Enfance, culture, musique & pédagogie s’entretient avec Pascal Diard

Le site Enfance, culture, musique & pédagogie consacre son 11ème numéro (janvier 2025) aux Pédagogies actives.

Voir la vidéo de l’entretien de Cristina Agosti-Gherban avec Pascal Diard

Retrouvez également les entretiens menés avec :
Philippe Meirieu
Catherine Peyrot (Pikler Loczy-France)
Marie-Ève Collard Thivillier et Catherine Cortesi Mazurie, (Éduc’ Freinet)
Christophe Moullé et Jonathan Levy (association française Janusz Korczak)
Isabelle Girard (L’école Decroly)
Jean-Baptiste Clerico (CEMEA France)

Nouveaux programmes de cycles 1 et 2, l’entêtement d’un ministère déconnecté de la réalité

Tribune signée par :

FSU-SNUipp, SE Unsa, CFDT EFRP, CGT Educ’Action, SUD Éducation, AGEEM, ANCP, AFEF, APMEP, ICEM, GFEN

Publiée dans le Café Pédagogique le 12 mars 2025

Des programmes au service des élèves, vraiment ?

Le 5 décembre 2023, jour des résultats des évaluations PISA, Gabriel Attal, alors ministre de l’Éducation nationale, faisait des annonces à grand renfort de communication sur ce qu’il appelle alors le « Choc des savoirs », présenté comme le seul outil pour « relever le niveau des élèves ». Pour le premier degré, ces annonces concernaient une modification en profondeur des programmes de français et de mathématiques. Elles témoignent une nouvelle fois de la volonté ministérielle de tout axer sur les seuls « fondamentaux », jugés comme la pierre angulaire de tous les apprentissages.

Après un semblant de concertation, le Conseil Supérieur des Programmes a produit des contenus pour le cycle 1 et 2 en lien avec la feuille de route du ministère, mais pas avec l’ensemble des travaux de la recherche. Ces programmes beaucoup plus détaillés et donc beaucoup plus contraignants sont parus malgré un vote quasiment unanime en contre du Conseil Supérieur de l’Éducation. Selon nous, ils déroulent une conception mécaniste des apprentissages avec des objectifs à atteindre fixés à chaque âge, comme si tous les enfants apprenaient à parler, à lire, à écrire, à compter ou à résoudre des problèmes au même moment. La diversité des rythmes d’apprentissage des enfants est niée, ainsi que les recherches en la matière. Ces programmes partent du principe que ce qui est enseigné est immédiatement compris, appris et retenu par les élèves. Or, l’enseignement est bien plus complexe. Maitriser des compétences demande du temps et des méthodes diverses et adaptées selon les élèves.

Un grand nombre d’enfants, notamment les plus fragiles, se retrouveront en difficulté dès le plus jeune âge car ils ne correspondent pas à l’élève type théorique pris comme norme universelle.  Alors que l’inclusion scolaire et la prise en compte des élèves à besoins particuliers font partie des enjeux de l’École d’aujourd’hui, ces programmes les ignorent complètement.

Un ministère qui n’écoute pas les personnels

Anne Genetet a poursuivi cette politique avec l’acte 2 du « Choc des savoirs » qui, sous prétexte de réduire les inégalités, n’en produira que davantage.

Les programmes de cycle 3 sont à l’écriture et entreront également en vigueur en septembre 2025. Au vu des premiers échanges avec la Dgesco, force est de constater qu’ils s’inscrivent dans la même logique. Une logique à l’opposé des programmes de 2015 qui avaient été conçus avec la coopération des enseignantes et enseignants au travers d’une réelle concertation, mais également avec l’ensemble de la recherche en sciences de l’éducation et en didactique. Des programmes ambitieux, fondés sur un consensus académique avec des repères de progressivité au sein de chaque cycle, à la main des équipes pédagogiques. Il est plus que dommageable qu’ils aient été remis en cause dès 2017 par le ministre Jean-Michel Blanquer car l’École, pour se transformer, a besoin d’un temps long qui n’est pas celui du politique.

Alors que l’École traverse une crise structurelle et fait face à un effondrement du recrutement, ces changements incessants de programmes ne répondent pas aux enjeux et sont source d’épuisement pour les professionnel·les qui se retrouvent déstabilisé·es par des ordres et des contre ordres qui font perdre le sens du métier.

Les évaluations des différentes mesures mises en œuvre depuis 2017 montrent clairement leur inefficacité comme vient de le montrer la DEPP. Ces programmes sont de la même veine et ne vont en rien permettre la réussite des élèves.

Une professionnalité niée

En visant principalement l’objectif d’améliorer les « scores » des jeunes élèves lors des évaluations nationales et internationales, les nouveaux programmes brident à la fois les choix didactiques et pédagogiques des équipes enseignantes, nient leur expertise et transforment les professeur·es des écoles en de simples exécutant·es de programmes livrés « clés en main ». Les équipes de formateurs et formatrices se retrouvent dans l’obligation de les mettre en œuvre, tout comme les professeur·es des écoles, alors qu’elles savent que ces programmes ne tiennent pas compte du réel et sont impossibles à mettre en œuvre sans exclure une majorité d’élèves.

Actuellement dans les départements, les plans de formations engagés depuis la rentrée sont modifiés et adaptés (une nouvelle fois en urgence) en fonction de l’agenda ministériel.

Tout, sur le fond comme la forme, semble réuni par le ministère pour que l’adhésion de la profession soit la plus faible possible. Or ce qui est certain, c’est qu’une politique éducative qui n’est pas approuvée par le terrain a peu de chance d’avoir des effets bénéfiques pour l’amélioration globale d’un système éducatif qui reste profondément marqué par les inégalités scolaires. A l’opposé de ce qui est proposé actuellement, une formation initiale repensée s’inscrivant dans la réalité des classes et des élèves est nécessaire.

Pour tâcher de résorber les inégalités, l’École n’a pas besoin de nouveaux programmes, mais d’une diminution du nombre d’élèves par classe, ce qui passe par un recrutement de professeur·es des écoles, à rebours des suppressions de postes annoncées pour la rentrée 2025.

Transmettre, former, transformer. Quels indispensables ? par Maria-Alice Médioni

Le 19 novembre 2024, à Bruxelles, à la demande de Lire et Ecrire Communautaire, Maria-Alice Médioni (secteur Langues du GFEN) a animé une conférence sur le thème : Transmettre, former, transformer. Quels indispensables ?, dans le cadre du Séminaire : « Comment apprend-on sa “pratique de formateur.trice” alpha ? En pratiquant !… oui mais pas seulement »


Voir le diaporama de l’intervention (site de Maria-Alice Médioni)
Ecouter l’enregistrement audio de l’intervention, le texte et le diaporama (site de Lire et Ecrire)

Manifeste pour le développement de la mixité sociale et pour la consolidation de la politique d’éducation prioritaire

L’absence de tout discours et tout projet conséquents sur l’éducation prioritaire de ce gouvernement, comme de ceux qui l’ont précédé depuis 2017, est révélatrice d’orientations politiques qui ont renoncé à toute visée de lutte contre les inégalités scolaires et de démocratisation de notre système éducatif. Les dédoublements des classes de CP, CE1 et GS, obtenus grâce à la baisse démographique et dont les premiers résultats sont décevants, ne sauraient suffire.

