement commencé à construire mes pratiques de classe.
    Je ne revendique aucune originalité : nombre de situations que je propose ressemblent fortement à ce qui peut se faire dans d’autres classes. L’enjeu pour moi n’est pas là. Les enjeux sont plutôt : qu’est-ce qui, à un moment, me rend nécessaire l’exploration d’un type de pratique ? Comment est-ce que j’aménage ma pratique pour m’assurer que les élèves sont bien en train de construire des savoirs ?
  • La tour de Babel
    Jean-Louis CORDONNIERRétrotraduction d’un mythe
    Une démarche ne sort pas adulte de sa coquille comme la Vénus de Botticelli. La démarche « Tour de Babel » a une longue histoire.
    En 1992, dans l’éditorial du dernier numéro de Dialangue « Babel reconstruite », Joëlle Cordesse écrivait « Qu’est-ce que la paix ? un retour à l’éden originel : disparition des langues, retour à une langue universelle, qui n’en serait pas une puisqu’elle serait seule de son espèce, mais un harmonieux décalque de la réalité. […] A-t-on besoin de parler des langues différentes pour ne pas se comprendre ? Et si nous reprenions le chantier ? […] S’autoriser toutes les langues, c’est une chance de plus pour une idée vivante du savoir. D’ailleurs, une autre lecture du mythe est avancée : Dieu envoya les langues aux hommes non pour les punir, mais parce que l’homme n’est homme que dans la diversité.  »Quand  »tu» n’est pas un autre,  »nous» n’est personne. »

  • Comment remettre la virgule à sa place
    Michel BARAËRUn récent numéro de Dialogue, le 173, l’a affirmé : la liberté est nécessaire aux pédagogues. Il s’est fondé sur le fait que, pour réussir leur enseignement, ils ne peuvent être de simples exécutants de méthodes, de guides, de référentiels… Ils doivent pouvoir concevoir leurs pratiques.
    Ce principe est, constatons-le, largement partagé, même si — particulièrement par les temps qui courent — la volonté d’encadrer fortement les praticiens est d’actualité. Mais qu’entendre par « concevoir ses pratiques » ? Le dictionnaire nous indique combien le verbe concevoir peut prendre des sens largement différents : former un concept, avoir une idée claire, imaginer… et qu’il peut accepter des synonymes variés : comprendre, envisager, supposer, inventer, échafauder, élaborer… De plus, souvent un enseignant qui conçoit adapte, réutilise, transforme… des dispositifs, des activités. Puisqu’il s’agit d’une pratique, on ne peut dissocier sa conception du contexte dans lequel elle sera mise en oeuvre. Ajoutons que le processus de conception n’est pas le même s’il est produit par un praticien seul ou par un collectif.
  • Plagier, se réapproprier : les mutations d’une démarche
    Alexis AVRIL, membre du GFEN et du LIENSi je suis entré au GFEN c’est en tant que prof de philo. J’ai été séduit par les démarches d’auto-socio-construction proposées par le secteur philo dans la revue Pratiques de la philosophie et me suis ensuite pleinement engagé dans la réflexion menée par ce secteur.
    Si je porte un regard rétrospectif, après quatre années de GFEN, sur ce qui a motivé mon engagement dans le mouvement, je constate qu’un décalage s’est opéré. La fréquentation assidue aux réunions du GFEN Provence, la lecture de Dialogue et la participation aux stages d’autres secteurs ou encore aux rencontres du LIEN en Roumanie, ont changé mon rapport à la construction des savoirs.
    Pour le dire simplement, vivre des démarches venues d’autres horizons disciplinaires m’a fait toucher du doigt la porosité des savoirs au sein des démarches du GFEN. Le détournement de certaines consignes – qui peut parfois déboucher sur des résultats croisant des savoirs de plusieurs disciplines – ne démontre-t-il pas cette porosité inévitable quand on se confronte à des objets de pensée complexes ?
  • Peut-on concevoir son cours en philosophie ?
    Rémy DAVID, Enseignant de philosophie au lycée Philippe Lamour de Nîmes, Directeur de programme au Collège international de philosophieLe verbe concevoir renvoie aux deux acceptions du concept : produire une conception, et produire son objet de manière originale.
    Classiquement, les professeurs de philosophie organisent leurs savoirs disciplinaires et conçoivent leurs cours au sens où ils tissent un discours qui peut différer de celui de tous leurs collègues. C’est la conception d’un discours, de type dissertatif –on  parle parfois de « leçon » philosophique – qui répond à un canon, à une norme académique. Peut-on alors réellement parler de conception ? Sans doute, au sens de contenu d’une conception, en un sens descriptif, mais pas au sens dynamique d’une inventivité intellectuelle qui amène à produire un nouveau concept, à créer de nouvelles modalités formatives qui transforment réellement le cours, ce qu’on y fait ou ce qui s’y joue. Si la composition d’un tel discours relève de la responsabilité de son auteur, ni la question, ni le problème, ni les concepts engagés relevant de l’histoire de la philosophie, de ses figures et des doctrines, ne sont à proprement parler conçues ici, mais reconduites, réagencées dans une approche plus ou moins éclectique. Or si les auteurs de ces discours en revendiquent la « conception », c’est en sens bien pauvre de concevoir, qui s’illusionne sur sa réelle inventivité, et sur la conformation à un modèle de cours reposant sur la magistralité, et sur un « penser par soi-même » qui soit globalement le même pour tous.