Les soussignés, acteurs de l’éducation, résolus dans leur volonté de faire réussir tous les élèves en élevant le niveau d’ensemble, en luttant contre les inégalités scolaires et en visant l’émancipation des futurs citoyens, veulent alerter les pouvoirs publics sur la nécessité de réorienter l’action éducative pour parvenir à ces fins.

La mixité sociale est une des conditions de la réussite de tous dans la perspective d’une société plus égalitaire et fraternelle. Deux principaux obstacles sont très clairement identifiés : l’existence de deux systèmes d’enseignement avec un enseignement privé qui accueille massivement, et de plus en plus, les enfants des couches sociales les plus favorisées, et un urbanisme qui concentre dans certains secteurs les familles les plus fragiles sur le plan économique et social. Dans le premier cas, il s’agit d’une ségrégation choisie, dans le second d’une ségrégation subie.

Face à cela les soussignés vous demandent d’être résolus pour améliorer la mixité sociale dans les quartiers et une hétérogénéité scolaire raisonnable dans les établissements en donnant sens et force à la loi SRU (solidarité et renouvellement urbain), en consolidant la politique de la ville, en luttant pour de meilleures conditions de logement pour tous et en imposant dans l’immédiat plus nettement à l’enseignement privé de ne pas sélectionner ses élèves notamment sur des critères économiques ou sociaux, sans pour autant augmenter sa part des effectifs globaux. Il conviendrait aussi de mieux encadrer l’enseignement privé hors contrat.

En attendant que la mixité sociale que nous appelons de nos vœux et qui est inscrite dans l’article L111-1 du code de l’éducation progresse significativement, certains quartiers, certaines petites villes et même certains villages connaissent des situations de concentration de populations économiquement pauvres et socialement éloignées des attendus de l’école.

En conséquence, les soussignés vous demandent de maintenir, développer et soutenir durablement pour les écoles et collèges de ces secteurs une politique de réseau d’éducation prioritaire sur la base du référentiel de l’éducation prioritaire publié par le Ministère de l’Education Nationale en 2014. Ce document est en effet le résultat d’un large travail d’analyse et de synthèse des facteurs déterminants de la réussite dans les réseaux, élaboré avec l’expertise de nombre d’acteurs du système éducatif à commencer par les personnels de terrain eux-mêmes. Il faut en outre répondre prioritairement aux besoins des lycées et des écoles qui ne s’inscrivent pas dans un réseau mais présentent des situations sociales difficiles dans la perspective d’une politique prioritaire qui vise à élever le niveau culturel et scolaire de tous les élèves issus des milieux populaires quel que soit leur lieu de scolarisation.

Pour consolider ces priorités il faut :
• Confirmer et étoffer le référentiel de l’éducation prioritaire en s’appuyant sur toutes les données de recherche et sur les savoirs d’expérience des professionnels sans imposer de manière simpliste et autoritaire des solutions prétendument issues de « la » science. En revanche il faut permettre aux équipes de travailler à développer des collectifs professionnels formés à résoudre les difficultés d’enseignement des enseignants et les difficultés d’apprentissage des élèves. La formation initiale doit donner, pour tous les personnels, une place plus importante aux pratiques professionnelles reconnues pour favoriser la réussite des élèves des milieux populaires. La formation continue doit, pour une large part, être conçue en se fondant sur des concertations préalables avec les professionnels. Des travaux doivent pouvoir être conduits dans ces écoles et établissements avec des équipes de recherche.
• Inscrire dans la durée cette politique largement concertée avec ses acteurs en évitant désormais les stop and go préjudiciables à la continuité d’un travail qui nécessite du temps, de la cohérence et une approche systémique, sur la durée de la scolarité obligatoire a minima.
• Faciliter le développement d’appuis à l’activité d’enseignement, qui ne laissent pas croire que tout se jouerait en dehors de l’école, mais qui viseraient à soutenir l’école dans sa tâche d’enseignement en adaptant de manière pertinente les interventions extérieures pour répondre aux besoins identifiés par les professionnels de l’éducation (interventions médico-sociales, aides scolaires, relations avec les parents…). La réorientation d’une partie de l’action des cités éducatives est souhaitable à cet égard.
• Continuer à rendre les postes en éducation prioritaire attractifs par des moyens financiers (indemnités) mais aussi en développant l’accès à des ressources culturelles et des outillages pédagogiques qui répondent aux besoins identifiés par les professionnels et la recherche, et redonnent à ces écoles et collèges des moyens d’agir et du sens à l’exercice des métiers de l’éducation.
• Attribuer les moyens d’enseignement sur l’ensemble du système non seulement en fonction des effectifs et des structures mais en en distribuant une part très significative en fonction de la situation sociale des écoles et établissements. Les écoles et établissements qui ont les IPS (Indicateurs de positionnement social) les plus bas doivent recevoir à effectif égal plus de moyens que les autres. Dans tous les cas, l’enseignement public qui accueille tous les élèves doit recevoir plus de moyens que le privé contrairement à ce qui apparaît actuellement dans les lycées.
• Revoir la carte de l’éducation prioritaire au moyen des IPS en n’incluant pas le privé. Une démarche comparable est souhaitable pour déterminer une liste de lycées prioritaires qui pourraient par ailleurs bénéficier d’un référentiel spécifique dans une perspective bac-3/bac+3.
• Enfin, veiller à ce qu’à tous les niveaux du système éducatif, le pilotage soit respectueux des orientations du référentiel et respectueux des acteurs en favorisant davantage leur travail collectif pour la résolution des problèmes professionnels qu’ils rencontrent.

Les soussignés demandent qu’une politique de mixité sociale soit sérieusement remise en œuvre et qu’une politique d’éducation prioritaire soit réaffirmée et conduite de manière pérenne. Des rencontres nationales, académiques et départementales ainsi que dans les réseaux devront permettre de faire le point sur ces deux dimensions fondamentales de la politique éducative afin de remobiliser tous les acteurs sur cet enjeu essentiel pour l’avenir du pays.

Les premiers signataires :
Marc Bablet, Lilia Ben Hamouda, Michèle Coulon, Marc Douaire, Jean-Claude Emin, François-Régis Guillaume, Cintia Indarramendi, Marc Megret, Jean-Yves Rochex, Jean-Paul Tauvel, Blandine Tissier, Arlette Toussaint, Jean-Michel Zakhartchouk, membres du Conseil scientifique de l’OZP
Alain Bourgarel fondateur de l’OZP
Jacques Bernardin président du GFEN
Gwenael Le Guevel président des CRAP Cahiers pédagogiques
Viviane Youx présidente de l’ AFEF
Elisabeth Allain-Moreno secrétaire générale du SE-UNSA
Catherine Nave-Bekhti secrétaire générale de la CFDT éducation formation et recherches publiques
Sophie Venetitay secrétaire générale du SNES-FSU

Publié dans le Café Pédagogique le 6 janvier 2025.

Signer le Manifeste sur le site de l’OZP

Refonder une institution éducative démocratique, humaniste, moderne

Par le collectif Riposte Éducation, auquel participe le GFEN.

6 décembre 2024.

Il y a bientôt un an, près d’une cinquantaine de mouvements pédagogiques, associations complémentaires de l’école, associations d’usager·ères, et organisations syndicales, plusieurs centaines de chercheur·es et personnalités de l’éducation lançaient le collectif Riposte éducation, à travers un premier appel rassemblant toutes celles et ceux qui ne peuvent se résigner à une École du tri social. Faisant le constat d’un service public d’éducation « qui va mal », où les inégalités scolaires se creusent, où la réussite scolaire est de plus en plus marquée par l’origine sociale et où les personnels sont à bout, où les enfants et les jeunes sont en souffrance, elles et ils appelaient à rompre avec les politiques éducatives menées depuis 2017 pour « refonder une institution éducative démocratique, humaniste, moderne. »

Un an après, nous lançons un nouvel appel dans un contexte politique instable et inquiétant, hostile à l’école publique et face à une nouvelle dégradation du système éducatif en France. Ce contexte appelle à repenser la finalité de notre système éducatif et à définir collectivement son rôle sociétal. Il est urgent de redonner à l’École et à ses personnels, aux parents, aux associations d’éducation populaire et d’éducation nouvelle, les moyens de travailler conjointement à l’épanouissement et à l’émancipation des jeunes, et de retisser les liens humains qui sous-tendent la société. […]
LIRE LA SUITE DE L’APPEL et les signataires

Formation des cadres et militants des mouvements de Convergence(s)

Le dossier reprend les contenus et démarches de la formation organisée pour la première fois lors de la biennale 2024 à Nantes. Ce sont des « traces » pour les participant.e.s mais le document peut aussi être un support intéressant pour transférer cette initiative ici ou ailleurs … Lire

Voir aussi Retour sur la 4e Biennale Internationale de l’Education Nouvelle – Nantes

Relever le défi de la démocratisation, par Philippe LAHIANI (GFEN)

Intervention au débat public « Comment parvenir à une école égalitaire et démocratique ? » à l’initiative de : À gauche citoyens !, Ensemble, Génération.S, NPA

Besançon, 21 novembre 2024

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Présentation

Le GFEN (Groupe Français d’Éducation Nouvelle) est une association, mouvement de recherche et de formation en éducation.

Il a été fondé en 1921 en réaction à la boucherie de 14-18. Depuis les années 80, en opposition à l’idéologie des dons, des talents, du mérite, il a pour slogan « Tous capables » et propose  des ponts entre recherche, formation et pratiques sur le terrain de la maternelle à l’université, dans toutes les disciplines, dans comme hors l’école.

Plus de cinquante ouvrages témoignent de pratiques pour transformer les modalités d’apprentissage de nature à permettre l’engagement intellectuel de chacun et la compréhension partagée.

Un passé récent qui marque encore le présent

C’est dans les années 60 que les réformes Berthoin et Fouchet prolongent la scolarité de 14 à 16 ans puis la réforme Haby qui, en 1975 ouvre le secondaire à tous les élèves en instaurant le collège unique.

Beaucoup pensaient alors qu’ouvrir le collège à tous permettrait une véritable démocratisation.

Mais, dans ces mêmes années, de grandes enquêtes statistiques mettent en évidence que, dès l’école primaire, le milieu social, mais aussi les comportements et aspirations des familles et l’origine géographique, sont des déterminants massifs pour la réussite scolaire.

Aujourd’hui encore, si on ne peut nier les effets de massification qui montrent une augmentation des bacheliers et une baisse des sorties sans qualification,  force est de constater que les enfants de milieux populaires réussissent moins bien que les enfants de cadres.

Selon une note de l’Observatoire des inégalités (2008) « Les catégories sociales les moins favorisées (…) les enfants d’ouvriers, d’employés et des sans activité représentent 84 % des élèves en difficulté alors qu’ils constituent la moitié des jeunes qui suivent un enseignement général ».

Quand la réussite scolaire proposée à tous (ce qui n’était pas le cas auparavant) est refusée à certains il faut trouver une explication.

Les premières tentatives d’explication furent celle d’un déficit d’intelligence : la fameuse théorie des dons qui fait des enfants de pauvres de pauvres enfants. Mais les recherches, notamment celles sur le cerveau, ne découvrirent jamais le gêne de la bêtise et montrèrent que l’acquis prime sur l’inné. Ce sont les expériences sociales qui permettent au cerveau de se développer biologiquement.

En 1974, pour contester cette théorie, le GFEN publiera « L’échec scolaire : doué ou non doué ? ». Livre qui rencontra un grand succès, au-delà des professionnels de l’éducation.

Puis il y eut les théories du handicap socio culturel (dans une falsification de la théorie Bourdieusienne) qui ont mis en cause la responsabilité des familles de milieux populaires, dans l’échec de leurs enfants (on comprendra que ces familles aient des réserves, voire se méfient de l’école).

Des sociologues comme Bourdieu développent une théorie de la reproduction dont la thèse centrale est que de façon indéniable le système éducatif transforme les injustices et les inégalités sociales en inégalités scolaires ; ce qui, en retour, justifie les inégalités sociales et substitue aux privilèges de la naissance ceux du mérite certifié par l’école.

Ils développent l’idée que c’est par ses valeurs et ses pratiques, que l’École est en connivence avec les valeurs et pratiques qui sont celles des classes moyennes et supérieures et en décalage – voire en contradiction ou conflit – avec celles des milieux populaires, devenant handicapantes pour ceux-ci.

Bourdieu parlera de la violence symbolique de l’École quand celle-ci est indifférente aux différences, quand elle s’adresse à tous de la même façon en supposant un déjà là chez chacun, quand elle fonctionne sur des implicites partagés par quelques uns (ceux qu’il appellera les héritiers), quand elle ne donne pas explicitement à tous ce qu’elle exige de chacun.

Mais ces théories sociologiques, si elles permettent d’expliquer le phénomène indéniable de la reproduction sont impuissantes à expliquer les cas atypiques qui ne sont pas rares et vont chercher les manques ou ce qui fait distance du côté de l’enfant et de sa famille sans véritablement interroger les pratiques de l’École !

Interroger le rapport à l’école et au savoir des élèves

À partir des années 80, un autre courant de la recherche va s’interroger sur la nature des difficultés des élèves pour essayer de comprendre pourquoi des enfants qui ont tout (sociologiquement) pour réussir échouent et pourquoi d’autres qui auraient tout pour échouer (enfants de chômeur et/ou d’immigré et/ou vivant dans une famille monoparentale pauvre…) réussissent, parfois même brillamment.