Collaboration collective ?
  • Une expérience collective de recherche-création : l’invention de l’atelier
    Patricia CROS, Secteur Poésie & Écriture du GFEN, Animatrice d’ateliers d’écriture, Professeur des écolesL’expression « recherche-création », relativement nouvelle dans le paysage artistique et universitaire, recouvre plusieurs types de pratiques et de réalités mais il permet notamment « d’envisager la création comme une forme de recherche ». C’est une perspective intéressante pour comprendre l’expérience collective d’invention d’un atelier d’écriture que je vais décrire ici, expérience dans laquelle le collectif permet de concevoir et d’interroger ses pratiques.

  • Ainsi naquit une démarche
    Brigitte ANGELI, GFEN Franche ComtéLe groupe du GFEN Franche-Comté, dont je fais partie, travaille depuis un an sur les écrits réflexifs : leurs rôles et pertinences au sein de nos classes. Nous nous sommes d’abord interrogés sur les définitions et le bien-fondé de ces écrits intermédiaires.
    Chacun de nous s’est approprié ce concept type et l’a décliné selon ses propres choix pédagogiques. La confrontation de ses travaux très disparates nous a révélé la nécessité de dégager un sujet de travail commun.
    Et si nous inventions une démarche adaptable à tous niveaux…
  • Un prix littéraire de jeunesse : regrettable outil « clé en main » ou véritable support de transformation de pratiques ?
    Marie-Pierre DUBERNETDernier conseil école/collège : un grand moment ! Un powerpoint, des tableaux… Nos élèves, désormais en 6e, ont les meilleurs résultats de l’académie, de la circonscription et sont nettement au-dessus des nationaux. Le moral des troupes est au beau fixe ! Une infime minorité s’avère « en difficulté » et seulement sur certaines compétences : lecture implicite, résolution de problèmes, géométrie, mesures… Zut, c’est fichu pour la prime au mérite ! Un air de déjà entendu. […]
    Enseignante depuis près de 30 ans en CM2 dans une petite ville de la proche banlieue bordelaise, je constate, comme mes collègues, une dégradation du niveau de lecture de mes élèves dans le quotidien de la classe. Dégradation qui semble s’accélérer ces dernières années malgré les changements de programmes et les divers dispositifs de soutien imposés par le ministère (accent mis sur le déchiffrage, Activités Pédagogiques Complémentaires axées sur la lecture dans notre académie, quart d’heure lecture, projet d’école…) La moindre consigne demande reformulation, explicitation même pour les « bons » élèves.
  • La copie promenée : genèse d’une démarche
    Annabelle RODRIGUES, GFEN 67Partir de l’utilisation de démarches conçues par le GFEN a d’abord été un premier moyen de se lancer, de se constituer un répertoire de pratiques communes, d’analyser ce qui était en jeu et ce qui justifiait l’engagement dans un nouveau groupe. Nous avons vu dans les démarches du GFEN avant tout la mise en oeuvre d’un regard commun à la fois sur :
    %u2022 l’élève et l’idée que chacun d’eux était capable d’apprendre
    %u2022 les apprentissages et une conviction profonde que l’on apprend pour soi mais toujours avec les autres.
    Au départ, une réflexion menée sur l’enseignement explicite
    La conception d’une démarche sur la copie a ensuite été le fruit d’une réflexion menée sur l’enseignement explicite, suite aux nombreuses formations auxquelles nous participions sur le sujet au moment de l’application des programmes de 2015. Nous ne pouvions que nous faire l’écho des lamentations des collègues sur « les élèves ne savent pas copier ».
Le cahier du LIEN
  • Édito
    Pascale BELLEFLAMME (GBEN) Michel NEUMAYER (GFEN) Étiennette VELLAS (GREN)La nouveauté de la Biennale de l’Éducation nouvelle 2019 fut d’être vraiment internationale. Le LIEN, par son implication dans son organisation, le nombre de ses inscrits, ses animations, ateliers, débats et participations aux tables rondes a joué pleinement sa part dans ce défi relevé.
    Ce 4 pages de Dialogue a l’ambition de refléter notre présence à Poitiers.
  • Tout commence par l’accueil
    Pascale BELLEFLAMME
  • Une Biennale bel et bien internationale ! Une expérience militante
    Bernard CORVAISIER (CRAP)
  • Échos d’ateliers et débats du LIEN
    Catherine LEDRAPIER (GFEN) Diana DRAGHICI Wallid SFEIR (GROEN & GFEN)
  • S’approprier l’héritage culturel du LIEN/GFEN
    Colette CHARLET (GFEN)
  • La marchandisation de l’éducation nouvelle dans les écoles privées
    Jalila BEN ZINEB (GTEN)
  • Éduquer et/ou punir
    Jean-Marc RICHARD Betty LABOREL (GREN)
  • Immigré ou émigré ?
    Mounira KHOUADJA Heger KHIARI (GTEN) Lorson OVILMAR Macson LUZINCOURT Tatiana DELPÊCHE (IEPENH)
  • Écologie et développement durable : problématiser le partage équitable de notre planète
    Catherine LEDRAPIER Jean-Louis CORDONNIER (GFEN)
  • L’éducation nouvelle pour conserver l’espoir
    Lorson OVILMAR Macson LUZINCOURT Tatiana DELPÊCHE (IEPENH)