Ils vont interroger des centaines d’élèves pour connaître le sens qu’ils donnent à leur présence à l’École et à leur scolarité en leur demandant « Pourquoi apprendre ? ».

L’hypothèse de ces chercheurs est que selon le sens que les élèves donnent à leur présence à l’école ils vont travailler de manière différente, utiliser des moyens en correspondance avec ce sens donné.

D’où la deuxième question posée à ces élèves : « Comment fais-tu pour apprendre ? »

Pour certains, l’école est faite pour avoir des bonnes notes, passer de classe en classe et accéder au « bon métier ». Ils n’investissent que ce qui leur apparaît utile à ces fins et interrogent la valeur des contenus (« A quoi ça sert ? » demandent-ils). Le savoir apparaît comme un objet extérieur que l’on reçoit en vue de le stocker avant de le restituer. Apprendre consiste ainsi à « écouter l’enseignant », à mémoriser « par cœur, surtout si on a un contrôle le lendemain ». Dans une conception émiettée des activités et des contenus, les situations se succèdent sans lien les unes avec les autres, ni avec des contenus qui les justifient. Dans un tel flou, les élèves restent dans une dépendance excessive à l’enseignant, duquel ils attendent tout.

D’autres élèves n’oublient pas que l’école permet d’obtenir des certifications permettant de choisir son métier, mais y trouvent d’autres bénéfices culturels ou symboliques : leur développement, l’émancipation. Le projet professionnel s’élabore au fil de l’expérience scolaire et des centres d’intérêts qui en émergent.

Résultat d’une activité faite de recherche et d’erreurs rectifiées, savoir est important car cela permet d’exercer son intelligence, de comprendre le monde en échangeant avec d’autres. L’apprentissage est conçu comme processus nécessitant l’engagement personnel, dans la durée. Apprendre consiste surtout à comprendre.

Interroger les pratiques

Les derniers ministres de l’Éducation nationale font des fondamentaux un axe essentiel de leur politique éducative et multiplient injonctions et évaluation standardisées afin d’en vérifier la mise en œuvre.

Avec le retour du mantra « Lire, écrire, compter », classique dans les périodes conservatrices, l’horizon scolaire s’est rétréci, au détriment d’autres domaines (arts, sciences, EPS), pourtant sources de questionnements propres à motiver l’accès à ces fondamentaux, à en diversifier et multiplier l’usage. Ces fondamentaux sont pensés à courte vue, réduits à des gymnastiques combinatoires et à la mise en place d’automatismes, contribuant à appauvrir la pédagogie, dans une logique d’école à deux vitesses.

Viser la réussite à l’école et de l’école nécessite de repenser ce qui en est au cœur : la transmission des savoirs.

On a longtemps pensé que cela allait de soi, renvoyant à la bonne volonté, au sérieux du travail, autrement dit au « mérite » personnel : la réalité dément cette croyance. Les mobiles d’investir la scolarité, la valeur accordée aux contenus, la façon d’appréhender les situations d’apprentissage sont divers selon les univers sociaux. Enrayer les inégalités exige d’en tenir compte, avec lucidité et détermination.

Réduire ou simplifier les contenus s’est avéré une impasse.

Multiplier les dispositifs supplétifs également, dès lors que l’ordinaire des pratiques reste inchangé.

Qu’est-ce qui peut expliquer la permanence des discriminations ?

D’une part, le regard sur les élèves, plus marqué par le jugement (élèves inattentifs, lents, peu autonomes…) que par la compréhension de leurs univers intellectuel ; d’autre part, une conception faible des savoirs, considérés a priori comme dignes d’intérêt et présentés dans l’évidence de leur forme faite.

Une ambition à soutenir : Tous capables !

Dès les années 80, ce sera le slogan du GFEN.

« Tous les élèves sont capables d’apprendre et de progresser » : ce principe est encore inscrit dans la Loi d’orientation. Cependant, les conceptions fatalistes, les injonctions contradictoires perdurent et alimentent les renoncements. Or, si chacun est tributaire d’une histoire passée, l’avenir reste ouvert aux changements, les scientifiques le confirment avec la notion de plasticité cérébrale.

Autrement dit, il y a trop souvent méconnaissance et/ou minoration du potentiel transformateur des situations, pratiques et projets vécus, propres à dénouer les blocages, stimuler l’intérêt, aiguillonner la pensée, sortir du sentiment d’impuissance et relancer le développement.

La fausse évidence des savoirs : Quel sens ?

Si les savoirs ont une valeur, c’est moins en tant qu’objets de transaction scolaire et sociale (pour la note, passer, le métier) qu’au regard de leur valeur anthropologique opératoire. Ce sont des outils d’émancipation des fatalités, des moyens pour l’humain d’échapper à l’étroitesse et aux déterminismes de sa condition.

Fruits d’élaborations socio-historiques, de brassages et d’emprunts entre les peuples, de ruptures et de remaniements successifs, les savoirs ont permis de construire des repères communs et de répondre à des problèmes initialement vitaux et pratiques : chaque nouvelle génération mérite d’y être initiée par l’école. Cette question des origines des savoirs fait puissamment sens, quel que soit l’âge et l’origine sociale des élèves.

Bien souvent, le savoir scolaire percute le « bon sens », déstabilise ce que l’on croyait connaître. Ainsi à l’école, la tomate n’est pas un légume mais un fruit, le soleil ne se couche pas, la laine n’est pas chaude et l’eau ne s’évapore pas à 100°… Accéder à la vérité exige l’examen critique des connaissances familières. G. Bachelard parle d’obstacles épistémologiques : ne pas savoir gêne moins que revenir sur ce qu’on croit savoir !

Dans toutes disciplines et à tous niveaux, les contenus méritent d’être considérés avec attention, afin de déterminer ce qu’il est essentiel de faire comprendre, au regard de là où les élèves en sont. La réflexion épistémologique éclaire l’origine et la genèse des contenus : question clé du sens des savoirs, du contexte problématique de leur émergence et des étapes constitutives qui les ont façonnés.

C’est moins par une approche édulcorée des contenus qu’en restituant leur dimension culturelle et leur profondeur conceptuelle que l’on peut engager tous les élèves dans l’aventure de la connaissance.

En conclusion, pour parvenir à une école égalitaire et démocratique

L’avenir de l’école a besoin d’une ambition politique :

Vise-t-on une démocratisation restreinte ou élargie ? S’agit-il d’élargir le périmètre de recrutement de l’élite ou de promouvoir l’ensemble de la population ?

Question posée à la sortie de la guerre par Wallon, qui se repose aujourd’hui.

Efficacité rime avec équité  : tout le monde profite d’une attention accrue à la réussite de tous. Cette impulsion sert d’horizon structurant à tous niveaux.

L’avenir de l’école a besoin d’un service public fort

Qui seul un est en mesure de soutenir et d’organiser la mixité sociale et scolaire, facteur clé de stimulation réciproque : les sociologues parlent « d’effet de contexte ». Outre l’implantation des établissements, la carte scolaire y contribue, comme la composition des classes.

Autre élément : un tronc commun véritable, sans redoublement, sans classes de niveau[1], jusqu’au terme de la scolarité obligatoire (jusqu’à quel âge ? : Le plan Langevin/Wallon – tous deux anciens présidents du GFEN – l’envisageait jusqu’à 18 ans… en 1947.)

L’avenir de l’école a besoin d’enseignants formés à la réussite de tous

Enseigner est un métier créatif de conception. Imaginer la progression conceptuelle (ce qu’il y a à comprendre, à travers différentes séances), mais aussi le processus de conceptualisation (la manière dont on va faire progresser la réflexion). Mobiliser chacun, mettre en scène des ruptures avec les conceptions points de vue antérieurs des élèves, provoquer des prises de consciences, des changements d’orientation, bref « mettre la pensée en culture ».

Enseigner est un métier qui nécessite un accompagnement des équipes et aussi une solide formation initiale et continue. Formation et accompagnement, dans une articulation dialectique pratique / théorie / pratique qui permette la prise de conscience des effets proprement pédagogiques sur les scolarités et de leur résonance avec les conditions sociales des élèves.


 

Prise de position de la Biennale sur la non-obtention des visas

Prise de position de l’ensemble des organisations et des militant.e.s présent.e.s lors de la 4ème Biennale Internationale de l’Education Nouvelle.

Nous, militantes et militants de Convergence(s) pour l’Education Nouvelle, rassemblé·es pour la 4ème Biennale internationale de l’Education Nouvelle, à Saint Herblain, du 30 octobre au 2 novembre 2024, dénonçons la non obtention des visas pour de nombreux camarades.

Réunissant 26 organisations de différents pays du monde, notre collectif international se réunit tous les deux ans pour échanger sur ses pratiques et ses recherches en éducation nouvelle.

La politique de refus systématique des visas dont l’instruction est déléguée dans les pays de l’espace Schengen à des sociétés privées, porte atteinte au droit à la libre circulation des individus et met à mal notre liberté d’association, de rencontre et de coopération au plan international.

Nous demandons l’application de l’article 13 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme qui précise :

1 – Toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’un état.

2 – Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien et de revenir dans son pays.

Saint-Herblain le 2 novembre 2024

Les « fondamentaux » : savoir de quoi on parle, savoir ce que l’on vise

Le 22 mars, Maria-Alice Médioni, représentant le GFEN, est intervenue lors des Journées d’Études Fédérales de l’OCCE à Évian sur le thème : les « fondamentaux ».

Un dossier sur les « fondamentaux » à user sans modération en y piochant des références, des résultats d’enquêtes, en allant chercher les articles mentionnés ou même … redécouvrir quelques ouvrages oubliés mais dont le propos résonne furieusement aujourd’hui.

Devant une centaine de militant·e·s de l’OCCE, Maria-Alice a dressé l’historique de cette idée vieille de deux siècles – portée aujourd’hui par la droite et l’extrême droite – avant de dresser un constat : La France est la reine des fondamentaux » sans pour autant que l’impact sur les apprentissages des élèves français soit établi. Étayant son propos sur de nombreux articles et études, elle montre comment la droite française s’est appuyée sur cette idée pour mieux discipliner les esprits : lire, écrire, compter et bien se comporter, sans que soit vraiment développés les savoirs associés. L’extrême droite va encore plus loin qui demande une remise à plat des méthodes pédagogiques et des contenus.

Mais si la France est la championne des « fondamentaux » en raison du temps passé à l’école en français et mathématiques, les résultats aux évaluations nationales et internationales sont médiocres.  Les enseignants français seraient-ils incapables d’assurer leur mission ?

S’appuyant sur les études ayant suivi les expérimentations « plus de maîtres que de classe » ou le dédoublement des classes de CP en REP+, elle montre que les dispositifs ont peu d’effets si on ne change pas les pratiques ou si l’on s’enkyste dans des méthodes relevant davantage d’un « dressage » : ex. maîtrise du code et de la fluence plutôt que compréhension d’un texte.

Mépris des enseignants sommés d’exécuter plutôt que de concevoir de véritables situations pédagogiques, retour à des méthodes qui n’ont pourtant pas donné de bons résultats, telle semble être la boussole des dirigeants actuels qui en focalisant l’opinion publique sur la « maitrise des fondamentaux » empêche une véritable réflexion sur ce qui est important d’apprendre à̀ l’école.

Reprenant les propos de Jacques Bernardin : « Centrer l’école sur les fondamentaux renvoient à un double implicite : à la fois une vision déficitaire des capacités de certains élèves conjuguée à une faible ambition éducative à leur égard » (Bernardin, 2022),  Maria-Alice souligne les dérives inhérentes à cette conception de l’enseignement : inflation d’instruments de mesure faciles, adaptation au marché de l’emploi, attitudes consuméristes des familles et des élèves…

C’est pourquoi elle nous demande d’interroger « les fondamentaux » qu’on nous assène et « redéfinir ce qui pour nous fait fondement et sens pour notre action et notre personne. ».

Quels fondamentaux (fondements) à la hauteur des enjeux d’aujourd’hui ?

              – Une démocratisation élargie de l’accès au savoir, à la culture : il faut sortir de ces logiques qui transforment les inégalités sociales en inégalités scolaires.

              – Susciter le désir d’apprendre : dans un monde de plus en plus complexe, il nous faut réfléchir aux outils et aux pratiques pour repenser les éléments différenciateurs, les modalités d’action usuelles générant les inégalités puis recentrer le travail, pour tous, sur les contenus, concepts-clés et objectifs obstacles. « Faire accéder à une aventure intellectuelle où les questionnements ouverts sont plus importants que les réponses fermées et qui permette de se confronter à la complexité et à l’incertitude ».

             – Reconstruire la confiance en soi : selon les études, « les élèves français n’ont pas confiance en eux », mais peut-on apprendre sereinement sous la menace de la note ou du redoublement ? C’est à l’enseignant de proposer un cadre sécurisant permettant la prise de risque de changer son système de représentations afin d’arriver à décoder et se représenter le monde… donc apprendre et acquérir le pouvoir d’agir. Agir à l’école mais plus largement en tant que citoyen.

               – Se construire une pensée critique : dans une société dominée par une accélération de l’usage des nouvelles technologies, ce qui était censé améliorer l’information en termes d’accessibilité et de rapidité devient un véritable fléau en termes de flots ininterrompus de nouvelles et de fiabilité de l’information. Comment prémunir les jeunes contre les dérives d’un système qui empêche de penser par soi-même et à confronter sa pensée à celles des autres ? Que pourrait faire l’école dans ce domaine ?

Habituer les apprenants à la prise de distance pour réfléchir et apprendre à surseoir à la pulsion, exercer à la vigilance critique, distinguer croyances et concepts, opinions et vérités scientifique… Mais pour cela il faut casser les formes canoniques de la transmission basées sur une pensée binaire (vrai ou faux) « pour accéder à la complexité́ des objets, des faits, des situations par l’analyse, les mises en relation, le recours à l’histoire des savoirs, la confrontation des points de vue ».

                – Ce qui unit et libère : Reprenant les propos d’O. Reboul sur ce qui unit et ce qui libère et vaut donc la peine d’être enseigné, Maria-Alice nous propose de recréer de la cohérence entre finalités et pratiques, de développer l’auto-socio-construction et faire du groupe d’apprenants un collectif d’apprentissages solidaires. Dans ce cadre la coopération est indispensable, ce qui ne se décrète pas mais se construit dans un cadre basé sur des valeurs : égalité, solidarité, entraide. « Coopérer à l’école, c’est expérimenter des règles sociales qui ‘ font valeur’ bien au-delà » (Bernardin, 2014).

Jacqueline BONNARD

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Audition par le CESE de Jacques Bernardin & rapport de la commission

Jacques Bernardin, CESE, 2023

Jacques Bernardin (président du GFEN) avait été auditionné par la Commission Éducation, culture et communication du CESE (Conseil économique social et environnemental) dans le cadre de la saisine d’initiative « Réussite à l’École, réussite de l’École », le 13 septembre 2023. Lire l’audition

Suite à ces travaux, les préconisations du CESE ont été présentées le 25 juin 2024 Lire

En savoir plus sur la saisine « Réussite à l’École, réussite de l’École » (site du CESE)

Des voix pour adapter mon enseignement : hétérogénéités

Dans ce podcast (baladodiffusion) « Des voix pour adapter mon enseignement », notre objectif est double :
1) comprendre pour mieux définir l’hétérogénéité
2) vous proposer des pistes pour prendre appui sur ces hétérogénéités. Nous espérons ainsi vous apporter, sans vous les imposer, des éclairages pour vous aider à réfléchir sur vos pratiques.

Émission : Des voix pour adapter mon enseignement

Animé par :
– Laurent Carceles, Professeur de français en collège et formateur pour l’académie de Créteil et membre du GFEN
– Anne Giral, Professeur de SVT en collège et formatrice pour l’académie de Créteil

Produit par : Académie de Créteil

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NON au projet éducatif de l’extrême droite OUI pour préparer ensemble l’avenir de l’école

Communiqué du Collectif Riposte Éducation, le 19 juin 2024

Nous sommes un collectif d’enseignants, de personnels éducatifs, de chercheurs et de parents mobilisés pour faire évoluer l’École. Nous luttons contre les réformes successives qui ont mis à mal l’Éducation Nationale et l’Université et nous travaillons à un projet alternatif.

Avec la perspective de voir arriver au pouvoir le rassemblement national et ses affidés de droite, le danger est encore plus grand. Leur projet pour l’École aggravera encore des transformations néfastes déjà engagées. Nous courons le risque d’une politique encore plus élitiste, plus ségrégationniste, une caporalisation encore plus forte des enseignants, une école habillée de tous ses oripeaux déjà connus : programmes réducteurs et peu ambitieux, imposés sans discussion, uniforme, autoritarisme, sanctions…

Le travail enseignant serait réduit à un métier d’exécution et encore moins attractif avec une formation au rabais. Mais surtout le tri social serait encore plus renforcé alors que notre école est parmi les plus inégalitaires et où la réussite scolaire dépend le plus du niveau social. Nous devons collectivement être à la hauteur de cet enjeu. Il en va de la cohésion sociale et de la confiance dans la démocratie.

Ensemble et unis, nous appelons les enseignants, parents, tous les personnels, cadres de l’éducation, tous les démocrates à refuser ce projet, dès le premier tour. Il nous faut sauvegarder et renforcer les ambitions de l’école de la République : démocratie, égalité (réelle) des droits, éducation de haut niveau, liberté de penser.

Ensemble et unis pour exiger la mise en oeuvre de mesures claires pour 2024-2027 : réparer en urgence les fonctionnements démocratiques de l’institution, la formation des enseignants, la titularisation et la formation des précaires, rendre meilleur l’accueil des élèves et améliorer les conditions de travail et les salaires des enseignants et personnels. On ne transforme pas une école avec des personnels qui vont mal.

Ensemble et unis pour demander, dès le début de septembre, l’ouverture d’une vaste concertation démocratique : un Grenelle alternatif réunissant les personnels et les usagers pour une rénovation profonde et audacieuse du système éducatif.

Face à l’individualisme, la sélection, la compétition, le séparatisme social et l’intolérance qui se développent aujourd’hui, cette École doit reconstruire les conditions de l’égalité et de la mixité sociale. La pédagogie doit favoriser la coopération, l’inclusion et l’altérité. Elle doit aussi donner des outils pour agir face à l’urgence écologique et permettre de penser la complexité de notre société et de notre planète. La nécessaire transformation de l’École ne peut attendre !

Ensemble et unis pour un front de refus contre un nouveau désastre pour l’école.

Ensemble et unis, partenaires et acteurs de l’éducation nationale, parents, syndicats, associations diverses, étudiants, votons pour un projet clairement engagé sur ces valeurs et enjeux démocratiques et au service d’une École pour tous.

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Site de Riposte

Avis de tempête : l’heure des choix… Faire front contre l’extrême droite

Convergence(s) pour l’Éducation nouvelle écrit un communiqué commun pour faire front contre l’extrême droite. A chacune et chacun des lecteurs de ce texte d’en assurer la diffusion (16 juin 2024)

Les résultats électoraux du 9 juin confirment globalement une poussée de l’extrême-droite en Europe, inédite en France. On pourrait y voir le résultat d’une politique sociale affligeante accompagnée d’une banalisation de thèmes réactionnaires ces dernières années, au prétexte d’y faire front.

Les horizons politiques sont bousculés et confirment d’importants dangers pour les démocraties.

Les éducateurs (parents, enseignants, animateurs, travailleurs sociaux, …) ne peuvent qu’être inquiets du programme rétrograde de la vague brune, « choc des savoirs » mais en pire : limitation des apprentissages aux fondamentaux et à une histoire nationale revisitée, renforcement de l’orientation précoce des élèves, remise en cause d’une filière secondaire ouvertes à toutes et tous, suppression de l’enseignement des langues et cultures d’origine, port de l’uniforme à l’école, reprise en main de la formation, du contenu et des modalités des enseignements… Les autres lieux d’éducation moins formelle, de culture, de loisirs ne sont pas épargnés…l’ensemble visant la « restauration du principe de transmission et de l’autorité ».

Promesse d’une politique éducative au pas de l’oie, alliant conservatisme pédagogique, promotion de la préférence nationaliste et sélection au mérite. Au prétexte de « rétablir l’excellence éducative », c’est une violente ségrégation sociale qui serait renforcée, associée à la promotion de valeurs rances.

Ces options sont aux antipodes de l’Éducation nouvelle, rassemblée autour de pratiques, d’orientations et de principes communs, propres à fonder une autre éducation au regard des enjeux du siècle. Elles sont aussi aux antipodes des valeurs de toutes celles et ceux qui militent pour une vie digne pour tous, pour une bifurcation du monde vers la construction d’un nouvel ordre social. Cf le Manifeste de Convergence(s) pour l’Éducation Nouvelle

Notre époque appelle en effet à une démocratisation élargie de l’accès à une culture commune et émancipatrice dans un monde complexe et mouvant, à développer l’esprit critique vis-à-vis d’un flux informatif permanent et incontrôlé, à promouvoir une école qui réponde à des perspectives politiques et transformatrices à visée émancipatrice, à développer des rapports de coopération et de compréhension réciproque entre nos communautés d’appartenance et entre les peuples, pour un monde pacifié où prévaut – contre tous les égoïsmes, replis identitaires et prédations – le souci du bien commun. A l’heure où notre rapport à l’autre, à une altérité incluant notre rapport au vivant, est fortement dégradé, où la crise climatique creuse encore davantage les inégalités, nous avons besoin de solidarités fortes.

Face au danger, nous appelons les Éducateurs à faire front : demain reste à écrire !

Convergence(s) pour l’Éducation Nouvelle est un collectif qui rassemble plus de 100 organisations (associations nationales et locales, fédérations internationales) de plus de 35 pays du Monde. Toutes se réfèrent aux principes de l’Éducation Nouvelle.
https://convergences-educnouv.org/ Contact : jean.luc.cazaillon@cemea.asso.fr

Télécharger le communiqué que nous vous invitons à diffuser

Podcast « Faire de l’élève l’auteur de ses propres apprentissages » : les éclairages de Pascal Diard sur le mouvement de l’Éducation nouvelle

Podcast de Lallumeur de réverbères

Par Jorge Brites, le 25 Mars 2024

« Pour ce 28ème épisode du podcast, nous avons décidé de mettre en lumière un mouvement pédagogique et politique qui milite depuis près d’un siècle pour revoir tous les paradigmes qui ont guidé l’édification de l’École de la République depuis le XIXème siècle, et par exemple les Lois Ferry (1881-1882).

L’éducation nouvelle défend le principe d’une participation active des individus à leur propre formation et à leurs apprentissages. L’idée est de sortir de la simple accumulation de connaissances pour avoir une approche globale de l’éducation qui permette de susciter chez l’individu l’esprit d’exploration et de coopération. Une importance égale y est accordée aux différents domaines éducatifs, et l’apprentissage de la vie sociale y est considéré comme central. L’éducation nouvelle fonde sa philosophie dans la confiance dans les ressources propres à chacune et chacun. En somme, elle reconnaît l’éducabilité du genre humain.

Pour nous éclairer, nous avons donné le micro le 3 novembre dernier, à Saint-Ouen, à Pascal DIARD, né en 1961, professeur d’Histoire-géographie à Saint-Denis, et responsable Île-de-France du Groupe Français Éducation Nouvelle (GFEN). »

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Halte à la casse de l’école : une riposte collective s’impose

Ce texte d’appel pour reconstruire l’école républicaine fait suite à une rencontre en ligne, proposée par l’AFEF le 13 décembre 2023, annoncée dans le Café pédagogique du 22 novembre 2023. Les associations – dont le GFEN -, syndicats, chercheurs présents ont approuvé le projet d’une riposte collective aux annonces ministérielles et présidentielle pour l’école, particulièrement inadaptées aux défis éducatifs actuels, et dangereuses. Ils ont décidé d’une action à long terme pour analyser la situation de l’école et de son environnement, pour chercher des propositions communes, notamment lors d’un Grenelle alternatif de l’école, et pour les diffuser largement. Ce texte constitue une première base, un premier état des lieux des problèmes pour lancer ce chantier.

Appel public paru in Café pédagogique du 19/01/2024 :

Pour relever le défi d’une école plus égalitaire, pour former des citoyennes et des citoyens de demain éclairé.es, à même de relever les enjeux majeurs posés par les crises climatiques, démocratiques, sociales qui pèsent sur nos sociétés, une bifurcation est plus que jamais nécessaire.

L’école française, dans son ensemble, va mal. Les signaux sont au rouge, le président en fait son affaire personnelle dans une direction amplifiant la fracture sociale qui ronge déjà notre école. Rejoignant d’autres études, les dernières évaluations PISA soulignent et confirment des indicateurs inquiétants : poursuite de la baisse des résultats des élèves de 15-16 ans en maths et lecture, confirmation des écarts de réussite selon les milieux sociaux, mal-être scolaire sensible des élèves, et souffrance des professionnels de l’éducation.

Ce constat accablant est le fruit de politiques éducatives anciennes (réactualisées et amplifiées ces dernières années), conjuguées à un sous-investissement chronique, qui ont mené le système scolaire au bord de la rupture. Et les annonces récentes de Gabriel Attal avant qu’il ne quitte le ministère de l’Éducation Nationale, parce qu’elles se situent dans la parfaite continuité des réformes précédentes, ne peuvent qu’aggraver le caractère inégalitaire et ségrégatif de l’école, et la mise sous tutelle des métiers de l’enseignement.

Pour relever le défi d’une école plus égalitaire, pour former des citoyennes et des citoyens de demain éclairé.es, à même de relever les enjeux majeurs posés par les crises climatiques, démocratiques, sociales qui pèsent sur nos sociétés, une bifurcation est plus que jamais nécessaire.

Nous ne pouvons plus accepter une gouvernance autoritaire, un management violent qui augmentent la souffrance des personnels. Nous ne pouvons plus accepter l’organisation de la ségrégation des acquisitions scolaires, évinçant les élèves majoritairement issu.es des classes populaires de la maitrise des savoirs permettant de penser le monde pour le transformer. Nous ne pouvons plus accepter les manques de moyens financiers et humains participant de la dégradation du service public d’éducation.

C’est pourquoi nous appelons à une riposte, unitaire et collective.

Nous, mouvements pédagogiques et associations complémentaires de l’école, associations d’usagers.ères, organisations syndicales, chercheuses et chercheurs, actrices et acteurs de l’éducation, lançons un grand mouvement d’élaboration d’alternatives pour l’École, visant à une grande réforme pour refonder une institution éducative démocratique, humaniste, moderne. Nous appelons toutes celles et tous ceux qui ne peuvent se résigner à une école du tri social, à participer à nos travaux pour un Grenelle alternatif.

Rejoignez-nous. Nous avons besoin de vous.

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Retrouvez la version longue du texte sur le site de l’AFEF

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Les chantiers de réflexion et élaboration du projet RIPOSTE

L’évaluation à l’école maternelle

L’évaluation est une thématique récurrente dans l’institution scolaire qui porte en elle l’image même du métier portée par les enseignants. Les programmes de 2015 ont introduit le concept d’ « évaluation positive » à l’école maternelle qui vise à pointer les réussites de l’enfant dans ses apprentissages. Elle repose sur une observation régulière et attentive du travail de l’élève ; elle est donc au service des apprentissages plutôt que d’établir un étalonnage entre celles et ceux qui réussissent à l’instant « t » et les autres qui tatônnent encore.

De nombreuses équipes d’école maternelle ont travaillé à l’interne pour constituer des cahiers de réussite ou de progrès, traces des activités de leurs jeunes élèves, à la fois outil de communication entre l’enfant et l’adulte, entre l’enseignant et les parents, entre collègues.

D’autre part  en novembre 2022, le Le Centre national d’étude des systèmes scolaires (Cnesco), en partenariat avec l’université Clermont Auvergne – Inspé de l’académie de Clermont-Ferrand, a organisé sa septième conférence de consensus intitulée « L’évaluation en classe, au service de l’apprentissage des élèves » au CNAM, ce qui a donné lieu à un dossier de synthèse .

Sollicité souvent sur cette thématique, le secteur maternelle du GFEN a constitué un groupe de travail  pour approfondir la question durant une année et explorer différents chantiers possibles pouvant donner lieu à des Rencontres Nationales en 2025.

Dans un premier temps, nous avons étudié le travail du CNESCO à ce sujet et repéré ce qui pouvait être pertinent pour notre réflexion à l’école maternelle.

Le 27 janvier nous avons organisé une « petite rencontre maternelle » au siège d’Ivry pour travailler cette thématique à partir d’outils utilisés en classe d’une part, d’entretiens menés auprès de collègues d’autre part. Le travail se poursuivra tout au long de l’année en vue de construire des ateliers à proposer en janvier 2025.

Mais déjà en 2017, le secteur Maternelle du GFEN Maternelle s’était interrogé sur « Evaluer… qu’est-ce que ça veut dire ? Comment faire ? » dans le cadre particulier de l’école maternelle.
A partir de questions récurrentes sur l’évaluation :

  • Evaluer pour quoi ? Pour qui ? Evaluation formative ? Evaluation positive ? Evaluer une compétence, est-ce possible ?
  • Lorsqu’on évalue,on observe quoi ? Selon quels critères ? A partir de quels indicateurs ?
  • Carnet de bord, carnet de suivi, bilan des acquisitions de fin de cycle : quels usages, quelles fonctions ?

Pour mieux comprendre et transformer les pratiques, le groupe a compilé un certain nombre de documents, outils prescrits ou fabriqués par des équipes d’écoles,traductions faites par des inspectrices ou des formatrices, ouvrages, vidéos,etc., listés ci-dessous.

NB : les participants à la rencontre sur l’évaluation ont apporté les documents élaborés au sein de leurs équipes d’écoles. Ceux-ci ne figurent évidemment pas dans la suite du dossier car non  publiables en ligne.

Le résumé succinct des réflexions du groupe

  • Le compte rendu de la réunion de travail du 22 avril 2017 lire

Les deux documents principaux de base de la réflexion sont

  • Texte du Centre Alain Savary : que signifie « évaluer les élèves » ? lire
  • Le diaporama d’Evelyne Collin, IEN Maternell utilisé aux Rencontres 2017 du GFEN lire

Des documents théoriques

  • Diaporama pour une formation des PDMQC de l’académie de Dijon, centré sur l’évaluation lire

Les documents de l’institution

  • Quatre documents élaborés dans l’académie de Versailles
    – Evaluer au quotidien en maternelle voir
    – Une conception possible de l’évaluation voir
    – Le cahier de progrès voir
    – Un cahier de progrès pour quoi faire ? voir
  • Un livret de 50 pages « Évaluation: Mobiliser le langage dans toutes ses dimensions » lire et une note d’accompagnement à l’évaluation sur Eduscol lire
  • Une note-repères de la DSDEN de Loire atlantique lire
  • Une conférence de Martine Grouthier, IEN Maternelle du Vaucluse Voir

« La construction de savoir, dynamique d’émancipation » : Jacques Bernardin au Colloque CUIP




Colloque international du CUIP (Comité Universitaire d’Information Pédagogique) :
« L’Éducation nouvelle : Héritages, (ré)inventions, actualité« 

Mercredi 28, Jeudi 29 et Vendredi 30 juin 2023,
Université Paris-Panthéon-Assas, 92 rue d’Assas 75006 Paris

Voir le programme

Relevons pour le GFEN :

  • « La construction de savoir, dynamique d’émancipation » par Jacques Bernardin
  • « Le GFEN après Henri Wallon : entre tradition et changements (1963-1969) » Antonin Paha
  • « Le secteur orientation du GFEN (1979-2001). L’orientation levier d’une transformation de l’école ? » Jérôme Martin

Education Morale et civique

Aborder cette rentrée autrementJulien CUEILLE – octobre 2020

« Sous le ciel incertain des jours »Pascal DIARD 19 octobre 2020 (Edito de la lettre d’informations du GFEN)

« Contre les fanatismes, pour la liberté d’expression » Collectif Sarthois « Réagir pour la démocratie », auquel s’est associé le GFEN 72 – octobre 2020

Guide pratique_du HCE – 2015

« Le grand retour de la morale à l’école » ? Point de vue d’un enseignant en philosophie, Jean-Charles ROYER – 2011

Entretien avec Benoît Falaize, (A lire sur le site du Café Pédagogique) par François Jarraud – 2008

Numéro140 de la revue Dialogue « La morale qu’en faire ? » Citoyens dans le savoir    – Odette BASSIS – 2015 

Partis-pris

Tous capables, du pari éthique à la loi d’orientation    – Jacques BERNARDIN – 2014 

De l’ambition_pour l’école !plaquette GFEN – 2012

Pour un avenir du second degre Jacques BERNARDIN – 2012

Tous capables, _la preuve par l’épreuve    –   Jacques BERNARDIN – 2008

Egalité et éducation : contre le renoncement  – Jacques BERNARDIN – 2010

L’ ecole en mutation_: quels enjeux actuels ? _ – Jacques BERNARDIN – 2010

Retour au Ministère de l’instruction publique   Jacques BERNARDIN – 2008

Fabrique de crétins  – GFEN28 – 2007

Pour une école de l’égalité Martine ALCORTA – 2007

Faut-il être nostalgique du passé ?Jacques BERNARDIN – 2005

L’école fondatrice du lien social     – Jacques BERNARDIN – 2003

Collège pour tous    – déclaration du GFEN – 2002

Manifeste du GFEN « L’éducation nouvelle comme émancipation mentale à conquérir : une urgence de civilisation ! » – Pour le GFEN, Henri BASSIS – 1992